L'UMA se débat, semble-t-il, suspendue à un fil qui menace de casser. Est-ce à dire que la tension est trop forte entre les bouts ou que le nœud est trop fragile pour une charge si pesante ? Née d'une amorce lancée en 1958, comme un rêve féérique, avant même la décolonisation des pays concernés, l'idée a vu sa concrétisation se mettre en place en 1988 à Zeralda (Algérie) et son acte de naissance parapher en 1989 à Marrakech, comme un pont difficilement praticable, mais porteur d'espoir. Le défi est donc relevé avec un scepticisme réaliste du roi Hassen II, un engagement conciliateur de Chadli Bendjedid, un optimisme trop flagrant de Ben Ali, un calcul attentiste de Maamer Kadhafi et un semblant de neutralité passive de Maaouiya Ould Taya. Lors du mandat de son premier Secrétaire général, Mohamed Amamou (ce poste revenant à la Tunisie), l'union essaie de s'activer, tient six sommets, adopte des conventions, bref elle manifeste un état de vie qui semble correspondre à l'étape de sa prime enfance. Mais en 1995, c'est la panne, avec la crise algéro-marocaine. Habib Boularès succède à Amamou en février 2002, mais il est exaspéré et s'en va en février 2006, après la prorogation de son mandat d'une année supplémentaire. C'est son compatriote Habib Ben Yahia qui lui succède avec pour objectif la résurrection, dirait-on, plutôt que la réanimation de l'UMA. Peine perdue, lui aussi ne pourra rien, si bien qu'en 2014, à la mort des deux premiers secrétaires généraux de l'UMA, on se demandait s'il ne fallait pas en même temps pleurer l'organisme. Même le petit vent du « printemps arabe » n'aura provoqué que quelques gesticulations, plus pour le spectacle politique que pour l'efficacité d'une structure géostratégique pourvue des meilleures conditions objectives du succès et affichant l'échec le plus lamentable dans son genre. On découvre vite que l'intérêt porté à l'UMA par les nouveaux politiques en Tunisie n'est que manigance pour un marchandage politique interne, fixé sur une supposée fin de mandat de Habib Ben Yahia et sur l'opportunité de mettre son poste aux enchères des récompenses ou des alliances. On a donc vu Moncef Marzouki le prévoir pour son porte-voix et son inconditionnel Adnen Mansar, Mustapha Ben Jaafer devant à l'époque se rabattre sur un éventuel poste d'ambassadeur à Paris, si son ami François Hollande acceptait de se mouiller encore pour lui. On a lu aussi, à travers des rumeurs insistantes dont on ignorait la source précise, que Béji Caïd Essebsi, en pleine course pour la présidence, aurait envisagé ce poste pour Kamel Morjane si celui-ci se retirait de la course et se ralliait à lui. Mais en ce temps-là, tiraillé entre plus d'une force d'attraction, K. Morjane semblait mettre longtemps pour comprendre et, peut-être, assez peu de perspicacité pour se décider. Bref, rien n'est encore fait pour remplacer Habib Ben Yahia. – Mais qui vous dit que l'on doive me remplacer ? interrogerait malicieusement l'actuel SG de l'UMA. Et le voici, apprend-on de source sûre, en train de s'affairer à préparer un sommet maghrébin des ministres de la Culture. Son document de travail, élaboré par un ancien haut responsable du secteur en Tunisie, serait déjà fin prêt. Est-ce sa façon à lui de travailler dans ce monde comme s'il vivait toujours, ou sa manière à lui de ((se) rire ironiquement de ceux qui sont pressés de prendre leurs rêves pour des réalités ? Un avenir proche nous le dirait.