La restructuration ou le redressement des entreprises publiques s'avère aujourd'hui une priorité nationale absolue. Ces institutions ont cumulé des années durant un niveau de déficit exécrable estimé à 3800 MDT. Outre la corruption et le système de copinage, la mauvaise gestion des deniers publics et les carences organisationnelles sont à l'origine de leur délabrement spécifiquement économique et structurel où la plupart sont au bord de la banqueroute. D'où l'urgence de mettre en place un plan de restructuration ou de sauvetage des dites entreprises. Les entreprises publiques du secteur du transport, sont à ce titre prioritaires, à être assistés et touchées par ce grand chantier de redressement. L'objectif étant d'éviter l'effondrement ou l'écroulement de cet énorme château de cartes qui nuit aussi bien à l'Etat, au consommateur qu'à la collectivité publique. Dans ce même cadre, le ministère du Transport a présenté hier à l'occasion de la tenue du 1er forum des administrateurs des établissements et des entreprises publiques du secteur du Transport, le plan de redressement de 7 sociétés publiques de transport à savoir : la CTN, la STAM, TRANSTU, SNCFT, SNTRI, STS et la SORETRAS. Le déficit des sociétés de transport est évalué à 1400 MDT, soit 36,86% du déficit total des entreprises publiques. Un déficit énorme qui puise ses origines de facteurs endogènes et exogènes dans ses entreprises. Chiheb Ben Ahmed, ministre du Transport a affirmé que le besoin revendiqué pour le financement public de ces entreprises s'élève à 1000 MDT. « Il faut avouer que le modèle de gestion de ces entreprises de transport a montré ses limites. Le système de subvention publique contre déficit budgétaire a confirmé ses carences. Il faudra désormais entrevoir une nouvelle vision, une autre stratégie. L'Etat ne peut plus supporter cette situation accablante. Du fait, nous avons établi une stratégie ou un plan de redressement pour 7 entreprises de transport public, lequel va permettre d'assainir ces entités et assurer leur pérennité », a affirmé le ministre Un nouveau modèle de gouvernance : séparation des pouvoirs Plusieurs points d'actions ont été présentés hier par les intervenants. « Des dispositions concrètes et prêtes à mettre sur les rails pour contenir le déficit chronique de ces entreprises », ajoute le ministre. Il s'agit en premier lieu de la baisse de la contribution directe de l'Etat dans le financement de ces entreprises publiques en procédant à la création de deux fonds : un fonds de retournement et un fonds d'impact. Comme l'a précisé le ministre, ce mécanisme repose sur le partenariat public/privé et sur la contribution des SICARS et du secteur privé dans le besoin de financement des entreprises de transport. La séparation des pouvoirs de gestion et de contrôle La mise en place d'un nouveau modèle de gestion ou de gouvernance s'inscrit dans le fin fond du plan de redressement des entités sus-indiquées. Il s'agit d'instaurer les bases de la bonne gouvernance à savoir : dissocier le pouvoir de gestion du pouvoir de contrôle. Entre autres séparer entre le conseil d'administration et la direction générale. Par ailleurs, le plan de redressement prend en compte également la révision à la hausse des tarifs de transport, la révision des indicateurs ou de l'échelle de recrutement et la nomination de gestionnaires qualifiés et indépendants. Vers la création d'une académie tuniso-allemande de la bonne gouvernance « L'instauration du système de contrats / objectifs, s'inscrit dans le cadre du nouveau programme de gouvernance outre la mise en place d'un comité d'audit et de contrôle, l'instauration de la culture de travail et la culture d'entreprise et la promotion du dialogue social », font partie de la nouvelle approche de gouvernance à initier par les entreprises publiques, comme l'a affirmé Anouar Ben Khlifa , Secrétaire d'Etat auprès du Chef du gouvernement, chargé de la gouvernance et de la fonction publique. M. Ben Khlifa a annoncé par ailleurs la création d'une académie tuniso-allemande pour la bonne gouvernance et la mise en place en partenariat avec l'INNORPI d'une certification de bonne gouvernance des entreprises publiques. Pour sa part, Moez Mkaddem, Chef de Cabinet du ministère du Transport, a affirmé l'impératif d'amender le cadre légal régissant le secteur entre autres la loi 89 et les décrets 97 et 98. Des textes de lois caduques et qui ne sont plus de mise. « La bonne gouvernance devient un principe constitutionnel et ce conformément à l'article 15 de la nouvelle constitution », assure M.Mkaddem qui met l'accent sur le rôle de contrôle et de l'audit interne et externe dans les entreprises publiques, un rôle et une fonction totalement marginalisés. « L'Etat assume sa part de responsabilité dans la situation chaotique connue par les entreprises publiques de transport. On se limite au contrôle de compromis sans pour autant contrôler et coordonner la gestion du portefeuille d'actions de l'Etat dans les institutions publiques...Il faut responsabiliser le gestionnaire, renforcer le rôle de contrôle de l'Etat sans pour autant intervenir dans la gestion courante des entreprises », ajoute le Chef Cabinet du ministre du Transport. La mise à niveau du secteur du transport en général et du transport en commun en particulier repose dès lors sur la rupture avec l'ancien modèle de gestion, lequel correspond à l'intervention de l'Etat pour injecter de la liquidité, effacer l'ardoise salée et assainir les entreprises publiques. Un cercle vicieux qui se répète, cumulant déficits sur déficits pour aboutir enfin de compte à la situation actuelle, engendrant l'asphyxie des entités publiques et par la même le déficit budgétaire qui resserre de plus en plus l'étau autour des finances publiques. Bref, un château de cartes qui risque de s'effondrer à tout moment.