Chez l'ancien directeur général d'une filiale florissante du géant français Total qu'est Mehdi Jomâa, la (re)conquête du pouvoir ne s'improvise pas. Elle se prépare minutieusement tel un business-plan, avec des objectifs corrélés à des échéances et des stratégies pour les atteindre. Selon ses proches collaborateurs, l'ex-Chef du gouvernement de technocrates (janvier 2014-janvier 2015) va officiellement annoncer en septembre prochain la création d'un centre d'études stratégiques qui aura pour mission d'engager des réflexions stratégiques sur l'avenir de la Tunisie à moyen et à long termes. L'ancien locataire du palais de la Kasbah a invité dans ce cadre la majorité de ses anciens ministres et collaborateurs à participer à ce laboratoire d'idées qui se penchera sur l'élaboration d'études prospectives et stratégiques dans les domaines du développement économique et social. Il s'agirait, entre autres, de Kamel Ben Nasser, Nidhal Ouerfelli, Taoufik Jelassi, Fethi Jarray, Neila Chaâbane et Mohaemd Salah Ben Ammar. Le think tank sera par ailleurs ouvert aux experts, intellectuels et universitaires à condition qu'ils ne soient pas déjà engagés dans des partis politiques. D'après les observateurs, le centre d'études pourrait servir à Mehdi Jomâa de tremplin pour briguer la magistrature suprême lors de la prochaine présidentielle de 2019, dans la mesure où il permettra à l'ingénieur en mécanique d'élaborer un programme politique séduisant et surtout de rester sous les feux de la rampe médiatique. Grisé par les sondages d'opinion qui le placent régulièrement en bonne position parmi les personnalités politiques les plus respectées par les Tunisiens, l'ancien Premier ministre qui s'est reconverti dans le consulting n'a d'ailleurs jamais exclu plus son retour sur l'arène politique Dans un entretien publié le 3 juillet par le magazine «Harvard Political Review», il avait déclaré qu'il pourrait e créer un parti et même jouer un rôle de premier plan dans un avenir proche. «Dans l'immédiat, je vais d'abord récupérer et reprendre une vie civile, normale. A l'avenir, cela dépendra du fait si le pays a besoin de moi et de mon équipe. Si c'est le cas, nous servirons dans n'importe quelle position, qu'elle soit politique ou pas», a-t-il déclaré en réponse à une question sur son éventuel retour sur la scène politique nationale. Et d'ajouter : «Je ne compte pas créer un parti politique actuellement, et on verra pour l'avenir. Je ne peux pas vraiment prédire». Outre la création d'un think tank, plusieurs atouts prédisposent Mehdi Jomâa à un destin national Ce natif de Bekalta (gouvernorat de Mahdia) qui a été désigné fin 2013 Premier ministre au terme de cinquante jours de tractations entre les différents partis politiques dans le cadre du Dialogue national parrainé par les quatre plus grandes organisations nationales (UGTT, UTICA, LTDH, Ordre des avocats) s'affiche souvent lors des cérémonies et autres réceptions organisés par les ambassades des Etats-Unis, de France, et d'Allemagne à l'occasion des fêtes nationales. C'est dire que l'homme bénéficierait de l'appui de puissants certains lobbies de décideurs en Occident. Lors du dialogue national, M. Jomâa avait été soutenu aussi bien par des partis progressistes comme Nidaâ Tounes et le Forum démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL) que par des formations conservatrices, dont le mouvement Ennahdha. C'est dire qu'il pourrait puiser le réservoir électoral des de ces deux camps en cas d'une éventuelle candidature à la prochaine présidentielle. Et last but not least, Mehdi Jomâa a été adoubé par l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) et les principaux bailleurs de fonds multilatéraux comme le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, au regard de sa proximité du milieu des affaires et de ses orientations ouvertement libérales.