«Si l'instance décide que la loi de finances 2016 est inconstitutionnelle, ce texte sera transmis l'Assemblée des Représentants du Peuple pour une seconde lecture, mais tout ce processus doit être achevé avant le 31 décembre 2015», précise le constitutionnaliste Kaïs Saïed Trente et un députés de l'opposition ont officiellement présenté un recours contre dix articles de la loi de finances 2016 adoptée le 10 décembre par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) auprès de l'Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi. Ce recours déposé au secrétariat général de l'instance dans l'après-midi du mardi 15 décembre concerne les articles 46, 47, 59, 60, 61, 64, 74, 75, 82, 85. Le recours a été déposé dans les délais légaux, soit cinq jours à compter de la journée de l'adoption de la loi en question (jeudi 10 décembre). Il contient, conformément à la loi, le texte de requête, ainsi que l'identité des 31 députés requérants et leurs signatures. Selon le spécialiste du droit constitutionnel Kaïs Saïed, l'Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi dispose désormais d'un délai de 10 jours, qui pourrait être prolongé de 7 jours en cas de nécessité, pour rendre son verdict (validation ou rejet du recours de l'opposition). «Si l'Instance décide que la loi de finances 2016 est inconstitutionnelle, ce texte sera transmis au président de la République qui le transmet à son tour à l'Assemblée des représentants du peuple pour une seconde lecture, conformément à la décision de l'Instance. Il incombe au président de la République avant la promulgation de le retransmettre à l'Instance pour un contrôle de constitutionnalité», souligne M. Saïed. Et d'ajouter : «Tout ce processus doit être accompli de manière à ce que les délais légaux relatifs à la promulgation de la loi de finances 2016, soit avant le 31 décembre 2015, soient respectés». Faible probabilité de dépassement des délais légaux M. Saïed note, d'autre part, qu'en cas de dépassement des délais légaux relatifs à la promulgation de la loi de finances 2016, la loi de finances sera promulguée par tranches de trois mois chacune via des décrets-lois. Il juge cependant cette probabilité très faible. La loi de finances 2016 avait été adoptée dans son intégralité lors de la plénière tenue le 10 décembre 2015 à l'ARP par 142 voix pour, 7 abstentions et 0 voix contre. Les articles contestés par l'opposition portent notamment sur des mesures fiscales et des avantages accordés à certaines catégories d'entreprises publiques et d'administrations. Il s'agit notamment des articles instituant amnistie sur les infractions fiscales et de change dans le texte de la loi de finances 2016, qui a été jugé par l'opposition comme étant une «manœuvre et un moyen détourné » pour faire passer le projet de loi sur la réconciliation économique, qui avait suscité une grande polémique quand il a été dévoilé à l'opinion publique. Selon l'opposition, la loi de finances blanchit ainsi les Tunisiens coupables de crimes de change et porte portera atteinte aux principes de transparence, d'égalité devant la loi, de bonne gouvernance et de justice transitionnelle.