Dans la deuxième partie de ses révélations pour le journal Echorouk, dans son édition du 9 mars, M. Ridha Grira donne plus de détails sur les événements qui ont suivi le départ précipité de Ben Ali et plus précisément tout ce que s'est passé au palais présidentiel, au ministère de l'Intérieur et à l'aéroport de L'Aouina où un incident dramatique aurait pu avoir lieu lors de la tentative d'évasion de certains membres de la famille Trabelsi, famille par alliance du Président déchu. L'ex-ministre de la Défense affirme qu'il était informé par ses officiers présents à l'aéroport, que l'avion présidentiel avait sur son plan de vol l'île de Djerba comme destination mais l'avion présidentiel a quitté l'espace aérien tunisien pour entrer dans l'espace libyen. Ainsi, l'histoire de deux avions militaires qui ont escorté l'avion du Président déchu n'est que pure rumeur. Echange de coups de feu à l'aéroport ? Quand M. Ridha Grira a donné l'ordre d'arrêter Ali Seriati et de confisquer son arme et son téléphone portable, un officier a évoqué l'éventualité d'un affrontement armé entre les forces militaires et des agents de la police lors de l'arrestation des membres de la famille Trabelsi présents à l'aéroport. Invitation au palais de Carthage L'ex-ministre de la Défense affirme aussi qu'il a essayé de contacter l'ex-Premier ministre M. Mohamed Ghannouchi dans son bureau avant de l'appeler sur son portable. Lors de cette conversation, l'ex-Premier ministre l'avait informé qu'il se trouvait à l'entrée du palais de Carthage. « Avec un ton énervé, je lui ai demandé les raisons de sa présence là-bas en criant : n'entre pas au palais... La situation est dangereuse et je ne peux répondre de ce qui peut arriver même après les précautions prises... je te conseille de ne pas prendre de risques en entrant au palais ; mais, M. Mohamed Ghannouchi m'a répondu avec une voix grave et perturbée qu'il était déjà entré» a-t-il affirmé. Dans une déclaration de M. Mohamed Ghannouchi aux journalistes, l'ex-Premier ministre a été appelé à deux reprises le 14 janvier par la police présidentielle pour se rendre au palais de Carthage... La même invitation a été communiquée à M. Foued Mbazaa (Président de la Chambre des députés), à M. Abdallah Kallel (Président de la Chambre des conseillers) et au général Rachid Ammar. M. Ridha Grira affirme que ces personnes ont tous pris le chemin du palais sauf le général Ammar. Qu'aurait-il pu arriver ? En effet, et pour ne pas précipiter le déroulement des enquêtes, l'ex-ministre de la Défense a refusé de fournir de plus amples détails sur le probable complot orchestré par Ali Seryati contre ces personnes invitées au palais ou l'éventualité d'une autre conspiration qui dépasse même les plans de Seryati. Concernant l'appel téléphonique avec M. Mohamed Ghannouchi, M. Ridha Grira ajoute : « je l' ai prié de ne pas fermer son portable et de rester en contact au moins une fois chaque minute. Je l'ai même prévenu que des engins militaires allaient forcer l'enceinte du palais au cas où il ne répondait pas à mes appels » Et effectivement, tout s'est passé calmement jusqu'au moment de son apparition à la télé accompagné de M. Foued Mbazaa et de M. Abdallah Kallel pour annoncer qu'il remplaçait temporairement le Président selon l'Article 56 de la constitution. Une réunion jusqu'à l'aube du 15 janvier Après le départ de MM. Ghannouchi, Mbazaa et Kallel du palais présidentiel, il a été convenu de tenir une réunion en présence des cinq membres du Conseil des armées ainsi que de l'ex-Premier ministre et de l'ex-ministre de l'Intérieur, M. Ahmed Friaa, et d'autres hauts responsables de son ministère. La réunion a duré jusqu'à 3h du matin du 15 janvier 2011 et nous avons fini par prendre la décision de passer à l'article 57 de la Constitution après avoir eu la certitude que le départ du Président Ben Ali était définitif. Concernant les rumeurs qui accusaient l'armée de planifier un coup d'Etat, l'ex-ministre de la Défense a démenti cette accusation en rappelant comment l'armée avait refusé d'accepter le dépôt des armes des agents de police de peur que l'armée ne soit accusée de confiscation des armes et de complot contre l'Etat. M. Ridha Grira a également rejeté l'histoire qui prétend que le général Ammar s'est déplacé au palais présidentiel pour expulser en personne l'ex-président Ben Ali tout en confirmant que l'armée respecte le principe qui restreint la gouvernance aux personnes civiles. D'ailleurs, M. Ridha Grira a salué la bonne coopération entre les forces de l'armée et le ministre de l'Intérieur aussi bien pendant qu'après la révolution. Il ajoute que même le Président déchu n'a pas perdu confiance en l'armée et cela explique son ordre, le 14 janvier, de désigner le général Ammar en tant que coordinateur de sécurité entre les deux ministères.