L'imbroglio politique semble s'éterniser et l'espoir d'une solution concertée à la crise politique engendrée par l'assassinat du député Mohamed Brahmi se rétrécit telle une peau de chagrin …C'est, du moins, ce qui ressort des déclarations des dirigeants des organisations qui parrainent le dialogue national indirect entre la Troïka au pouvoir et l'opposition. «Le dialogue est actuellement plus proche de l'échec que du succès. Un temps précieux a été perdu dans des débats stériles», déclare Sami Tahri, secrétaire adjoint de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT). Et d'ajouter : « le leader du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, a déclaré à maintes reprises que son parti accepte l'initiative de la centrale syndicale mais des reculades ont eu lieu par la suite ». Le responsable syndical dont l'organisation joue le rôle de médiateur de la crise aux côtés de l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA), de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) et l'Ordre National des Avocats, indique, cependant, que ces «parrains» sont disposés à poursuivre le dialogue et à rapprocher les points de vue entre la Troïka et l'opposition. Une réunion s'est d'ailleurs tenue hier après-midi entre les dirigeants de ces quatre organisations et des représentants du Front du salut national (FSN), une coalition d'opposition regroupant des partis allant du centre droit à l'extrême gauche. Pression Selon les premières fuites, aucune avancée notable n'a été enregistrée lors de cette séance de dialogue. Les opposants auraient estimé que les nouvelles propositions de la coalition au pouvoir restent éloignées de l'initiative lancée par l'UGTT. Cette dernière stipule notamment la formation d'un gouvernement de compétences nationales et la détermination d'un agenda pour l'Assemblée nationale constituante (ANC). La rencontre entre la coalition gouvernementale et des médiateurs pour trouver une issue à la crise politique qui s'est tenue mardi n'avait abouti à aucun consensus «Il n'y a pas eu de grandes évolutions lors de cette réunion», a déclaré le secrétaire général de l'UGTT, Houcine Abassi, ajoutant que « les deux parties doivent faire des concessions importantes». Lors de cette réunion qui était initialement prévue pour lundi, la Troïka a proposé la démission de l'actuel gouvernement dans un délai de 8 semaines. Elle a, néanmoins, indiqué que ce délai pourrait être ramené à quatre semaines seulement au cas où un dialogue direct entre l'opposition et la coalition au pouvoir aboutirait à un consensus rapidement. Face à ce blocage, les quatre organisations nationales ont indiqué hier qu'elles allaient tenir une réunion pour évaluer le bilan des négociations, avant de tenir une conférence de presse pour rendre public ce bilan et dévoiler d'autres vérités relatives au dialogue. Mardi, Houcine Abbassi avait affirmé que son organisation sera contrainte de dévoiler les quatre vérités aux Tunisiens en cas d'échec du dialogue national. Le secrétaire général adjoint de la centrale syndicale Bouali M'barki a également fait savoir, hier, que l'organisation pourrait convoquer une réunion de sa commission administrative pour décider des «moyens de pression» afin de pousser toutes les parties à faire des concessions dans l'intérêt du pays, rappelant que la situation économique du pays ne peut aucunement endurer la poursuite des tiraillements politiques. «Humiliation» Du côté de la Troïka, l'optimisme demeure de mise. Ainsi, le président du groupe des élus d'Ettakatol à l'ANC, Mouldi Riahi, a estimé que le dialogue bute sur des détails qui ne doivent pas émécher le lancement de concertations directes entre les différents protagonistes de la crise. « Les points de vue entre la Troïka et l'opposition se sont rapprochés d'autant plus que les deux parties sont tombées d'accord sur la démission du gouvernement. La seule divergence concerne le timing de cette démission. L'opposition estime qu'elle doit avoir lieu avant le lancement d'un dialogue national direct alors que la Troïka pense que le départ de l'actuel cabinet doit être une conséquence de ce dialogue », a-t-il noté. Et d'ajouter : « l'opposition réclame que le chef du gouvernement actuel s'engage à présenter sa démission dans un délai maximum de 15 jours comme condition préalable au lancement du dialogue direct, ce que la Troïka considère comme une humiliation ». M. Riahi indique aussi que toutes les parties engagées dans le dialogue national doivent faire des concessions mutuelles pour faire avancer le dialogue, jugeant qu'il est primordial que les rivaux politiques s'entendent d'abord sur la personnalité qui dirigera le nouveau gouvernement ainsi que sur sa composition. Le dirigeant d'Ettakatol a, d'autre part, noté que la décision de Mustapha Ben Jaâfar de geler les activités de l'ANC a porté ses fruits en apaisant les tensions entre la Troïka et l'opposition.