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« Il ne faut plus parler de jardins d'enfants coraniques parce qu'ils n'existent pas »
Publié dans Le Temps le 27 - 03 - 2016

La violence conjugale est un sujet qui dérange énormément. Pour nous, la vraie bataille est celle des mentalités
Le phénomène du travail des jeunes filles mineures comme aides ménagères, est dû à l'abandon scolaire et aux conditions financières de la famille
Concernant le niqab, je dirai que tout ce qui peut porter atteinte à la société doit inévitablement être contrôlé
Quand on sait que plus de cent mille élèves abandonnent les écoles, cela devient une priorité absolue
Sachant que le taux de chômage est très élevé du côté des femmes diplômées, j'ai décidé d'en faire mon combat
Le ministère de la Femme, de la Famille et de l'Enfance a fait l'objet de quelques sévères critiques au cours de ces derniers mois. Le déclencheur de ces campagnes était une déclaration de la part de la ministre qui avait assuré que son ministère mènera une grande campagne pour fermer tous les jardins d'enfants clandestins.
Suite à cette annonce, la ministre avait été accusée de vouloir fermer les portes de tous les jardins d'enfants coraniques. L'autre polémique que s'apprête à affronter Samira Maraï est relative au projet de loi intégrale contre la violence faite aux femmes ; même si ce texte n'a pas encore été présenté à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), nous savons, d'ores et déjà, qu'il sera pointé du doigt par quelques-uns. Au cours de cette entrevue, nous sommes revenus avec la ministre sur les principaux dossiers sur lesquels travaille le ministère.
-Le Temps : Comment avez-vous retrouvé le ministère à votre nomination ?
Samira Maraï : Je connais très bien le ministère puisque, du temps où j'étais député à l'Assemblée nationale constituante et membre de son bureau, je travaillais souvent avec les cadres du ministre. Avec madame Naïla Chaâbane – l'ancienne secrétaire d'Etat chargée de la Femme, de la Famille et de l'Enfance – on avait eu plusieurs occasions de discuter des affaires du ministère lors de différentes manifestations.
Pour revenir à votre question, il faudrait que je vous parle du rapport d'audit établi en 2014 et qui nous a été rendu au cours du mois d'avril 2015. Grâce à ce rapport, j'ai eu une idée globale sur l'état des lieux du ministère : un taux d'encadrement très faible, par rapport aux autres ministères, atteignant les 4,8%. C'est le taux d'encadrement le plus faible de tous les ministères.
J'avais donc un nombre réduit en matière de cadres et élevé en matière d'ouvriers. De plus, le ministère ne possède pas de directions régionales, les quelques commissariats relatifs au ministère ont été mis en place en 2013 et encore, ces commissariats ont recruté des personnes non qualifiées !
Le personnel non qualifié a été, d'ailleurs, l'un des principaux problèmes sur lesquels j'ai travaillé lors des premières semaines. Tout en essayant de renforcer l'effectif, j'ai aussi changé de méthode de travail. Grâce à ma formation médicale, je dispose d'un esprit de travail en équipe assez prononcée qui m'a permis de booster mon équipe ici au ministère.
A la fin du mois de févier, nous avons organisé un séminaire regroupant tous les départements du ministère pour mettre en place une vision globale pour nos futures missions. Ce séminaire nous a aussi permis de clarifier les valeurs que le ministère véhiculera au cours de ces cinq prochaines années. Nous avons pu, aussi, identifier les grands axes stratégiques pour chaque département.
J'ai aussi focalisé sur les textes juridiques, pour qu'ils aient de l'avance au niveau de la législation et j'ai tenu à faire de l'axe de la femme et de l'économie un aspect principal des objectifs du ministère. On travaille sur la création d'un nouveau département dédié au développement de l'entreprenariat féminin. J'ai travaillé à l'échelle parlementaire de l'Union pour la Méditerranée, ce qui m'a permis de travailler sur ledit entreprenariat féminin.
Sachant que le taux de chômage est très élevé du côté des femmes diplômées, j'ai décidé d'en faire mon combat. Pour l'Enfance, on a décidé de travailler sur la petite enfance. Il existe des études très intéressantes qui nous donnent une idée claire de la situation. Seuls 38% des enfants ont accès aux jardins d'enfants. Un chiffre alarmant qui explique un peu la raison derrière la propagation des espaces clandestins.
Par ailleurs, nous nous sommes aussi penchés sur la question de la protection des enfants. Pour le département de la Famille, la question a été un peu délicate puisque nous disposons de très peu d'études relatives à ce volet.
J'ai annoncé mon intention de mettre en place une politique claire pour le ministère afin que les cinq années soient exploitées à bon escient et pour qu'aucun axe ne soit mis de côté ou négligé.
