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Mustapha Ben Jaafar: En Tunisie, «nous passons tous un test de démocratie»
Publié dans Tunisie Numérique le 08 - 11 - 2011

Pierre Puchot, né en 1980, ancien collaborateur de La Croix, il est, depuis 2008, reporter Maghreb et Moyen-Orient pour le site d'information Mediapart.
Il a interviewé Mustapha Ben Jaafar, président du parti du parti «Ettakatol», interview que nous publions ci_dessous.
«Un peu déçu» par le score de son parti, Ettakatol (21 sièges sur 217, troisième force de la constituante), l'opposant historique à Ben Ali, Mustapha Ben Jaafar, est aujourd'hui candidat à la présidence de la République tunisienne. S'il considère le code du statut personnel comme un acquis sur lequel il n'envisage pas de transiger, il revendique également le recentrage de sa formation sur les questions économiques.
Aujourd'hui formation de « centre gauche », Ettakatol concentre la majorité de son discours à destination des entrepreneurs, et tente de rassurer la partie de son électorat qui s'émeut de sa participation au futur gouvernement aux côtés des musulmans conservateurs d'Ennahdha (90 sièges). «Nous passons tous un test d'apprentissage de la démocratie, explique Mustapha Ben Jaafar. Comme tout le monde, Ennahda doit démontrer qu'il fait ce qu'il dit. Et aujourd'hui, Ennahda dit que c'est un parti civil, respectueux des acquis de la Tunisie. On va le prendre au mot ! C'est une épreuve, nous sommes contents de nous être débarrassés de la dictature, nous n'allons demander pas que l'on retourne à la dictature pour régler notre projet de société.» Entretien.
Plusieurs articles en Tunisie se sont fait l'écho d'une information selon laquelle vous auriez accepté le poste de président de la République qui vous était proposé par Hamadi Jbali, secrétaire général d'Ennahda, lui-même revendiquant le poste de premier ministre. Est-ce exact ?
Non, je pense que le poste de président de la République, pour lequel je suis candidat, comme celui de président de l'Assemblée et de premier ministre, fera l'objet d'un consensus entre les différents partenaires qui accepteront de faire partie de ce gouvernement d'intérêt national, comme nous l'appelons. Rien n'est encore définitif, nous sommes en pourparlers. Nous tenons par ailleurs à respecter l'échéancier mis en place par nos institutions. Il va y avoir très bientôt une première réunion de l'Assemblée constituante convoquée par l'actuel président, qui élira d'abord un président de l'Assemblée, et adoptera un règlement intérieur et une organisation provisoire des pouvoirs. C'est alors seulement que nous élirons un président de la République, et que celui-ci désignera un chef de gouvernement.
Où en est-on de la formation du futur gouvernement ? Êtes-vous déjà en mesure de dire que vous en ferez partie ?
Mais c'est nous, Ettakatol, qui avons appelé les premiers à la formation de ce gouvernement, avant même que les élections ne se déroulent. Nous sommes convaincus que c'est la bonne solution pour la situation que traverse la Tunisie actuellement, et nous rencontrons tous les partis qui ont été élus par le peuple tunisien pour les convaincre que c'est la bonne solution. Nos pourparlers ne sont pas encore terminés, et nous n'avons pas encore épuisé toutes nos cartes.
Quelle est la différence entre un gouvernement d'union nationale, vocabulaire adopté par la plupart des acteurs politiques impliqués dans sa formation, et un gouvernement d'intérêt national, formule que vous avez adoptée, et qui suscite un certain scepticisme ?
Si nous optons pour ce type de gouvernement, c'est parce que c'est l'intérêt national qui l'exige. Aujourd'hui, la Tunisie n'est pas une vraie démocratie. Nous venons tout juste de mettre la première pierre, et le pays est encore fragile, et traverse une période agitée, une tempête. Le processus démocratique n'est pas encore stabilisé. Il nous faut donc un gouvernement qui regroupe le maximum de forces politiques qui auront été choisies par le suffrage populaire, pour éviter toutes sources de tensions qui pourraient être utilisées par les forces de régression. Au contraire, le gouvernement d'union nationale désigne une formule qui pourrait se concrétiser en cas de péril extérieur, et qui regrouperait toutes les forces. Or, il n'est pas question de réunir toutes les forces. Certaines rappellent l'ancien régime, d'autres dont on ne connaît pas du tout l'identification, comme toutes ces listes élues sous le sigle de « La Pétition » (ndlr – quatrième force de l'assemblée, dont certains analystes pointent la proximité de son président avec l'ancien régime du président Ben Ali, et dont plusieurs listes ont été disqualifiées du fait d'une campagne jugée irrégulière). Nous ne pouvons pas parler aujourd'hui d'un gouvernement d'union nationale. C'est pour cela que nous utilisons l'autre formule.
