Le groupe émirati Bukhatir, promoteur de "Tunis Sports City", mégaprojet à vocation, en principe, sportive, a commencé la commercialisation, à depuis le 10 juillet 2009, la composante "Cedar", un ensemble résidentiel. L'événement ne manque pas d'enjeux pour «Messieurs mégaprojets» et «Messieurs investissements directs étrangers (IDE)». En cette période de crise, il s'agit d'un effet d'annonce fort positif en ce sens où il peut avoir un effet d'entraînement sur les autres investisseurs. Au regard des prix, 3.500 dinars le mètre carré pour les villas et 2.500 dinars le mètre carré pour les appartements, la cité «Cedar», qui s'étend sur 13 hectares, n'est pas destinée, logiquement, à des clients locaux, du moins pour le Tunisien moyen. Espérons que ces prix ne «doperont» pas les prix locaux qui sont déjà assez élevés. Cedar, pour ceux qui ne le savent pas, est un cocktail de villas luxueuses de superficies diverses, d'un village résidentiel "Chikli" et de tours résidentielles. L'ensemble des résidences ont une vue panoramique sur le terrain de golf et les parcours aquatiques qui y sont aménagés. C'est pour dire que lors du Show room, l'accent a été mis beaucoup sur la vocation résidentielle de Tunis Sports city que sur son volet sportif. Seul le golf est valorisé au maximum. Par delà la beauté du site, même si l'ancien bois sur lequel est érigé la nouvelle cité était aussi beau, on ne peut pas s'empêcher d'avoir un pincement au cur en constatant que c'est toujours l'étranger ou presque- qui réussit là où nous avons tendance à échouer. A mon avis, c'est quoi Tunis Sports City ? C'est un espace vert (le golf) autour duquel le promoteur va créer des résidences et des installations sportives. Si on pousse le curseur au centre de Tunis, les Tunisois des années soixante, soixante-dix et même quatre-vingt, disposaient, au moindre coût, de tous ses équipements collectifs. Pour un locataire de la rue de Londres ou de Ghana (70 dinars par mois), il disposait de deux jardins publics à quelques dizaines de mètres de sa résidence, le jardin public Habib Thameur et celui de John Kennedy. A un kilomètre au nord, il pouvait décompresser au belvédère et se détendre à la cité sportive d'El Menzah. C'était la belle époque. Maintenant, si on regarde du côté des nouvelles excroissances urbaines, les cités El Manar, El Menzah et les tentaculaires quartiers d'Ennasser et des Jardins d'El Menzah, sans parler des quartiers populaires (Douar Hicher, Cité Ettadhamen et autres), ces ghettos brillent par l'absence de parcs publics. Dans ces déserts d'hommes où personne ne connaît personne, les caves et sous-sols sont convertis, au grand déni de tout bon goût et de tout bon sens, en restaurants. Les lotisseurs, publics ou privés, étaient loin d'être écolos. Ils ont tout bétonné. C'est pourquoi, le bon sens exige une sérieuse réflexion sur la composante environnementale du Grand Tunis dans dix ans. La pression est déjà visible sur la banlieue nord de Tunis. Elle le sera encore plus, une fois ces nouvelles villes de plus d'un million d'habitants seront édifiées. L'ambition de faire de Tunis une grande métropole pouvant rivaliser avec Marseille, Rome ou Barcelone est peut-être légitime, mais il faut avoir les moyens de le faire, et surtout, faire preuve d'une grande imagination. On l'aura dit.