SIDI BOUZID, 23 jan 2011 (TAP)- Qui aurait pensé que Mohamed Bouazizi, ce marchand ambulant, vivant dans le quartier populaire "Ennour" à Sidi Bouzid serait, en s'immolant par le feu devant le siège du gouvernorat, en ce jour du 17 décembre 2010, la flamme qui illuminera tout un pays. Feed-back sur ce jour "ordinaire" d'un citoyen qui s'est levé, comme chaque matin, pour pousser son étal de fruits et légumes. Seulement, le destin a voulu qu'il se trouvât en face d'agents municipaux qui lui ont saisi son gagne-pain, et infligé insultes et humiliations, en violation criante des droits de l'Homme les plus élémentaires. Bouazizi a tenté de rencontrer le gouverneur dans l'espoir de régulariser une situation qualifiée alors d' «irrégulière». En vain. En proie au désespoir, le jeune homme s'immole par le feu. Transféré à l'hôpital des grands brûlés de Ben Arous, il finira par succomber. Depuis lors, Bouazizi le martyr est devenu une icône, et entrera dans l'histoire comme celui par qui a commencé la révolution qui allait changer le cours de l'Histoire et le sort de tous les Tunisiens. Bouazizi n'a pas eu une enfance facile : il a perdu son père à l'âge de trois ans. Très tôt, il a dû quitter les bancs de l'école pour subvenir aux besoins de sa mère et de ses six frères et sœurs, pour lesquels il s'est pleinement dévoué. Sa mère Manoubia témoigne : "Notre famille est humble, nous n'avions eu recours à aucun responsable. Ce que nous voulions, c'est vivre dans la dignité, tout simplement. Mohamed était aimé de tous. Il était patient et a sacrifié toute sa jeunesse pour ses frères et sœurs". A propos de sa rencontre avec le président déchu, elle explique " Je lui ai demandé de poursuivre en justice, ceux qui ont humilié mon fils, le poussant au suicide, du simple gardien jusqu'aux responsables du gouvernorat". Elle lui aurait même affirmé "la disposition de la famille à livrer plus de martyrs jusqu'à la condamnation des coupables", rejetant toute forme de conciliation avec des proches de l'agent municipal l'ayant poussé au suicide. Elle s'est montrée, cependant, consternée de n'avoir reçu la visite ni les condoléances d'aucun responsable ni journaliste tunisien, au contraire des médias étrangers dont certains lui ont adressé des messages de condoléances. "Merci mon Dieu d'avoir répondu à l'appel de ceux qui ont souffert de l'oppression et de la tyrannie," rétorque-t-elle. Qui aurait pensé qu'un marchand ambulant impuissant ait pu "désarmer" un président à la tête d'un régime tyrannique ?