«Ennahda dit qu'il est un parti civil. On va le prendre au mot»
Certains dans votre électorat et parmi vos militants sont embarrassés par le fait de faire partie d'un gouvernement au sein duquel seraient présents les musulmans conservateurs d'Ennahda. Quelles garanties demandez-vous à l'organisation de Rached Ghannouchi et Hamadi Jbali ?
Cette divergence de vues est réelle, et compréhensible, mais aujourd'hui, une majorité de nos militants et de membres de notre électorat comprennent notre choix. Nous en faisons constamment la pédagogie. Quant aux garanties, elles apparaîtront clairement à l'issue de nos discussions avec nos futurs partenaires : une répartition des pouvoirs équilibrée, entre les deux parties de l'exécutif, chef de l'Etat, et chef du gouvernement. Ensuite, ce qui est en jeu, c'est la constitution. Et nous garderons toutes nos libertés pour défendre bec et ongles les valeurs sur lesquelles nous avons fondé notre parti. Dès lors, les forces de progrès se rencontreront. Nous n'avons aucune crainte là-dessus. Et le fait que nous ayons privilégié la conduite des affaires du pays ne va pas changer nos positions sur des questions fondamentales, comme la question de l'égalité homme/femme, les libertés publiques et individuelles, qui figurent dans le code du statut de la personne. Code que nous considérons comme un acquis, à faire évoluer dans le sens de davantage, encore une fois, d'égalité homme/femme. Sur ces points-là, il est impensable que nous puissions transiger.
Ennahda cristallise en France, mais également au sein d'une partie de votre électorat, la crainte d'une certaine régression. Pensez-vous que ce parti représente une menace réelle sur les points que vous venez d'évoquer ?
On nous pose la question depuis des années. Ben Ali a géré le pays sur cette logique de la peur, essayer de nous faire peur les uns des autres, et d'effrayer l'Occident de ce qui risquerait de se passer en Tunisie. Pendant très longtemps, on a condamné Ennahdha en disant que l'organisation pratiquait un double langage. Aujourd'hui, il y a un test de vérité. C'est un examen pour tout le monde, l'apprentissage de la démocratie. Ennahda doit démontrer qu'il fait ce qu'il dit. Et aujourd'hui, Ennahda dit qu'il est un parti civil, respectueux des acquis de la Tunisie. On va le prendre au mot ! La garantie, c'est d'être dedans, à côté, pour contrôler, freiner, tirer la sonnette d'alarme si jamais il y a un dérapage. C'est une épreuve, nous sommes contents de nous être débarrassés de la dictature, nous n'allons pas demander que l'on retourne à la dictature pour régler notre projet de société. C'est impensable.
Cela signifie que vous ne demandez aucune garantie, concernant l'attribution des ministères notamment ?
C'est tout à fait négociable. Pourquoi voulez-vous que l'on parle de répartition des ministères alors que nous n'avons pas encore mis en branle le programme commun et d'urgence que nous devons appliquer ? Une fois ce programme défini, l'on prendra soin d'apaiser l'opinion publique nationale et internationale, et de rassurer aussi les entrepreneurs, car nous avons besoin de relance économique pour faire face au chômage et au problème des disparités interrégionales. Il y a assez de sens de responsabilité chez nos partenaires pour que la répartition des ministères se fasse dans cette logique.
«L'Assemblée est souveraine, et tranchera sur la question de sa durée et du régime»
Dans les mesures d'urgences, lesquelles vous paraissent essentielles ?
Il y a deux éléments indispensables pour passer ce cap avec le moins d'écueil possible, c'est la sécurité et la stabilité. Et pour cela, il faudrait absolument que le monde des affaires soit rassuré, non seulement par l'Etat de droit, par des règles claires et transparentes. Mais aussi, en leur assurant les meilleures conditions pour qu'il puisse agir en toute quiétude. Et puis, il ne faut pas que l'international ait peur de l'arrivée au pouvoir d'un parti qui a des références religieuses. Il ne sera pas seul aux commandes ; il accepte de manière claire aujourd'hui de partager le pouvoir, ce qui veut dire aussi qu'il accepte que les autres organisations ne soient pas là uniquement pour servir de caution. Et cela, nous y veillerons également.
Parmi les différends que vous avez avec l'un de vos partenaires potentiels, le CPR de Moncef Marzouki, il y a la question de la durée de l'Assemblée constituante. Pourquoi souhaiter qu'elle ne dure qu'une année, avant de nouvelles élections ? Le gouvernement nommé aura-t-il, en l'espace d'un an, la possibilité de prendre les mesures d'urgence que vous préconisez ?
