La grève de ce mercredi 22 Février 2017, la deuxième en 2017 après la première observée le 5 janvier, n'a rien de syndical et, à ce titre, et dans une certaine mesure, suinte l'illégalité. Il s'agit d'une action politique, au mobile politique et à objectif politique. Ni les conditions de travail ni les modalités salariales n'en sont au centre. Juste une manœuvre, une nouvelle manœuvre pour débarquer Néji Jalloul, ministre de l'éducation, contraindre ce dernier à démissionner ou encore mettre la pression sur Youssef Chahed, chef du gouvernement, pour l'exclure de son équipe. LassâadYaâcoubi, secrétaire général du syndicat de l'enseignement secondaire n'a pas laissé trainer le mystère sur son ultime visée, à savoir la tête du ministre.Ses boulets rouges prolifèrent. L'apprenti syndicaliste ne ménage aucun effort et ne manque aucune opportunité pour instrumentaliser, pour des raisons bassement politiques, les revendications, plutôt justes et légitimes, du corps enseignant et pour détourner le mouvement social de son socle naturel. A-t-il tort Adnane El Hajji, membre à l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), d'avoir traité Lassâad Yaâcoubi de « bandit » et d'avoir accusé le parti du Mouvement du Peuple, auquel appartient ledit secrétaire général, de se cacher derrière cette cabale contre NéjiJalloul.Toujours virulent et vindicatif, en alerte et sur le pied de guerre, le syndicat général de l'enseignement secondaire, mené au doigt et à l'œil par le sulfureux LassâadYaâcoubi, multiplie les épreuves de force et les déclarations au vitriol. Derrière le tumulte frondeur et revendicatif se faufile un insondable agenda politique, voire politicien dont l'UGTT est le parrain et le secrétaire général le fer de lance. Personne n'a oublié la sentence de triste mémoire de Lassâad Yaâcoubi, à l'adresse des parents bravant les menaces et les ordres de grève et pointant l'inertie du ministre de l'éducation face à l'abus de pouvoir syndical. N'a-t-il pas braillé, dans un langage marin qui aurait fait sauter de joie Sihem Badi : » Que celui qui n'est pas d'accord, aille boire l'eau de mer« . Sans compter la soi-disant « journée de colère nationale », décrétée par le syndicat en grandes pompes, tenue le 5 septembre 2016, et qui, de toute évidence, n'a de national que la prétention. Plutôt une journée de deuil sur l'éducation nationale. Encore un clou dans son cercueil. Droit dans ses bottes, Lassâad Yaâcoubi continue de décliner les journées fortes en thème, en proclamant le Mercredi, 1er Mars prochain, « journée décisive« . A priori, d'autres journées seront annoncées pour tenter encore une fois, la énième fois, de déloger Néji Jalloul, pour qui ceux qui réclament sa démission sont « les blessés des élections » non sans assener, sur le ton de la boutade et un brin provocateur, qu'étant à son poste à travers les urnes, « ceux qui veulent me faire remplacer ou faire chuter le gouvernement doivent attendre les prochaines élections« . Les assauts à répétition, et à couteaux tirés, de Lassâad Yaâcoubi ne sont-ils pas, tout compte fait, son cheval de bataille dans un conflit autant politique que personnel ? Un travail de sape, sur fond d'antagonisme, au détriment de l'enseignement public, au mépris de l'éducation des élèves et de l'investissement de l'Etat et de la famille. Les parents, conscients de la gravité de la situation, de la dérive syndicale et de l'arrière-pensée politique des grèves, n'ont cessé de se mobiliser pour tenir tête au carré de fines gâchettes, toujours prompts à dégainer et à plomber les ailes de l'éducation nationale et de son ministre. Youssef Chahed, chef du gouvernement, a toujours rejeté les requêtes d'éviction de son ministre. A ce titre, Lassâad Yaâcoubi ne veut guère admettre que, à contre-pied de son intime et profond souhait, il n'a pas voix au chapitre en matière de changement de ministre et de telle décision est du ressort exclusif du chef du gouvernement, prise selon des critères objectifs et tranchants. D'ailleurs pourquoi vouloir dégager Néji Jalloul? Selon Sami Tahri, secrétaire général adjoint de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), apportant de l'eau aux moulins de son fantasque condisciple, Néji Jalloul aurait dixit « détruit l'enseignement public« , le commun des mortels voudrait bien savoir comment ? Pour quel motif? Par quels moyens ? A quelle fin? A se demander quel jeu est en train de jouer la centrale syndicale en menant la fronde et en mettant tout son poids dans cette campagne de déstabilisation et de destitution. Tout compte fait, depuis plus de six ans, l'UGTT n'a de cesse de jouer les gros bras dans l'arène politique et de se positionner en tant beaucoup plus acteur politique que partenaire social. Les velléités de l'UGTT de marcher sur les platebandes du gouvernement sinon de lui confisquer ses attributions ne sont plus à démontrer. En un mot, Néji Jalloul se trouve aujourd'hui coincé entre le marteau politique et l'enclume syndicale, sans compter que les rumeurs de remaniement ministériel dont il ferait partie, colportées ci et là par la presse tunisienne, quand bien même les démentis, donnent des grains à moudre à ses détracteurs. Il est à constater que depuis sa nomination au poste de ministre de l'éducation, les mouvements de contestation et de grève ont proliféré, au grand dam des élèves, des parents et des observateurs. Donc, dès le départ, et avant de même de faire ses preuves et faire valoir ses idées, Néji Jalloul était dans la cible syndicale. Aujourd'hui l'étau se resserre encore plus. Quiconque déplore que, comme chaque année, il faille vraiment réussir un tour de force pour sauver la saison scolaire, au départ, pendant et à l'achèvement.Ce n'est pas seulement l'année scolaire qui est mise en péril et en mal mais aussi et surtout tout le système éducatif et son chantier de réforme et de mise à nouveau. Donner du fil à retordre au ministre de l'éducation, l'accuser de tous les tares, le vouer à la vindicte syndicale, pour le fragiliser et essayer, à travers la pression, l'extorsion et la grève, de lui arracher des mesures incompatibles avec son programme et son budget, c'est tout simplement une tentative de racket que l'esprit syndical même refuse. En résumé, depuis quelque temps, la saison scolaire, en otage d'agendas politiques opposés, fait l'objet d'un chantage, d'un bras de fer et même d'un poker menteur, à coups de bluff ou de poing. Ce ne sont pas ni la liberté syndicale ni le droit à la grève ni le mouvement social qui sont pointés là, bien au contraire, mais le timing des revendications, leur mobile manifestement politique ainsi que la volonté, à peine voilée, de s'approprier le système éducatif et d'usurper le système de décision gouvernemental, au risque d'une saison scolaire boiteuse, conflictuelle et vouée à l'échec.