Je ne sais si le meeting du samedi 25 avril 2015 organisé par l'ex-président provisoire Moncef Marzouki, au Palais des congrès, à Tunis, pour son projet de ''7arak Chaab Al-Mouwatinine'' (Mouvement du peuple des citoyens) finira par constituer un vrai événement en Tunisie. Il n'en reste pas moins un fait d'actualité qui peut être commenté de différents points de vue. Disons-le d'emblée, de par son statut de citoyen tunisien, Marzouki est dans son plein droit à l'engagement politique et à la défense de ses idées, aussi incohérentes et fantasques qu'elles puissent paraître à ses adversaires qui, eux aussi, sont dans leur plein droit de critiquer ce mouvement et d'en souligner les dangers. C'est bien cela la démocratie et la Tunisie n'est pas prête à s'en détacher, quelles qu'en soient les aberrations conjoncturelles : la démocratie n'est-elle pas la moins mauvaise des régimes politiques ? Le meilleur doit être à chercher encore ! Je voudrais pour ma part donner un point de vue sur certaines questions soulevées par ce présumé « pré-événement » du 25 avril 2015. Précisons d'abord que depuis le lancement de l'idée, juste après l'échec électoral de 2014, ce mouvement annoncé n'a apporté aucun éclairage nouveau sur sa nature, sur ses statuts, sur sa dénomination même qui avait fait l'effet d'un slogan séparatiste divisant, arbitrairement ou idéologiquement, le peuple en citoyens (entendez les partisans de ce mouvement marzoukiste) et non-citoyens (ses adversaires). Il n'y aurait même pas de juste milieu pour les indépendants. Autrement dit : Avec moi ou tu meurs. Cela ne vous rappelle rien ? Combien plus souple paraîtrait l'ancien régime, sur le dénigrement duquel s'appuie Marzouki pour se faire valoir d'une quelconque cause, mais qui a permis, ce régime, à Marzouki et consorts de se faire valoir d'un certain héroïsme en tous points contraire à la citoyenneté responsable, au vu du plan de carrière de quelques-unes de ces personnes. Je ne parle pas ici de ce qui relèverait des données personnelles, je les respecte trop pour m'en mêler. Je parle des responsabilités citoyennes et professionnelles. A ce propos, Marzouki et son équipe, qui ont trop crié pour condamner les dépassements et manquements lors des dernières élections, savent-ils que les rapports de l'ISIE les classent au premier rang des auteurs de ces défaillances ? De quelle démocratie nous parle-t-on alors ? Maintenant, il importe aussi de savoir si la constitution d'un nouveau parti ou d'une nouvelle association, une nouvelle entité politique ou civile parmi tant d'autres, avait besoin d'une telle propagande. Au fait, dans quel cadre juridique agit-on en sa faveur ? A quel titre obtient-on l'autorisation de ces réunions et meetings ? et avec quel argent finance-t-on tout cela ? Venons-en maintenant à l'arrière-fond politique qui semble présider à l'initiation de ce mouvement. Il est clair que, contre toutes les tendances à la réconciliation nationale, le cap est mis sur des intentions belliqueuses de division du pays. Je n'en veux pour preuve que l'intention de Marzouki et des siens de remettre en question jusqu'à la proclamation de la République tunisienne. Au-delà des haines maladives et irrémédiables que Marzouki a pour Bourguiba (momentanément mises en veilleuse pendant sa présidence provisoire), c'est l'esprit républicain qui est visé, sans doute au profit d'autres structures étatiques plus adaptées aux intérêts des parrains du Harak. Ne serait-ce pas pour cela qu'il prévoit de lancer son Harak le jour même de la proclamation de la République ? S'il compte substituer un événement marginal à un autre, essentiel, il peut toujours rêver. Sa propre histoire en est la preuve implacable. En fait, avec de telles visées, c'est l'Histoire même de la Tunisie qu'on cherche à falsifier et c'est l'entité tunisienne qu'on cherche à nier. Pour cela, la machine politique et médiatique et, qui sait, militaire peut-être est bien en place et ses moteurs sont en train de chauffer. On le constate déjà. Pour le reste, il est trop tôt de se prononcer plus amplement. Mais la vigilance des Tunisiens, unis et solidaires, leur conscience de citoyenneté non manipulable et leur intelligence des vrais enjeux des acrobaties politiques, tout cela, et cela seul, leur permettra de demeurer le seul rempart fiable contre toute atteinte à l'intégrité de leur patrie.