Les dernières majorations annoncées la semaine dernière dans les prix du carburant et des cigarettes, de même que celles, apparemment, prévues pour les semaines à venir, ont, il est vrai, enragé les citoyens à qui il ne manque plus que les larmes pour pleurer leur pouvoir d'achat. Mais plus que les répercussions de ces majorations sur le portefeuille du consommateur, ce sont les motivations de ces décisions, et le timing avec lequel elles ont été annoncées, qui dérangeaient. Entres les explications plus extravagantes les une que les autres, données par certains membres du gouvernement, et, surtout, devant les contradictions entre ces raisons avancées, et ce que la plupart des tunisiens savent très bien en rapport avec la réalité des prix à l'internationale, un malaise général s'est installé chez les tunisiens qui n'arrivent pas à comprendre, et qui perdent toute confiance en cette équipe qui voit sa crédibilité dépérir à vue d'œil. Il est, désormais acquis, que les dernières majorations de prix ne sont qu'un petit prélude à ce qui attend le tunisien, et que ce sont les premières mesures entreprises par l'Etat, dans le sens d'une soumission totale et entière aux directives et aux exigences des instances financières internationales, principales sources de financement de ce pays qui court à la faillite. Et il fallait avoir le courage de dire la vérité aux tunisiens, en face, et les préparer à ce qui les attend, et non point, les prendre pour des gosses qui ne comprennent rien, et aux quels on raconte n'importe quoi, histoire de les duper. Le tunisien a le droit de savoir que son gouvernement le mène tout droit, mais peut-être, de façon détournée, vers l'annulation des subventions de l'Etat, du moins, sous sa forme actuelle. Il a, aussi, le droit de savoir qu'il va y avoir une cascade d'autres mesures encore plus douloureuses, et qu'il doit s'y préparer, question gestion de ce qui reste de son budget. Mais ce n'était pas du tout, çà ce qu'on lui a servi. D'abord, il a eu droit au mensonge du siècle, quand un certain conseiller financier a prétendu que la majoration des prix des carburants était dictée par les prix du pétrole, à l'internationale, alors que la plupart des tunisiens savent pertinemment, que le prix du baril est à son plus bas niveau depuis des lustres. Ce qui constitue une grave défaillance de communication qui a eu pour résultat l'anéantissement de ce qui restait de crédibilité de l'équipe du gouvernement, et l'installation d'un climat de méfiance vis-à-vis de la classe dirigeante. Ensuite, il y a eu un autre dérapage de communication, encore plus grave et aux conséquences Ô combien incalculables. Il s'agit de la déclaration de la ministre en charge de l'énergie, qui avait, bien à l'avance, prédit les majorations du prix du carburant, en en faisant endosser la responsabilité aux sit-inners dans le sud tunisien, aussi bien à Tataouine, qu'à Kébili. Elle avait, en effet, anticipé les majorations en annonçant que les citoyens allaient payer la facture de la fermeture des vannes des hydrocarbures, par les protestataires du sud tunisien. Ce qui constitue une gravissime allégation, qui risquait d'avoir, au moins, deux conséquences plus néfastes l'une que l'autre. Premièrement, elle risquait de faire flamber le pays au feu du régionalisme, et remonter le reste des tunisiens contre leurs compatriotes de Tataouine et de Kebili, ce qui pouvait aboutir à une sorte de guerre civile entre le sud et le nord du pays. Et deuxièmement, en prétendant que la fermeture des vannes durant deux semaines allait avoir d'aussi lourdes conséquences sur le budget de l'Etat et des citoyens. Ignorait-elle qu'elle allait faire croire aux sit-inners qu'ils ont raison de faire ce qu'ils font, et même plus, puisqu'ils vont, sérieusement, penser qu'ils marchent sur un océan d'hydrocarbures ? De gravissimes écarts de communication que le président du gouvernement gagnerait à faire cesser illico-presto, en intimant, par exemple à ses collaborateurs le silence radio absolu, avec interdiction formelle de faire des déclarations aux médias.