TUNIS (TAP) - La finance islamique qui de l'avis de plusieurs experts financiers, est un créneau encore peu développé en Afrique du Nord, dispose d'un grand potentiel de développement dans la région, plus particulièrement en Tunisie. Pour M. Ahmed Karam, PDG d'Amen Bank, l'introduction de la finance islamique en Tunisie aura pour avantages de compléter le paysage financier et bancaire existant, de contribuer à la relance de la croissance économique, d'encourager l'épargne et d'attirer les investisseurs islamiques étrangers. Dans son intervention au cours d'une rencontre-débat, organisée jeudi par la Banque africaine de développement (BAD) sur la finance islamique et ses perspectives de développement dans la région de l'Afrique du Nord, M. Karam, a préconisé, à cette fin, de concevoir la finance islamique comme un produit et non comme un système à part entière, compte tenu de la situation actuelle du marché financier tunisien. En effet, a-t-il soutenu, au vu de l'absence d'une loi qui régit la finance islamique en Tunisie, il est difficile de transformer une banque classique en une banque islamique ou de créer un compartiment de finance islamique au sein d'une banque existante, pour des raisons liées essentiellement à l'organisation, à la mise en réseau et au coût d'une telle opération. A ce titre, il a appelé le prochain gouvernement à mettre en place un cadre législatif et réglementaire, propice au développement de la Finance islamique en Tunisie. Analysant la situation actuelle du marché, M.Karam a évoqué la question du refinancement des banques islamiques en Tunisie, qui, selon ses dires, peut entraver leur développement. Les banques islamiques, qui prohibent le recours à l'intérêt (Ribaa), ne peuvent pas se refinancer auprès de la Banque centrale de Tunisie (BCT), d'où la nécessité, a-t-il dit, d'identifier des solutions leur permettant de se procurer la liquidité nécessaire pour leur bon fonctionnement. Parmi les solutions proposées par les participants à ce sujet, il y a lieu de citer le recours au marché financier, à travers l'émission de Soukouk (bons islamiques), l'équivalent d'une obligation dans la finance classique, et ce, conformément à la Sharia'a. Le débat a porté essentiellement sur l'efficacité des instruments financiers islamiques en matière de financement des PME tunisiennes. M.Habib Karaouli, PDG de la Banque d'affaires de Tunisie, s'est interrogé sur les avantages de la finance islamique pour les PME comparés à ceux de la finance classique, admettant que la finance islamique a fait ses preuves en matière de financement des projets structurants. Et d'ajouter que, «ce qui fait défaut dans la situation, ce ne sont pas les produits, mais plutôt la qualité des services». Dans sa réponse, M. Karam a affirmé que la finance islamique, du fait qu'elle est fondée sur la notion de partage de risques (entre la banque et le client), offre un cadre idoine pour la création et l'assistance des PME. «Nous offrons les mêmes services que les banques classiques, mais notre plus, c'est la façon de le faire» a avancé, M. Slaheddine Kanoun, administrateur provisoire de la Banque Zitouna, qui a saisi cette occasion pour se prononcer sur les avantages de la finance islamique. En plus du partage de risques, le client qui s'adresse à une banque islamique a l'avantage d'avoir un coot de financement fixe (insensible à l'évolution du taux de marché) et de financer toutes les opérations, allant de la production jusqu'à la commercialisation.