« Méditerranée Sacrée » est le nom du concert qui a réuni les habitués de l'Octobre Musical de Carthage et les curieux sous la coupole de l'ancien édifice le lundi 20 octobre dernier. Invité par l'Institut Français de Tunis et l'Acropolium, le chœur de chambre toulousain « Les éléments » a renoué avec la Méditerranée ou plutôt a offert un tour d'horizon spatio-temporel à travers les rives méditerranéennes. Sous la direction de son créateur Joël Suhubiette, le chœur a transcendé des siècles de musiques et de chants. Dans cette transcendance, la Tunisie n'était pas en reste grâce à la chanteuse et compositrice Alia Sellami dont l'appartenance à une double culture est, à elle seule, un pont qui lie déjà les rivages du Sud à ceux du Nord. Entre chants ataviques et chants contemporains, la soirée était placée sous l'égide de la voix... Des répertoires hétéroclites ont été revisités par « les Eléments ». En araméen, latin, grec ancien, hébreu et arabe, les morceaux interprétés ont été une occasion inédite pour les férus de musique de se laisser entraîner par les voix des choristes qui ont maintenu le public en haleine deux heures durant. Sur scène ou profitant du grand espace que leur offrait la salle des concerts de la l'Acropolium, les chanteurs se sont tantôt réunis devant leurs pupitres, tantôt investi le parterre et l'étage desquels les voix ont fusé se réunissant en haute voltige pour se déverser sur la salle. Cette appropriation de l'espace a été au cœur de toutes les attentions et les convives ont été charmés par la puissance des vocalises. « Les éléments » ont varié leur répertoire en variant les tonalités s'adaptant aux exigences des morceaux interprétés. Du chant liturgique au texte d'Euripide, en passant par les mots de Halaj, le sacré et le profane se sont mêlé et dans l'espace confiné de l'ancienne cathédrale, la résonnance mystique donnait naissance à un aspect solennel et quasi religieux. Dans la deuxième partie, précisément à la fin, Alia Sellami a rejoint le chœur pour interpréter le chant maronite « Fi Leyli ». Sa prestation et sa présence ont transporté le public vers la contrée originelle de Didon. La voix chevrotante et plaintive, chaude et captivante a été vivement applaudie. Alia Sellami dont le talent est reconnu par ses pairs a allié performance vocale et performance de composition. En effet, si la première et la seconde parties du concert ont été axées sur la revisite de chants venant des XIVème, XVIème, XVIIème, XXème et même XXIème siècles, la troisième partie fut consacrée à une composition imaginée par Alia Sellami lors du festival « Dream City-2010 » s'intitulant « Mur...murs de la ville ». Une composition assez particulière, reconduite et réarrangée pour l'Octobre Musical qui fut interprétée par dix-huit voix a capella. « Méditerranée Sacrée » était une occasion pour un public venu en assez grand nombre de découvrir le premier instrument de la création dont l'homme a été doté : la voix. « Les éléments » et Allia Sellami ont démontré, au fil du concert, toutes les capacités de cette voix à louer, à exprimer ses états d'âme ou à se frayer un chemin dans les méandres de la ville. Par et grâce à la Méditerranée, c'est sa place dans l'histoire qui a été mise à l'honneur un soir d'automne sur une colline non loin de ses rives...