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«Notre espace résiste, mais sa situation n'est guère rassurante»!
Publié dans Le Temps le 01 - 10 - 2014

Lorsque nous sommes entrés au Palais Kheireddine, lundi dernier, l'exposition photographique « Regards posés sur les hammams de la médina de Tunis » s'y tenait encore et- d'après Mme Souad Mahbouli, directrice du site historique et culturel, continuait de drainer une foule nombreuse de visiteurs tunisiens et de touristes étrangers. La manifestation qui devait se terminer à la fin juillet a connu un tel succès que l'on a décidé sa prolongation ; et pas plus tard que vendredi dernier, c'est son Excellence l'ambassadrice de Chine en Tunisie qui a honoré l'exposition de sa visite. Cette éclatante réussite et la grande satisfaction qu'elle a suscitée parmi les organisateurs et au niveau de la direction du Palais ne doit cependant pas occulter les nombreux problèmes dont pâtit l'espace ni les difficultés rencontrées pour sa préservation et pour la continuité de son rayonnement. L'entretien que nous a accordé Mme Souad Mahbouli, sa directrice depuis l'année 2000, a porté essentiellement sur cette situation préoccupante et sur les efforts dépensés en vue de la surmonter dans les meilleures conditions :
Le Temps : Il paraît que la situation actuelle au Palais Kheireddine n'est pas très rassurante. Qu'en est-il en fait ?
Mme Souad Mahbouli : en effet, elle est inquiétante, angoissante, je dirais même alarmante. Nous déplorons de nombreuses défaillances au niveau de l'infrastructure (infiltration d'eau, humidité, dégradation de certaines ailes du site) et sur le plan des moyens mis à notre disposition pour la préservation et la restauration du Palais. La Municipalité de Tunis fait de son mieux, notre personnel également, il m'arrive aussi, en tant que directrice, de prendre en charge bien volontiers quelques frais de gestion indispensables. Mais les efforts consentis demeurent insuffisants, surtout en ce moment où tout est comme bloqué et différé pour après les élections d'octobre et de novembre. Je croise les doigts pour que les futurs dirigeants daignent porter un plus grand intérêt à la culture et aux arts, parce qu'à dire la vérité, cela n'a pas toujours été le cas sous nos cieux et plus particulièrement lorsqu'il s'agit des arts plastiques.
Le Temps : Faut-il en comprendre que la Révolution y est pour quelque chose ?
-Hélas, oui ! Au lendemain du 14 janvier 2011, nous avons connu les pires angoisses, et je n'oublierai jamais la nuit où l'on m'a appris que le Palais a été investi par un groupe de manifestants qui voulaient le saccager. En réalité, ce n'était pas notre site qui était visé par l'attaque, mais l'ancienne école israélite voisine. Toujours est-il que nous avons tous, ici, passé des moments pénibles, craignant surtout pour le Palais et les œuvres de grande valeur qui y étaient exposées. Nous célébrions alors le centenaire du regretté Aly Ben Salem. Heureusement que notre mobilisation de tous les instants a permis de sauvegarder ces tableaux, et il faut dire que c'était un challenge réussi pour nous autres qui sommes fiers et heureux de notre « victoire » ! C'en est une, effectivement, vu le relâchement sécuritaire qui prévalait dans ces temps-là, et le sentiment d'abandon que nous éprouvions face au désengagement-compréhensible, au demeurant- des responsables municipaux lesquels, en définitive, nous livraient à nous-mêmes. Mais la vraie victoire, c'est d'avoir continué à travailler en dépit de tous les écueils et de toutes les menaces. A aucun moment, le Palais n'a fermé ses portes ; nos activités se sont poursuivies presque normalement. Je regrette néanmoins de n'avoir pas pu organiser l'édition 2014 du Grand Prix de la Médina de Tunis. Il s'agit d'un concours artistique pour honorer et récompenser les plasticiens tunisiens et étrangers qui se sont illustrés dans leurs spécialités respectives. J'ai tout préparé, pourtant, mais vu le blocage actuel dont je vous ai parlé, le projet est reporté pour 2015 « inchallah ! ». Cela dit, et bien que le Palais Kheireddine réponde aux normes internationales de sécurité et de conservation des œuvres, je rêve d'un espace encore plus moderne qui soit à la hauteur des tableaux de valeur qu'il accueille. Là encore, je dis « inchallah » et j'espère qu'il ne s'agira pas seulement d'un vœu pieux !