-Plus d'un an après votre prise de fonctions, quel bilan avez-vous à nous présenter?
Nous avons travaillé sur la très délicate question de l'abandon scolaire ; quand l'on sait que plus de cent mille élèves abandonnent les écoles, cela devient une priorité absolue. Actuellement, nous sommes en train de travailler, surtout, sur les textes juridiques. Car il ne faut pas oublier que l'Histoire retient les textes juridiques et non pas les petites campagnes de sensibilisation. Je vais, peut-être, vous surprendre mais depuis 1993, ce ministère n'a effectué aucune initiative législative. Rien n'a été fait depuis vingt-trois ans !
Après avoir tiré au clair nos prochaines missions, nous nous sommes organisés afin de collaborer, efficacement, avec la société civile. J'ai organisé plusieurs réunions avec les différentes composantes de la société civile et j'en suis arrivée à un constat assez alarmant ; le ministère n'a mis en place presqu'une convention qui puisse faciliter les collaborations.
Les budgets des parrainages étaient fixés selon des plans flous et indéterminés. J'ai tout arrêté et j'ai fixé un plan d'action bien précis pour lancer, par la suite, des appels à la candidature. Par exemple, et en ce qui concerne les centres de protection de l'enfance – dont la mise en place a été citée dans les priorités des cent premiers jours – en les a aménageant, j'ai lancé un appel à candidature, avec l'accord du chef du gouvernement, pour que cela soit pris par des associations selon un cahier de charges bien déterminés. Je dois avouer que mon travail de député à l'ANC m'a beaucoup servie au niveau du ministère. J'étais chargée des législations ce qui m'a doublement aidée dans mes nouvelles fonctions.
-Où en êtes-vous avec le projet de loi intégrale contre la violence faites aux femmes ?
J'ai trouvé une commission intra-ministérielle qui ne faisait que bloquer ce projet de loi. J'ai tout arrêté et on a changé de méthode de travail : nous avons commencé par mettre en place un comité de pilotage qui se réunissait chaque semaine pour mettre à jour le texte. Par la suite, on a mis en place une commission chargée de suivre le projet de l'entreprenariat féminin. En collaboration avec un cadre du ministère des Finances, on a travaillé sur toutes les formes de violences dont sont victimes les femmes. Mon objectif c'est de former des experts au sein même du ministère pour ne plus avoir besoin de recourir à des experts externes.
En ce qui concerne les centres dédiés à l'enfant, et afin que cela ne prenne pas beaucoup de temps, j'ai initié une convention avec la BIAT qui a aménagé quatre terrains de sport à Gabes.
-Est-ce que le texte a été présenté aux députés ou au Conseil ministériel ?
J'ai, dans un premier temps, fixé la date du 8 mars pour le dépôt du texte. Le projet de loi est prêt mais, et après de longues consultations avec des experts nationaux et internationaux, on a fini par décider de mettre en place un plaidoyer complet pour booster le texte.
Une grande mobilisation de la société civile nous a beaucoup aidés sur la question. Nous sommes en train d'étudier les différentes offres pour choisir une boîte de communication pour qu'elle nous aide à faire la promotion de ce texte afin qu'il ait toutes les chances de son côté. On va commencer avec les journalistes, on va leur présenter le contenu de tout le projet et pour en faire la promotion et faire passer le message. C'est un projet de loi qui concerne une grande majorité des femmes tunisiennes et 80% sont pour cette loi contre 5% de citoyens qui s'y opposent catégoriquement.
-Est-ce que vous collaborez avec le ministère de l'Education nationale qui travaille sur ces mêmes axes ?
Bien évidemment. Au début, le ministère de la Femme, de la Famille et de l'Enfance a signé une convention avec le minisètre de la Culture et celui de l'Education nationale. Grâce à cette convention, nous avons réussi à aménager plusieurs centres dédiés à l'enfant à Jendouba et à Kairouan. Quand j'ai vu que le ministre de l'Education nationale, Néji Jalloul, en a fait un axe principal, je me suis dit qu'il serait stratégique de le laisser s'en charger. J'ai toujours pensé que les ministères doivent être complémentaires.
Toujours en collaboration avec le ministère de l'Education nationale, nous sommes en train de travailler sur la question de l'abandon scolaire. Nous nous occupons de la prise en charge de ces enfants qui n'ont aucune alternative. On s'est engagé à former les inspecteurs avec des cycles de formation cycliques qu'on tient dans la ville de Hammamet. Actuellement, nous sommes en train d'équiper plus d'une quinzaine de clubs d'enfants se trouvant dans des quartiers populaires. On a commandé des clubs ambulants qui seront bien aménagés pour recevoir le maximum d'enfants et pour les atteindre là où ils se trouvent.
