A l'occasion de sa sortie publique, une projection de presse du documentaire « El Gort » ou (Jmal El Barrouta) du réalisateur Hamza Ouni a été organisée, mardi dernier au cinéma Le Colisée. Le film sort dans les salles : le Colisée Tunis, Amilcar El Manar , Ciné Mad'Art Carthage, L'Agora La Marsa et Le Palace Sousse. D'une durée de 87 minutes, « El Gort » a été présenté pour la première fois au Doc à Tunis puis aux dernières Journées Cinématographiques de Carthage où il a obtenu le Tanit de Bronze des films documentaires. Il avait créé une polémique en raison de sa censure à Médenine. Le directeur du Centre culturel a refusé de projeter le film à cause des dialogues qui comportent des mots vulgaires et grossiers. Road movie social « El Gort », réalisé durant six ans, est un road movie social qui suit l'itinéraire de deux jeunes hommes de la région de M'hamdia, située dans les faubourgs de Tunis, qui travaillent dans le commerce du foin. Le réalisateur impliqué lui-même dans l'histoire traque leur parcours du matin au soir, à travers plusieurs recoins du pays. Le métier du ramassage du foin et de sa livraison est ardu. Il nécessite une certaine robustesse et un moral d'acier. Les deux personnages du film n'ont pas choisi cette profession par plaisir mais plutôt par nécessité. Ne trouvant pas d'autres boulots et n'ayant pas réussi à quitter clandestinement le pays, ils se sont retrouvés dans une situation de chômage qui les a obligée à accepter n'importe quel travail. D'ailleurs, ils s'en plaignent tout au long du film de la dureté du travail et de leur vie sans horizon. Ils se contentent de vivre au jour le jour sans perspective de construire une famille ou de réaliser d'autres ambitions. Après une dure journée de travail, leur seule distraction consiste à aller se saouler dans le coin d'une rue en importunant les passants et notamment les jeunes filles. Une histoire personnelle Hamza Ouni part d'une histoire personnelle, celle qu'a vécue son père et tente de rendre compte de cela à travers ce documentaire d'où son engagement et son implication à fond dans l'histoire. Il cherche à refaire le chemin qu'a fait son père et qu'aujourd'hui continue à le faire d'autres personnes. Il est question de gens cassés dont la vie est brisée par la routine quotidienne. Même la révolution n'a pas changé leur vie. Au contraire, elle n'a fait qu'empirer leur situation. Les politiques sont mis en dérision. On se moque d'eux parce qu'ils sont incapables de trouver des solutions aux problèmes des jeunes. A l'image du foin emporté par le vent, le réalisateur tente de dépoussiérer la situation difficile de cette catégorie de gens pour permettre aux spectateurs de voir plus clair de ce qui peut déranger les consciences des gens bien lotis. C'est donc cette face cachée d'une Tunisie des profondeurs qui est, ici, mise en lumière avec une caméra proche des personnages perchés sur le tas du fourrage amassé sur l'arrière du camion livrés à la chaleur étouffante de l'été ou au froid rude de l'hiver. Le film a valeur de document sur une réalité sociale qui donne à réfléchir.