Le Temps : Avant le 14 janvier, on en était à la finition des travaux du circuit touristique de la Médina ! Or, à voir l'état actuel d'incurie et de dégradation sévissant dans la zone, on se demande s'il est facile de travailler dans un tel environnement plutôt incommodant.
-Tout à fait ; c'est vraiment tragique. Dieu sait pourtant que lorsqu'une bonne partie des travaux du circuit touristique était achevée, je me mettais sur l'un des bancs de la place et remerciais Dieu de la beauté nouvelle conférée à la vieille cité et de la propreté ambiante. Je me disais alors : nous n'avons plus rien à envier aux nations développées. Car dans chacun de mes voyages à l'étranger, ce sont des rêves pareils que je nourrissais ; malheureusement, la Medina s'est de nouveau dégradée ces trois dernières années et cela m'est dur à supporter. Je garde quand même l'espoir que le prochain gouvernement s'empressera de remédier à cette regrettable réalité !
Le Temps : Et le programme de vos prochaines activités, est-il bloqué, lui aussi ?
-Oui, à notre grand dam hélas ! Pour le moment, l'exposition sur les hammams va se poursuivre ; mais nous recevons, après l'aïd el kébir, la visite d'une délégation d'invités allemands et ce dans le cadre du jumelage de la Médina avec la ville de Cologne. Au mois de novembre, un collectif d'artistes plasticiens exposera des toiles géantes avec des techniques diversifiées. La deuxième quinzaine du même mois verra l'organisation d'une exposition d'artistes chinois. En décembre, il y aura dans un premier temps, l'exposition des principales œuvres acquises par la Municipalité de Tunis et par le Ministère de la Culture durant l'année 2013-2014; suivie, pendant la deuxième quinzaine, de l'exposition des artistes Sana Tamzini et Nadine Lahoz Quilez, programmée dans le cadre de la visite d'un mois qu'elles rendent à notre pays.
Par ailleurs et comme je dirige en même temps la galerie Yahia, nous y prévoyons un Salon consacré aux jeunes talents (de moins de 40ans). Mais je dois dire que cette initiative louable rencontre des difficultés inhérentes aux artistes eux-mêmes qui ne s'y engagent que très timidement malgré la bonne volonté qui nous anime et les encouragements que leur prodiguent la Municipalité d'abord (l'espace est mis gratuitement à leur disposition) et certaines associations. Il y a lieu aussi de déplorer le manque de sponsorisation, facteur déterminant désormais dans la réussite de ce genre de manifestations artistiques et culturelles.
Le Temps : pour finir, quelles leçons votre longue expérience à la tête du Palais Kheïreddine et vos différentes fonctions culturelles vous ont-t-elles permis de retenir ?
-Tout d'abord, pour bien diriger un monument aussi précieux que ce Palais, il faut être passionné d'art et de culture. Il faut aussi rêver de prospérité pour ce pays en particulier dans le domaine du savoir et de la culture sans lesquels aucun essor n'est possible. Personnellement, j'ai la conscience tranquille ; je pense avoir accompli mon devoir malgré la modestie de mes contributions. Je n'ai pas pensé à ma propre promotion en ma qualité de plasticienne ; d'ailleurs jusqu'à présent, je n'ai pas encore programmé l'exposition de l'ensemble de mes toiles. J'accumule les ébauches sans avoir le temps de les achever. Mais je n'exclus pas la possibilité d'exposer mes œuvres en 2015. Inchallah !
Pour ce qui est des artistes, je tiens à leur rappeler –et surtout aux plus jeunes d'entre eux- que l'Art c'est surtout de la persévérance, de la patience et beaucoup de travail ! La Création authentique ne naît pas de rien ; certes l'art ne s'enseigne pas, et personnellement j'ai toujours soutenu la cause des artistes autodidactes, mais l'artiste véritable doit acquérir les bases de cette science insoupçonnée.
Par ailleurs, je reste persuadée que l'Art doit être un facteur de rapprochement entre les peuples et les cultures. Gare donc à l'esprit de fermeture et de rejet de l'Autre. Tout en préservant l'identité tunisienne, restons à l'écoute attentive des autres expériences entreprises autour de nous. C'est très enrichissant. Je tiens cette vérité de mon père qui m'a surtout transmis son ouverture d'esprit et son amour de la patrie. Je garde encore religieusement le livre de Bourguiba qu'il m'a offert et dans lequel le premier président de la Tunisie indépendante exaltait prioritairement les vertus du sacrifice et de l'abnégation au profit de la patrie mère et en hommage à tous les martyrs morts pour sa liberté et pour sa dignité.


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