L'absence du président tunisien Kais Said aux grandes rencontres africaines soulève de grandes questions, notamment sa non-participation au 34e sommet - quoique virtuelle - de l'Union africaine début février, mais aussi au 33e sommet africain qui a eu lieu l'année dernière à Addis-Abeba. Ce manque d'implication a poussé ses détracteurs à dire qu'il n'est pas attaché à l'Afrique et qu'il opte à isoler la Tunisie de son continent. «Jeune Afrique» a indiqué dans son article "Kais Saied et l'Afrique, le grand malentendu?" que lors de ce récent sommet africain, deux questions principales étaient en jeu: Premièrement, la nomination de l'équipe de direction de la délégation africaine pour les quatre prochaines années. Et en deuxième lieu, les approvisionnements en vaccins sur le continent dans le cadre de la lutte contre Covid 19. Par ailleurs il ne faut pas oublier la polémique, fin 2020, sur les prétendues sanctions émises par l'Union africaine, qui auraient empêché la Tunisie de s'exprimer lors de ses réunions pour un période de six mois en raison du non-paiement de sa contribution de l'année dernière. C'est un manquement de la Tunisie envers ses obligations reconnu par le ministre des Affaires étrangères Othman Jerandi. 'Jeune Afrique' a poursuivi en disant qu'il semble que les amitiés africaines du président Habib Bourguiba, qui ont suivi l'indépendance, et son long voyage de plusieurs semaines en Afrique subsaharienne au sommet de l'unité africaine, ne sont rien de plus que des souvenirs fanés. La Tunisie a également participé activement à la mise en place de l'Organisation de l'unité africaine (en 1963), mais «depuis l'ère Ben Ali, la Tunisie a subi une régionalisation continue de sa diplomatie et s'est désintéressée de l'Afrique, selon la chercheuse Sophie Bessis. Ce processus s'est accéléré depuis 2011 en raison de l'ampleur des problèmes internes du pays. Au cours des 23 années de son règne, l'ancien président tunisien Ben Ali n'a participé qu'à un seul sommet de l'Organisation de l'unité africaine, accueilli par la Tunisie en 1994. Le Plan d'action de Ben Ali pour l'Afrique, adopté au milieu des années 2000, a permis de doubler le nombre des échanges économiques et commerciaux avec de nombreux pays d'Afrique subsaharienne, selon Bouzkari Ramli, ambassadeur de Tunisie en République démocratique du Congo. Jeune Afrique a poursuivi en expliquant qu'après la révolution tunisienne, le président tunisien Moncef Marzouki (2011-2014) a montré un réel intérêt pour le continent africain. Il a été actif en participant aux sommets de l'Union africaine en 2012, 2013 et 2014, avant de se lancer dans une tournée au Mali, au Niger, au Tchad et au Gabon à la tête d'une délégation de 90 hommes d'affaires. Par ailleurs, une étude approfondie sur la vision tunisienne du continent africain a été lancée à l'Institut tunisien d'études stratégiques, mais elle a été victime de désaccords de la part du pouvoir exécutif et de l'absence d'une simple traduction tangible de ses recommandations. Depuis la révolution, la Tunisie a eu du mal à relever la barre après des décennies d'orientation quasi exclusive vers la rive nord de la Méditerranée. Même si l'intégration avec le reste du continent était présentée comme l'une des priorités par le gouvernement Fakhfakh à moyen terme en janvier 2020, sous la rubrique «CAP AFRIQUE», l'instabilité politique et les fréquents changements de ministres des Affaires étrangères ont en quelque sorte endommagée ce projet. Certains reprochent également le manque d'envie, car «la Tunisie a raté une belle opportunité pour la politique d'influence subsaharienne en ayant le siège de la Banque africaine de développement sur son territoire de 2003 à 2014».