Le nerf des affaires serait donc la Pub'. Cela n'a rien de l'affirmation gratuite. Les publicitaires ont l'argument qui fait tilt. Un annonceur qui engage un budget publicitaire cherche à pousser à la consommation. En allumant le consommateur, il marque, dans le même temps, sa confiance dans la conjoncture du moment et de son trend croissant. Cela n'a rien d'un pari fou. On peut penser que les publicitaires ont une attitude bluffante quand ils se positionnent en catalyseurs de l'activité économique. Il doit bien y avoir une part de provoc' dans ce comportement. Après tout, le marché sourit à la Pub'. Et la profession affiche un moral d'enfer ou presque. L'on ne doit pas s'étonner non plus de ce que les publicitaires défendent leur business. Quoi de plus naturel. Il faut cependant reconnaître qu'à y regarder de près, leur argumentaire ne manque pas de cohérence. Lors du dixième Open de Sigma Groupe, son DG, Hassen Zargouni, est revenu à la charge affirmant que la Pub' est bien le marqueur de la conjoncture. Elle donne le pouls de l'économie car c'est le signal de confiance des annonceurs dans l'avenir. Qu'on se le dise bien, la Pub' a pour but ultime de décider le consommateur à acheter. Or ce dernier n'achète que lorsqu'il se sent en confiance. Donc le moral de la profession devrait, en bonne logique, nous informer sur la vigueur de la croissance dans le pays. Physionomie de la consommation en Tunisie Le Tunisien, en tant que homo economicus, est assez déroutant. Les sondages de Sigma, opérés avant l'arrivée du gouvernement de Mehdi Jomaa, révèlent que 55% des Tunisiens considèrent que l'année 2013 a été moins bonne, pour leur foyer, que 2012. Plus de 70% pensent que le pays va dans une mauvaise direction. Cependant, envers et contre toute attente, 62% croient ferme que l'avenir des nouvelles générations sera meilleur. Ce pourcentage est de 41% en Algérie et 48% au Maroc. C'est cet optimisme paradoxal, trait d'exception tunisienne, qui pousse les annonceurs à faire feu de tout bois. Et en effet, après le coup de froid de 2011, la pub' revient au devant de la scène. La profession n'est pas totalement rétablie car elle n'a pas encore retrouvé son chiffre d'affaires de 2010, mais elle reflambe. La créativité se porte bien et les budgets se musclent. Est-ce qu'on peut y déceler un quelconque bourgeonnement économique? Un investissement publicitaire encore modeste Il ne faut pas se précipiter à conclure que du moment que la Pub' repart le pays s'en sort bien. Il faut savoir que l'investissement publicitaire en Tunisie n'est pas à son comble. Un simple benchmarking international nous ramènerait à notre coquette et juste dimension. Le chiffre d'affaires global de la profession dans le monde se monte à 500 milliards de dollars US en 2013. Par sa taille, il atteint celui du tourisme, c'est dire le poids économique du métier. Bien entendu les Etats-Unis d'Amérique se taillent la part du lion en occupant la première marche. Ils sont suivis par, tenez-vous bien, la Chine puis le Japon, ceci pour le peloton de tête. Mais c'est au niveau du quotient par habitant que l'on tombe sur de précieuses pépites. En Suisse, les dépenses publicitaires par tête d'habitant sont de 730 dollars US. Elles sont de 45 dollars en Turquie et 48 au Maroc contre seulement 8 pour la Tunisie. Parmi les grandes économies, l'Inde seule fait moins bien que nous avec 5 dollars. Nous nous trouvons distancés, au multiple, par rapport à nos compétiteurs dans la région. On a encore du chemin à faire. La créativité, ressort de combattivité de la profession L'âge d'or de la publicité dans le pays est devant nous et c'est bon signe. Ce qui est encore plus rassurant est que la Pub', lésée par des budgets serrés, trouve un ressort de croissance dans son élan remarquable de créativité. C'est un sérieux enzyme de vivacité pour le métier et le concept est de Hassen Zargouni. En effet, contre mauvaise fortune, la Pub' se défend par sa percée de créativité. Les spots sont là pour le prouver. Comprenez que le plus important dans le passage du spot c'est le share of mind, soit l'audience mémorielle''. Le spot ou le message doit marquer les esprits et c'est bien ce qui détermine le media planning pour les annonceurs. Plus le media est captif d'audience plus il fait de chiffre, c'est trivial. Et par conséquent, comme signe de vitalité, il n'y pas plus probant que cette fièvre de créativité. C'est bon pour l'économie et c'est salutaire pour la presse, notamment. De même que le rappelle Hassen Zargouni, les recettes publicitaires protègent la presse de la prédation en tous genres. La Pub' est source de jouvence mais aussi gage d'indépendance pour la presse. Il reste que si elle procure du cash aux médias, en général, elle avantage certains canaux parmi d'autres. La télé est l'un de ses favoris et cela, hélas, se fait au détriment de la presse écrite. Elle fait la part belle cependant à la presse électronique.