* « La nuit du doute » La « nuit du doute » (Leïlat Echak), c'est celle où on attend de voir le croissant annonciateur du commencement du mois de Ramadan. En fait, tous les mois de l'hégire sont calculés sur la base du système lunaire, où le mois est de vingt neuf jours. Le soir du vingt-neuvième jour, et plus précisément au coucher du soleil, le croissant très fin encore (ce qui représente en réalité le début du cycle lunaire) peut apparaître. A défaut le mois comptera pour trente jours. C'est ce qui explique cette appellation de « nuit du doute », où on n'est pas sûr si le croissant apparaîtra ou pas. Cette nuit avait un caractère particulier, étant donné qu'on ne comptait que sur la vision du croissant pour déterminer le commencement du mois de Ramadan. Il y allait de même à la veille de l'Aïd, cependant la nuit du doute est beaucoup solennelle à la veille de ce mois sacré, qu'est le mois de Ramadan, mois où le saint fut révélé au Prophète Mohamed, mois de piété et de recueillement. Une délégation spéciale était désignée par le Bey à dessein de procéder à la vision du croissant. Elle était constituée par des gens pieux et dignes de confiance, qui se déplaçaient au sommet du mont Sidi Belhassen, à cet effet. Les moyens étaient très limités, les télescopes qu'ils utilisaient n'étant pas très performants, certains d'entre eux surveillaient l'apparition du croissant à l'œil nu, et étant réputés pour leur bonne vision de loin. Il y avait des noms très connus tels qu'un certain Gamoudi (à ne pas confondre avec le champion olympique) qui était le premier à capter le croissant à l'œil nu et même en cas de brume légère ou de nuages pas trop épais cependant. Les familles veillaient tard durant cette nuit et déjà, dans la médina les boutiques restaient ouvertes et les rues éclairées par les réverbères et animées. Dans les mosquées, telles que Ezzeïtouna ou Saheb Ettabaâ, ceux qui étaient venus pour la prière du soir « Al'Icha », restaient sur place à attendre l'annonce officielle du début de Ramadan. En attendant l'ambiance ramadanesque était déjà entamée, avec les lustres de la salle de prière allumés et le minaret éclairé. L'annonce du mois de Ramadan se faisait par un coup de canon qui tonne dans la ville, ajoutant à cette ambiance de fête. La délégation se déplaçait jusqu'au palais pour en référer au Bey. Celui-ci la recevait avec sa cour au complet, dont faisait partie les dignitaires religieux. Parmi ceux-ci, il y avait les deux muftis malekite et hanefite, représentant les deux grandes écoles religieuses à savoir celle de l'Imam Malek et celle de l'Imam Abou Hanifah. Ces deux muftis prenaient acte de la régularité de la procédure du point de vue religieux, et souhaitaient tour à tour au Bey, un Ramadan joyeux et prospère, ainsi qu'à toute la Omma Islamique.