Les syndicalistes l'avaient promis. Ils s'y sont appliqués, et ils y sont parvenus. Ils ont réussi à mobiliser un nombre impressionnant d'enseignants, qui sont venus de tous les coins du pays, pour crier haut et fort, non pas des revendications en rapport avec leurs droits, et encore moins avec ceux de leurs disciples. Ils se sont, tout simplement, lâchés contre le ministre de l'éducation, en la personne de Neji Jalloul, leur mal-aimé. Les organisateurs de la manifestation ont veillé à faire coïncider leur action avec la présence en Tunisie de centaines d'invités de marque, venus voir comment on se débrouillait, pour mériter la sollicitude des grands de ce monde. Et les Gammoudi et Cie savaient ce qu'ils faisaient et ont promis que leur mouvement ne gênerait en rien les assises du forum international de l'investissement. C'est, donc, avec cette pointe de curiosité, pour savoir et voir comment allaient faire les enseignants, nos dignes maitres, pour montrer au monde comment on pouvait manifester dans la dignité et dans le respect, en Tunisie, pour revendiquer ses droits, sans donner l'impression aux hôtes qu'on maltraitait son gouvernement, ni que celui-ci ne pouvait rien maitriser, à commencer par ses propres fonctionnaires, garants du bon usage de leurs dons et de leurs placements, que l'équipe de TunisieNumerique a fait le déplacement, ce mercredi matin, à la Kasbah, pour filmer une manifestation propre et digne de l'élite du pays. Or ce que la caméra de l'équipe, de même que les oreilles des opérateurs, ont capté n'avait rien de séant et de correct. Au contraire, le flot des insultes ordurières laissait planer des doutes sur le niveau d'éducation des manifestants. Etaient-ce là nos éducateurs, ceux à qui nous confions, les yeux fermés la chair de notre chair, pour qu'ils en fassent, espérions-nous, les hommes et femmes de demain ? En tout cas, les slogans lancés par les manifestants ce jour à la Kasbah, laissaient difficilement croire qu'il s'agissait d'éducateurs. Et dire que tout çà, c'était pour satisfaire l'égo démesuré de certains syndicalistes qui s'étaient juré d'éjecter, aujourd'hui même, Neji Jalloul du gouvernement histoire de ne pas permettre que la réforme du système éducatif puisse porter son nom, pour l'éternité. Sachant que les problèmes et revendications des enseignants dépassent le ministre et même le ministère de l'éducation et sont du ressort du ministère des finances. Et même le problème des syndicalistes n'est pas au niveau de la personne de Neji Jalloul, puisqu'ils en veulent désormais, à Youssef Chahed et ont décidé de relever son défi puisqu'il a dit qu'il tenait absolument à son ministre. Finalement, de retour à la rédaction, nous avons visionné les séquences filmées, et nous-nous sommes trouvés devant un dilemme : Soit on diffusait en couvrant de bruitage les injures, ce qui aurait donné un film avec un son de morse, fait de bips, et autres biiiiiips, ou alors ne pas diffuser. Et, par respect à nos maitres d'antan, de peur que ceux qui sont décédés ne se retournent dans leurs tombes, et que ceux qui sont toujours de ce monde ne regrettent leur vie passée à éduquer des générations de jeunes tunisiens assoiffés de vie et de savoir, nous avons décidé de ne pas diffuser les images de la manifestation, histoire, aussi, de préserver un semblant de respect pour cette élite, et quelque part, par simple égoïsme, pour nous donner un semblant de réconfort en abandonnant nos enfants entre les mains de ces maitres du... savoir.