Nous avons discuté sur ce point pendant plus d'un mois, du 5 août au 15 septembre. Onze partis se sont mis d'accord et ont signé un texte qui garantissait cette durée d'un an. C'est un engagement moral et politique. Bien entendu, la constituante est souveraine, et peut très bien modifier la durée de son exercice. Aucun des partis n'imposera quoi que ce soit, que ce soit le CPR, Ettakatol ou un autre. Un an, c'est court, il est vrai, non pas pour une constitution, mais pour un gouvernement. Mais nous ne sommes pas tenus d'endiguer l'ensemble du chômage et des disparités régionales en un an ! Je ne pense pas qu'il s'agisse ici d'un veto opposé par le CPR, qui est un parti démocratique et qui acceptera la règle de la majorité.
Quel régime politique préconisez-vous ?
Comme le CPR, un régime mixte. A dire vrai, il n'y a qu'Ennahdha qui penche pour le régime parlementaire. Là aussi, cela fera objet d'une discussion, soumise au final à l'Assemblée, où Ennahdha, même si c'est le principal parti, n'est pas majoritaire.
En cette fin de semaine, de nombreux échos font état cependant d'un véritable blocage dans les négociations pour la formation du gouvernement. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Il n'y a pas de blocage. Il faut prendre le temps de discuter à fond du programme commun et de la répartition des rôles. Sans oublier le poids des médias, et ce qui va avec. Ce n'est pas facile de rassurer tous les partenaires, ceux qui étaient au gouvernement pour leur assurer qu'on ne va pas entamer une chasse aux sorcières, les entrepreneurs pour qu'ils sachent que leurs intérêts ne seront pas menacés, mais qu'au contraire on les encouragera à investir.
«Les Tunisiens ont votés pour ceux qui ont continué à soutenir la révolution et ses objectifs»
Pour le CPR et certains analystes tunisiens, le camp dit progressiste (PDP de Nejib Chebbi, Pôle démocratique moderniste) a perdu ces élections parce qu'il s'est focalisé sur la critique systématique d'Ennahda. Partagez-vous cette analyse?
Il y a une bonne part de vérité là-dedans. Depuis janvier, nous avons prêché que nous étions engagés dans une compétition au sein de laquelle nous avions des adversaires, mais pas d'ennemi. Et je l'ai déjà dit du temps de Ben Ali : la focalisation identitaire pour fustiger tel ou tel parti est contreproductive, et ne bénéficie qu'aux extrémistes. C'est ce qui a été concrétisé par les urnes. Cela dit, c'est un vote sanction, pour tout ce qui s'est déroulé par le passé. C'est un vote de sympathie envers les principales victimes de la répression sous Ben Ali. Il faut rappeler enfin que le 14 janvier, le parti Ennahda disposait déjà de la notoriété la plus importante. Il est parti avec des atouts que les autres n'avaient pas.
Le deuxième point, et il faut en avoir conscience, c'est que les Tunisiens ont exprimé leur confiance aux partis qui ont résisté à la dictature avant le 14 janvier, et qui, après la fuite de Ben Ali, ont continué à soutenir la révolution et ses objectifs et à revendiquer la rupture avec le passé. Ce qui n'était pas le cas de manière nette et évidente pour le PDP et le PDM. Tout cela a joué en même temps.
N'y a-t-il pas un danger pour votre formation à ne pas vous positionner clairement vis-à-vis de l'opinion ? Vous avez assisté à plusieurs réunions pour la formation d'un « pôle moderniste » avec le PDP, le PDM et d'autres, avant les élections, tout en maintenant un contact permanent avec Ennahda. Sur le plan économique et social, vous avez également recentré votre discours. Vous préconisez même aujourd'hui des exonérations fiscales à hauteur de 25% à 30% pour les entreprises, sans préciser les conditions de ces réductions de charges. C'est assez éloigné du parti que vous représentiez, il y a encore cinq mois
La preuve est faite que ceux qui se sont cramponnés à une position dogmatique, de refus systématique, sont les grands perdants de cette élection. Même si, je dois bien l'avouer, notre score me déçoit un peu. Mais il montre néanmoins que notre stratégie a été la plus payante. Maintenant, le passé, c'est le passé. Pour l'avenir, il faut tourner la page, et rassembler pour conduire les affaires du pays.
Pour ce qui est de notre politique économique, il est vrai que notre parti a considérable grandi. Nous sommes passés de quelques centaines de militants à plusieurs milliers. Nous avons opté pour un nouveau modèle de développement, sans oublier que l'Etat doit absolument retrouver son rôle de stratège et de régulateur. C'est fondamental. Pour le reste, encore une fois, nous ne sommes pas dogmatiques. Ce que l'on semble perdre d'une main, on le regagne de l'autre. Nous ne faisons pas de cadeaux sans être sûrs de récupérer l'essentiel, grâce à la transparence et la refondation du système fiscal. C'est notre stratégie.
Source: Mediapart
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