TUNIS (TAP) - ''La liberté, la démocratie et la question religieuse'', tel est le thème du colloque international, organisé samedi et dimanche à Tunis, par l'Association de vigilance et d'engagement pour la révolution tunisienne et son immunité (AVERTI), et Notorius Consulting, avec la participation d'une pléiade de penseurs et de spécialistes tunisiens et étrangers, de représentants de partis politiques et d'acteurs influents de la société civile tunisienne. L'idée centrale autour de laquelle s'articulent les travaux de ce colloque est de savoir: Comment vivre l'espace public, la Cité, en étant à la fois citoyen et croyant, citoyen et agnostique, citoyen et athée ? Une problématique complexe et cruciale qui se pose avec acuité et à laquelle sont confrontés toutes les sociétés arabes, aujourd'hui en ébullition. La Tunisie et l'Egypte, deux pays qui viennent tout récemment de sortir de plusieurs décennies de despotisme, héritées de deux régimes qui partagent la même vision d'une gouvernance bâtie sur la répression, l'injustice et la monopolisation du pouvoir, se retrouvent à la première loge, dès lors qu'ils doivent mettre en place de nouveaux systèmes où le politique et le religieux cohabitent sans confrontation. Cette question est loin d'être facilement abordable, estiment les organisateurs de ce colloque, eu égard à la réalité socioculturelle de nos pays et à leur histoire dépourvue d'expériences démocratiques. C'est pourquoi, les participants dans leur majorité, ont puisé leurs références essentiellement dans le registre du patrimoine intellectuel occidental en passant en revue les expériences gréco-latines, dont l'œuvre de Platon s'inscrit en tête, donnant l'impression d'éluder la problématique essentielle à savoir : la place et le rôle de la religion dans l'espace public. Pourtant, le débat ouvert par ce colloque international brise un grand tabou et soulève la grande question inhérente à la civilisation arabo-musulmane qui peine à résoudre la problématique du rapport entre le spirituel et le temporel, le sacré et le profane. En effet, depuis deux siècles, nos sociétés ne font que perpétuer le même modèle sociétal sous des formes différentes, alors que l'occident chrétien a résolument tranché avec cette question en se lançant résolument dans une modernité irréversible, avec une nette séparation entre l'Eglise et le pouvoir civil. A cette occasion, le philosophe Youssef Seddik, président de cette association a fait savoir que la problématique du rapport entre la liberté, la démocratie et la question religieuse a touché tous les pays du monde y compris l'Europe qui se débat jusqu'aujourd'hui dans cette problématique. Le philosophe s'est interrogé sur le lien entre la politique et la religion. Cette dernière, a-t-il souligné, n'a aucun rapport avec la citoyenneté et doit rester fondamentalement une affaire individuelle. Dans son intervention sur le thème ''Qu'entendre par la question religieuse" ,le philosophe Abou Yaarab Marzouki, a fait la distinction entre la religion et la politique, d'un côté, et les institutions religieuses et les institutions politiques, d'un autre côté. Pour sa part le philosophe Mhamed Ali Halouani, dans sa conférence intitulée ''qu'en est-il de la démocratie en islam aujourd'hui'', a démontré que le concept de démocratie est en rupture avec l'architecture conceptuelle antique et médiévale, ajoutant que les jeunes tunisiens qui ont fait la révolution pour instaurer une société libre et démocratique n'ont pas eu besoin de consulter le "clergé'' pour leur valider leur mouvement de libération, appelant à renoncer à toutes les élucubrations et les palabres philosophiques et théologiques sur les libertés. Le philosophe a terminé son intervention par une interrogation: ''Comment vivre en démocratie sans nuire à la spiritualité ?'' Les participants à ce colloque international ont débattu par ailleurs d'autres thèmes dont : ''Egypte : une légitimité révolutionnaire'' de Bahjet Elnadi et Adel Rifaat, '' Les relations avec le monde arabe, la Turquie comme modèle'' de l'historien Vehbi Baysan, '' Le combat des libérations nationales et leur devenir : des cas africains'' de M Mohamed Hilmi Chaaraoui.