Au moins deux hommes armés ont attaqué à l'arme automatique le siège du journal satirique Charlie Hebdo, au 10, rue Nicolas-Appert, dans le 11e arrondissement de Paris, en fin de matinée. Parmi les douze victimes, les dessinateurs Charb, Cabu, Wolinski et Tignous, et deux policiers, selon une source judiciaire contactée par Le Monde. Il s'agit d'ores et déjà de l'attentat le plus meurtrier en France depuis celui du boulevard du Temple en 1835. Au moins deux hommes cagoulés et vêtus de noir se sont introduits vers 11 h 30 dans les locaux de Charlie Hebdo, situés près du métro Richard-Lenoir. Munis de kalachnikovs, ils ont commencé à tirer sur les dessinateurs et journalistes réunis en nombre pour leur conférence de rédaction hebdomadaire. Au total, douze personnes ont été tuées lors de l'attaque, dont deux policiers, a indiqué le parquet de Paris en début d'après-midi. Une vingtaine de personnes ont également été blessées, dont quatre grièvement. Le ministre de l'intérieur a évoqué devant la presse « trois criminels ». « Les attaquants étaient renseignés et savaient qu'il y avait, hier à 10 heures, la réunion de rédaction hebdomadaire. Sinon, le reste de la semaine, il n'y pas grand monde dans les locaux », explique une journaliste de Charlie Hebdo jointe par Le Monde, qui n'était pas sur place pendant l'attaque. Sur le site de L'Humanité, la dessinatrice Coco, qui a vu les deux hommes de près, raconte : « J'étais allée chercher ma fille à la garderie, en arrivant devant la porte de l'immeuble du journal deux hommes cagoulés et armés nous ont brutalement menacées. Ils voulaient entrer, monter. J'ai tapé le code. Ils ont tiré sur Wolinski, Cabu... Ça a duré cinq minutes... Je m'étais réfugiée sous un bureau... Ils parlaient parfaitement le français... Se revendiquaient d'Al-Qaida. » Selon nos informations, les assaillants se sont trouvés, sur place, face à un policier du service de protection des hautes personnalités, chargé de la protection de Charb. Il a été tué sur le coup. Une vidéo prise par un journaliste de l'agence Premières Lignes montre que les assaillants ont crié « Allah Akbar » (« Dieu est grand ») au moment de commencer à tirer. Selon des témoins cités par des policiers, les agresseurs ont également crié : « Nous avons vengé le prophète. » Dans leur fuite, les hommes ont visé une voiture de police. Les assaillants ont fait feu, les policiers ont répliqué puis reculé. Selon i-Télé, les assaillants auraient ensuite pris la fuite à bord d'une voiture noire et seraient passés par la place du Colonel-Fabien, en direction de la porte de Pantin, où leur voiture a été retrouvée. Là, ils ont changé de véhicule. Ils sont actuellement en fuite et activement recherchés par la police. Ni leur identité ni leur éventuel lien avec une organisation ne sont connus pour le moment. Une source policière explique au Monde que « de très gros moyens sont mis en œuvre. On s'installe pour tenir dans la durée. Sont mobilisés les services de la DCPJ [direction centrale de la police judiciaire], de la PJPP [police judiciaire de la préfecture de police] et de la DGSI [direction générale de la sécurité intérieure]. Au total, près de 3 000 policiers sont actuellement mobilisés.» Devant les journalistes, François Hollande, qui s'est rendu sur place, a dénoncé « une exceptionnelle barbarie » visant un journal, « c'est-à-dire l'expression de la liberté ». « La France est aujourd'hui devant un choc, devant un attentat terroriste, ça ne fait pas de doute », a-t-il asséné. « Dans ces moments-là, il faut faire bloc. » M. Selon le rédacteur en chef, Gérard Biard, actuellement à Londres et joint par Le Monde, « les menaces étaient ressenties de façon moins forte ces derniers temps à Charlie Hebdo. L'attaque est d'autant plus choquante. » Une journaliste de Charlie Hebdo, qui n'était pas sur place mais est en contact avec des collègues sur place, explique que « ces derniers mois, on ne sentait pas une inquiétude immense malgré les menaces ».