-Nous restons sur l'axe de l'enfance en abordant une question assez sensible qui est celle du travail des mineurs. On sait tous que beaucoup de jeunes filles sont employées comme des aides ménagères dans les grandes villes. Avez-vous des chiffres et des programmes sur ce phénomène ?
Il n'existe pas de chiffres précis sur ce sujet. Actuellement, nous travaillons dessus et nous sommes à l'étape de l'identification ; les principales causes de ce phénomène sont l'abandon scolaire et les conditions financières de la famille.
Généralement, les mères partent travailler aux champs et les filles sont envoyées dans les grandes villes. Nous avons choisi de viser la source du problème qui est donc la condition de la femme rurale. L'idée est de rendre la formation professionnelle obligatoire pour éviter l'abandon scolaire, une idée qui a déjà été discutée au sein du gouvernement.
Avec cette obligation, nous espérons éviter le travail des mineurs. Au sein de la loi intégrale de la lutte contre les violences faites aux femmes, nous nous sommes concentrés sur les violences et les discriminations économiques. Nous avons pénalisé cette violence et, donc, le père qui envoie sa fille travailler alors qu'elle est encore mineure risque la prison.
-Vous avez été sujette d'une importante campagne de dénigrement à cause de vos déclarations relatives à la fermeture de toutes les écoles clandestines. Avez-vous fini par abandonner cette idée ?
J'aimerais expliquer quelque chose une fois pour toutes : nous visons tous les jardins d'enfants clandestins qui ne répondent à aucun cahier de charges. Ces jardins d'enfants n'ont pas déposé de demande d'autorisation, ils travaillent en clandestinité. Il ne faut plus parler de jardins d'enfants coraniques parce que cela n'existe pas. Il y a les Kottab au sein même des jardins d'enfants. Dans les jardins d'enfants, on apprend aux enfants le Coran. De ce fait, je considère que le concept de jardins d'enfants coraniques n'existe nullement. On ne parle pas la même langue, je ne comprends pas cette fixation qu'emploient certains pour entretenir cette polémique.
-Pouvez-vous nous donner quelques avant-premières de cette loi ?
Je peux vous remettre tout le texte ! Vous savez, il existe des personnes qui refusent le concept même de la violence conjugale, c'est un sujet qui dérange énormément. Pour nous, la vraie bataille est celle des mentalités. C'est une loi qui porte sur trois axes ; la prévention, la protection et la pénalisation.
-Avez-vous prévu des articles qui concernent le viol dans l'absolu et le viol conjugal en particulier ?
Le viol est représenté dans ce projet dans toutes ses formes. Ce projet de loi a été élaboré par des magistrats, des avocats et des experts. En se basant sur la loi comparée, nous nous sommes surtout inspirés de la loi française. Le concept de la femme victime est aujourd'hui représenté, chose qui n'existait pas avant.
-Le bloc d'Al Horra est en train de préparer un projet de loi contre le port du niqab dans les endroits publics et Afek Tounes semble le soutenir. Qu'en est-il pour vous ?
Je ne peux pas donner l'avis du ministère puisque le gouvernement ne s'est pas penché sur la question. Par contre, et en tant que femme politique appartenant à Afek Tounes, je considère que tout ce qui peut porter atteinte à la société doit inévitablement être contrôlé.
-Certains assurent que vous avez été lâchée par votre parti quand vous avez été sujette de campagne de dénigrement. Qu'en pensez-vous ?
Non pas du tout ! Au contraire, j'ai été soutenue au sein du parti. Je défends le projet sociétal d'Afek Tounes et de tous les démocrates tunisiens. On a travaillé sur cela pendant trois ans et on a défendu et on continue à défendre le projet sociétal tunisien.
C'est pour cela que je dis que ce n'est pas un projet défendu par un seul parti ou un seul ministre. J'ai bénéficié du soutien de tous mes collègues au sein d'Afek Tounes contrairement à ce que certains affirment. On ne voulait pas, tout simplement, rendre le sujet propre à Afek Tounes d'où le manque de déclarations sur cette ‘polémique'.
-Vous faites partie d'un gouvernement issu de quatre partis politiques. Que pouvez-vous nous dire sur le travail de la Coordination des partis au pouvoir qui manque, en apparence, de beaucoup d'harmonie ? Trouvez-vous que cela s'est accentué lors de l'attaque de Ben Guerdane ?
Bien au contraire, avec ce qui s'est passé dans la ville de Ben Guerdane, tous les Tunisiens se réunissent autour de la Patrie. Les partis de la coalition au pouvoir étaient en parfaite harmonie, très motivés et bien fiers de l'élan de citoyenneté des habitants de la ville.


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