Une dette de 25 MDT, aux dernières nouvelles d'une source financière généralement bien informée. Des ventes de biens immobiliers, personnels et appartenant à la société, qui n'ont pas suffit à faire face aux créanciers. Une maladie qui l'aurait obligé à quitter le pays. Une succession de saisies conservatoires qui touchent fonds de commerce et investissements en actions. Des banques qui lui auraient refusé l'abri de la loi sur les entreprises en difficulté. Un mélange explosif pour la seconde des entreprises qui font du crédit à la consommation. Il y a plus d'une année, dans un article titré « Warning, secteur fortement endetté », on attirait l'attention sur la fragile santé du secteur de distribution des produits de l'électroménager. Notre article s'adossait alors à une note, en date du mois de février 2003, de la BCT sur les engagements du secteur. On se serait alors attendu à ce que le secteur soit mis sous étroite surveillance par les banques auprès desquelles il a 92% de ses engagements qui se montaient alors, à fin octobre 2002, à 247 MDT, (contre 236 en décembre de l'année 2001).
La note de la BCT avait pourtant été adressée à toutes les institutions financières. Aucun signal d'alarme ne semble pourtant avoir été tiré, aucune mesure ne semble avoir été prise pour essayer de circonscrire la chute du second distributeur d'électroménager, après Batam. Un endettement de 25 MDT La chute de l'enseigne Electrokallel (E.K) n'est devenue effective que depuis un mois, tout au plus. Elle était pourtant sur toutes les lèvres, au moins depuis décembre dernier. Nous-nous sommes laissé dire qu'une première correspondance serait arrivée, au sujet de cette entreprise, au bureau qui s'occupe, au sein du ministère de l'Industrie, des entreprises en difficultés économiques. Ledit bureau aurait pris acte de cette première alerte, sans pour autant pouvoir « bouger », car la loi avait changé depuis le 29 décembre 2003, et il aurait peut-être fallu un autre courrier du Commissaire aux comptes pour que cette affaire prenne une autre tournure ! Déjà, en avril 2003, le nom de ce groupe apparaissait sur la fameuse « liste des 127 ». Il n'y était pas assez « bien placé », puisqu'il n'y occupe que la 90ème place, loin après un autre groupe, lui aussi du domaine de la distribution des produits électroménagers. En octobre 2002, les engagements d'E.K se montaient à 19 MDT. Six mois plus tard et encore selon la liste, ces engagements étaient de 21,4 MDT. Actuellement, selon des sources financières sûres et bien informées, l'endettement de cette société à caractère familial et ne disposant pas du patrimoine suffisant à la couverture de ses risques, serait de 25 MDT. En face, l'entreprise, d'un capital de 1,3 MDT après deux augmentations successives, réaliserait sur ses 8 magasins un chiffre d'affaires de 20 à 30 MDT, mais avec une marge trop petite de 1,5% et des charges de personnel d'au moins 1,8 MDT. On se demande alors comment elle a pu tenir pendant plus de 15 ans. L'explication résiderait peut-être dans ce système qui fait qu'elle, comme le reste des entreprises du même secteur, vende à tempérament sur 36 mois au moins ce qu'elle achète de ses fournisseurs sur pas plus de 18 mois. Un système où l'argent circule beaucoup. Un circuit qui peut fausser les calculs. La tempête des saisies, mais pas de solution Comme on l'avait dit plus haut, l'affaire Electrokallel aurait commencé à péricliter depuis le dernier trimestre de l'année 2003. Des tentatives auraient été entamées, comme nous l'avait confirmé le management d'Electrostar, pour une entrée dans le capital de la société, à la manière de Batam, des deux principaux créditeurs que sont les industriels ABS (Atef Ben Slimane) et Electrostar (Fethi Hachicha) par capitalisation de leurs dettes. On sait qu'Electrokallel est débiteur de 1 MDT auprès d'Electrostar. On ne sait rien de sa dette auprès d'ABS, mais on suppose qu'elle ne devrait pas être loin de celle de son concurrent. A l'image du ratio d'endettement du secteur dont 92% des dettes sont auprès des banques, le plus gros des dettes d'Electrokallel devrait être auprès de celles-ci. Selon des documents de la BCT, la première banque créditrice et chef de son pool bancaire aussi, c'est la BT (Banque de Tunisie). A la sortie de la liste des 121, l'engagement d'E.K auprès de la BT était de 7,4 MDT. La seconde banque créditrice est l'Amen Bank pour un montant de 6,1 MDT en avril 2003. Ce serait ce secteur, celui des banques qui aurait refusé, dans un premier temps, de faire passer E.K sous le parapluie de la loi relative aux entreprises en difficultés. Depuis, et avec le voyage (pour maladie, confie sa famille à des sources proches d'elle) de Kheireddine Kallel et, avant cela, le fait qu'il ait vendu un certain nombre de ses biens mobiliers et immobiliers (pour faire face à quelques uns de ses créanciers, soutiennent les mêmes sources), ont vite fait porter la panique vers ses créanciers. Certains d'entre eux auraient fait appel à la Justice et obtenu des saisies conservatoires et des saisies exécutives sur certains biens et même sur son portefeuille d'actions. Des actions qui, avec l'absence du gérant, ne facilitent pas la solution. Attention au reste Tout ceci étant dit, il est important de noter que la chute d'E.K ne fait que fragiliser encore plus un secteur qui est pourtant indispensable à la chaîne commerciale (producteur, distributeur, consommateur). Elle rend aussi encore plus indispensable le traitement urgent de la question du crédit à la consommation. Jusqu'ici, les deux qui s'y sont frottés, y ont laissé (et pas uniquement elles seules) des plumes. Le commerce de distribution d'électroménager comporte, selon une note de la BCT, 448 entreprises commerciales. Déjà, à fin octobre 2002, l'engagement de ce secteur était de 247 MDT. 59 des sociétés concernées, avaient des engagements individuels dépassant les 300 mille DT. L'intégrale de ces 59 sociétés représente un engagement total de 208 MDT à fin octobre 2002, contre 159 une année auparavant. 6 entreprises seulement concentrent 72 % des engagements du groupe des 59 sociétés et 60 % des engagements de tout le secteur du commerce en électroménager. A côté de Batam, un ensemble de 5 des plus grandes entreprises de distribution de l'électroménager. A elles seules, ces 5 entreprises totalisaient 43 MDT d'engagements. Quelques mois plus tard, cependant, c'est-à-dire en avril 2003, les deux plus grands (EK et les établissements HBA) avaient des engagements de plus de 62,6 MDT. Une croissance de plus de 19 MDT, seulement en l'espace de 6 mois. Déjà, en octobre 2002, 42,5% des dettes de tout le groupe des 59 correspondaient à des crédits de gestion et 31,5 % à de l'escompte commercial. Avec la crise née des difficultés des industriels de l'électroménager, elles ne doivent pas s'être améliorées. Tel qu'exercé par ces entreprises, qui ne sont pas des spécialistes en la matière, le crédit à la consommation ne semble pas réussir au secteur de l'électroménager. Au contraire ! Les banques vont-elles continuer à ignorer cette activité et à financer les sociétés commerciales, pour l'exercer à leur place et « se faire ainsi tirer les marrons du feu » ? Les autorités financières vont elles encore attendre une autre chute d'un autre maillon de cette chaîne de distribution de l'électroménager pour légiférer et réglementer en la matière ?