La journée d'hier a été doublement animée au palais de Justice de Tunis, à cause de la fameuse affaire de jet d'œuf sur le ministre de la Culture qui devait être jugée, mais aussi à cause d'un évènement inouï, et constituant un précédent du moins depuis la Révolution et la constitution de l'instance provisoire de la magistrature : la présidente du syndicat des magistrats tunisiens tient une conférence de presse dans le boulevard, l'accès au palais ayant été interdit aux journalistes par la police. L'objet de la conférence, concernait justement l'immixtion de l'exécutif dans la justice, et l'atteinte à l'indépendance de la magistrature. Alors que la présidente faisait des déclarations aux journalistes, soulagés de parvenir quand même à recueillir des informations à ce sujet, ceux qui étaient venus soutenir les accusés dans l'affaire du jet d'œuf précitée, lançaient des slogans en faveur de la liberté d'expression, avec des plateaux d'œufs en guise de décor symbole. Bref tout tournait autour des libertés d'expression et de la Justice qui sont tributaires l'une de l'autre, et qui constituent des garanties les meilleures garanties de la démocratie. «Au grand étonnement du procureur» Raoudha Laâbidi qui a bien voulu nous éclairer sur cet évènement, nous a affirmé que le procureur de la République lui a déclaré qu'il n'était pas au courant des agissements des forces de l'ordre, tenus pourtant de n'agir que conformément à ses ordres. Il est en effet, le seul qualifié à ordonner d'empêcher l'accès au tribunal à qui il estime opportun de le faire pour des raisons de sécurité ou pour préserver un trouble éventuel de l'ordre public dont il est le seul garant. Les forces de l'ordre ne peuvent agir de leur propre chef, étant de simples exécutants. L'attitude de la police constitue un abus notoire, et une atteinte à la liberté de la presse et à l'indépendance de la Justice, nous a encore déclaré Raoudha Laâbidi. C'est la raison pour laquelle elle a été contrainte de tenir sa conférence en dehors du palais, alors que jusque là toutes les conférences de presse ont eu lieu dans le tribunal, au bureau du syndicat situé à l'étage. Raoudha Laâbidi n'a pas manqué quand même de dénoncer dans cette conférence, l'immixtion de l'exécutif dans la Justice. La dernière en date a été suite à l'intervention du ministre de l'Intérieur qui a cité des noms parmi ceux qui sont impliqués dans les affaires d'assassinats de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, en spécifiant qu'il était certain de leur implication. Raoudha Laâbidi a déploré cette attitude de l'exécutif, qui se prononce de façon affirmative, dans des affaires qui sont encore pendantes devant le juge d'instruction. cela ne peut que nuire à la bonne marche de la Justice et altérer par la même l'intime conviction du juge. « Ce sont le ministère de l'Intérieur et le gouvernement qui gèrent la Justice, a encore ajouté Raoudha Laâbidi, qui est fermement résolue à dénoncer cette situation par tous les moyens, dans l'intérêt de la Justice et du justiciable.Il n'y aucune volonté politique de nature à parvenir à l'indépendance du pouvoir judiciaire « a-t-elle conclu. Pour les journalistes, la journée d'hier est une épreuve de plus dans leur combat incessant pour la préservation de la liberté de la presse, laquelle contribue à la consolidation de liberté d'expression et à une meilleure connaissance de la vérité.