Quand un candidat à l'élection présidentielle, qui préside aux plus hautes destinées de l'Etat, qualifie un de ses concurrents de « Taghout ». Et chacun sait comment ce mot a été dévie dans l'histoire moderne de l'islam et contre qui on l'emploie aujourd'hui, cela ne relève plus de l'éthique et de la morale en politique et des droits des l'homme qu'on foule aux pieds. Mais constitue un grave précédent et une véritable menace contre la stabilité et la sécurité de l'Etat et son caractère civil » , c'est par ses mots que s'est indigné la tête de liste de Nidaa Tounès dans la circonscription de Tunis 1 nouvellement élue, Saïd Aïdi, contre la désignation par le président sortant et candidat à sa propre succession, Moncef Marzouki, de son principal concurrent, Béji Caïd Essebsi, de « Taghout ». Saïd Aïdi a appelé les autorités concernées à prendre leurs responsabilités. Nommé en 2011 par l'Assemblée nationale constituante, Moncef Marzouki sera soumis pour la première au suffrage universel direct. Il y joue sa survie et s'accroche à son poste quitte à recourir aux méthodes les plus outrancières pour éliminer ses adversaires politiques. Faisant appel aux personnalités et aux associations les plus controversés dont les Ligues de la protection de la révolution, dont l'implication dans de graves exactions n'est plus à avérer, versant dans le populisme primaire,le président de la République a fait de la division et la vindicte ses principaux axes de campagne. Et dans cette bataille, tantôt en agitant de l'épouvantail de la peur, tantôt en vouant ses concurrents à l'ignominie, Marzouki s'est trouvé un ennemi. Le président de Nidaa Tounès qui serait la réincarnation de la machine du RCD honni et dissous et l'incarnation de l'hégémonie. Accompagné, hier, par le sulfureux Béchir Ben Hssan en meeting à Msaken (gouvernorat de Sousse), le président sortant a franchi un cap dans ses attaques. « Les sécuritaires qui sont visés par les terroristes ne sont pas les taghout. Les taghout sont les RCDistes et celui qui était un dictateur durant l'ancien régime et qui ambitionne de reproduire le même modèle à présent », a asséné Moncef Marzouki à l'adresse de Béji Caïd Essebsi. La nouvelle salve de Moncef Marzouki a suscité une levée de boucliers de l'ensemble de la classe politique qui a dénoncé une dérive non seulement du candidat mais du représentant des institutions de l'Etat. Taghout est le mot utilisé par les membres de l'organisation islamique interdite Ansar Chariâa pour qualifier les agents de l'ordre et son va-t-en guerre contre le terrorisme.