«Que toute la terre s'arrête de tourner Une minute de silence Pour ceux qui sont morts Sur leurs fronts Scintille l'aura des glorieux Qui éclaire le chemin» Samih Al- Qacem Les deuils se succèdent, la liste s'allonge et cette commémoration acquiert un sens pour des générations qui pensaient que l'avenir serait serein. Il est des moments qui s'inscrivent dans l'Histoire des peuples à jamais, porteurs de douleur et d'espérance. Ce 9 Avril 1938, journée de soulèvement populaire, de revendications, de colère et de contestation qui a vu une manifestation dégénérer en effusion de sang nous revient chargé de tous les deuils présents et récents. L'Histoire opère souvent des retours inattendus, des cycles qui prouvent qu'elle n'est jamais écrite définitivement et que l'hier rejaillit avec force, lorsque le présent le rappelle. Ainsi, chaque génération doit-elle porter son propre fardeau, traverser son chemin de croix pour mériter de vivre et d'exister. Le 9 Avril, plus que les autres fêtes nationales nous replonge dans un passé de luttes et nous apprend que rien n'est jamais acquis, que les revirements sont possibles et que l'avenir est à enfanter chaque jour. Plus que jamais, cette date nous met face à la responsabilité historique qu'est la nôtre, celle de ne jamais oublier que les luttes sont permanentes et que les acquis sont fragiles quand l'ennemi porte le masque de la traitrise et de la lâcheté et que la cohésion sociale et l'union des forces sont vitales pour survivre. Comme la course du temps, la saison du combat n'est jamais finie, ni celle des sacrifices. Le tribut à payer pour la liberté, la dignité et le droit à la vie est lourd, les pertes s'ajoutent les unes aux autres comme pour nous rappeler que le temps n'est pas encore à la victoire, au triomphalisme béat et aux certitudes illusoires, car les barbares se cachent, prêts à bondir sur les proies. Le nombre des martyrs grimpe dans cette guerre ardue et âpre contre un ennemi intraitable armé de convictions dogmatiques et du glaive de l'intolérance. A chaque attentat, la douleur est plus vivace et le désarroi plus étouffant. Le découragement menace de gagner contre l'enthousiasme et le désir de se battre. Prompts à faire le bilan des défaites, nous oublions que les « loups» sont dans la bergerie, scrutant notre réaction, attendant que le défaitisme s'empare de nous. Croire que parce que nous sommes sortis pour condamner le terrorisme, les assassins ont déserté la cité, serait une illusion, une manipulation. Ce n'est que le début d'une longue lutte contre un ennemi féroce et cruel qui nous surprendra encore car telle est sa stratégie: nous anesthésier pour mieux nous terroriser, nous pousser à capituler et lui abandonner le terrain. Cette guerre est à mener par tous car elle consiste à traquer le terrorisme là où il est tapi, c'est-à-dire partout, autour de nous, là où il fait semblant de sommeiller pour nous surprendre. La vigilance est un devoir. La réflexion est notre arme. La pensée est l'antidote à ce fléau qui avance, grimé. Surtout ne pas croire que le récent acte terroriste serait le dernier. Surtout ne pas croire que nous serions immunisés contre ce fléau. Mais, penser à une stratégie de lutte, efficace et réaliste. Demeurer debout, unis et rassemblés est un rempart contre la barbarie.