Dans son discours, car c'est bien d'un discours qu'il s'agit, et point d'une interview, bien que le brillant journaliste de Nessma TV an a donné du fil à retordre au Cheikh, avec ses paraboles et autres pistes de transition, mais qui n'ont pas eu raison de la concentration de Ghannouchi sur ce qu'il avait à transmettre, Dans ce discours donc, Rached Ghannouchi a abordé tous les sujets d'actualité, que nous allons essayer de reprendre de façon succincte : Crise ? Quelle crise ? Pour Ghannouchi, il n'y a pas de crise en Tunisie. Elle existe dans une « île » tunisienne, celle des politiciens a-t-il dit. Le tunisien, lui, ne connait pas la crise, il veut continuer à vivre et ne veut surtout pas hypothéquer l'année scolaire de ses enfants. Non à la désobéissance civile ! La désobéissance civile n'a pas lieu en face d'un gouvernement élu et légitime. Le gouvernement n'a pas failli ! Qui peut juger de la réussite ou non d'un gouvernement ? Tout est relatif, si on se compare aux autres pays du printemps arabe, et surtout quand on prend en considération la crise mondiale. Notre gouvernement a réussi, ne serait-ce sur le plan sécuritaire dans la lutte contre le terrorisme, et sur le plan de la liberté d'expression. D'un autre côté, regardez le miracle! Vous ouvrez un robinet et il y a l'eau courante! Vous tournez un interrupteur et vous avez l'électricité! De quel échec vous parlez? Concernant l'initiative de l'UGTT : Nous sommes d'accord pour cette initiative à condition que l'ANC se remette au travail immédiatement, d'ailleurs son travail est presque achevé, et que les partis reviennent à la table du dialogue. Après seulement, on étudiera la possibilité de démission du gouvernement. L'embellie des relations avec BCE Ghannouchi a déclaré filer le parfait amour avec BCE. Il faut qu'il y ait de l'amour entre nous. La rencontre de Paris a été très fructueuse, a-t-il déclaré, avant de se rétracter devant la demande de plus de précisions de la part du journaliste : Le principal acquis a été que la glace a été brisée entre nous. Dans le même registre, Ghannouchi a annoncé qu'il n'y aura point de loi d'immunisation de la révolution avant les prochaines élections, et qu'Ennahdha ne présentera pas de candidat à la prochaine présidentielle, dans une optique de partage du pouvoir, a-t-il dit, en une sorte de clin d'œil à l'éventualité d'un accord conclu de « donner » la présidence à BCE. La peur du scénario égyptien Ghannouchi a concédé que son parti a peur du scénario égyptien dans la mesure où les dirigeants des frères musulmans ont été remis en prison. Il concédé que cette éventualité fait peur aux membres d'Ennahdha. Qu'en est-t-il des Ansar Achariaâ et des LNPR ? Il refuse de cataloguer Ansar Achariaâ dans le registre des organisations terroristes, il prône plutôt le dialogue et la bonne parole avec eux. Le reste est du ressort des services judiciaires et de la police. Quand aux LNPR, il ne voit toujours pas la nécessité de les dissoudre, et que c'est une décision qui revient au pouvoir judiciaire. Il a même dit que s'ils sont hors la loi, ils ne le sont pas plus que les médias et certains politiciens trop virulents à son goût. Il retire sa plainte contre Samir Ettaïeb qui l'avait accusé du meurtre des deux opposants Belaîd et Brahmi, en indiquant qu'il prône le pardon et l'amour (encore !), comme il tient à prendre sur sa personne et pardonner à tous ceux qui lors des manifestations le traitent d'assassin. Le prochain gouvernement Il tient à préciser qu'il a été « décidé » de le nommer « gouvernement des élections » dont le rôle sera uniquement de veiller au déroulement des élections. Il sera installé quelques semaines avant le suffrage, et se dissoudra ensuite pour laisser la place à l'équipe qui sera élue. Il ne sera pas présidé par Laârayedh, d'ailleurs, il y a intérêt à-t-il précisé, puisque les membres de ce gouvernement, de même que le président de la république ne seront pas éligibles. Il ne veut pas que Marzouki soit candidat ? Au contraire dit-il. La Tunisie ne peut se permettre de se passer d'un aussi brillant politicien que Moncef Marzouki. Donc, on dirait, qu'il y a du changement dans l'air, et que Marzouki sera bientôt destitué au profit d'un autre.