Nous ne sommes pas encore à mi-saison, et l'on entend par-ci par-là les habituelles lamentations. Les clubs «professionnels», et nous insistons sur les guillemets, sont déjà à bout de souffle. Des présidents menacent de démissionner, d'autres sont engloutis dans la gestion d'une «affaire» dont ils ne maîtrisent absolument plus rien, d'autres encore se font prier pour embarquer sur le radeau, entendez clubs, qui prend eau de toute part, alors qu'ils voient leurs pairs menacés de prison pour avoir émis des chèques sans provisions. Et l'on ose parler de gestion ! Si nos souvenirs sont bons, nous ne gérons que ce que nous possédons ou ce que nous sommes en mesure de ramener en fonction de données soigneusement établies et de moyens réellement en notre possession. Le fait de faire précéder tous les postes recettes de «si», qui n'engagent que ceux qui les émettent, n'a rien à voir avec la gestion. En mars 2013, le ministre de la Jeunesse et des Sports de l'époque a eu l'idée lumineuse de proposer la transformation des clubs professionnels tunisiens en sociétés à objet sportif, à l'image de ce qui existe en France. C'était une bonne idée mais il lui fallait des hommes capables de lui présenter un dossier aussi complet que réaliste. Ses «conseillers» ont pris en toute naïveté les statuts français, les ont dépecés pour sortir un règlement qui aurait pu être une bombe à retardement. La Presse s'était empressée de tirer la sonnette d'alarme (édition du 6 mars 2013), tout en publiant les textes français initiaux, faisant valoir que cette initiative allait encore enfoncer nos clubs professionnels et non pas les sauver. Ce fut le coup d'arrêt. Depuis plus rien. La FTF semble se suffire de la gestion des calendriers et de veiller aux agissements des publics. La situation des clubs adhérents fait-elle partie de ses préoccupations ? Un football, des clubs qui s'enfoncent dans le marasme financier, constituent-ils une source d'ennui pour ceux qui veillent sur le sport national ? Il faut bien que quelqu'un réponde. Ce sera dans doute dans quelques semaines... En attendant, cela ne nous empêche pas (et cela ne va pas plaire à ceux qui confondent professionnalisme et sports de loisir) de soutenir que cela doit changer. On ne gère pas un club avec des promesses et des prévisions. On ne peut prétendre la prise en main d'un club professionnel avec des promesses plein les poches et non un programme d'action, des moyens financiers réellement conséquents, une infrastructure fonctionnelle et des hommes qui en connaissent un bout au point de vue gestion. On ne peut prétendre que les moyens financiers proviennent des seuls dons et subventions et se suffire de chevaucher ses rêves tout en préparant sa boîte de kleenex pour pleurnicher misère. On ne peut se permettre de créer un club professionnel sur un coup de tête ou pour se faire plaisir alors que les conditions sociales, financières et économiques de la région, ou du pays, ne le permettent pas. On ne peut permettre à des clubs qui s'enfoncent de jour en jour dans les dettes de continuer à opérer et à en engager de nouvelles au risque de sombrer définitivement. La tutelle et la fédération sont responsables de cette situation, rien que pour ne pas avoir appliqué la réglementation en vigueur (la réglementation régissant la viabilité des clubs) ou pour avoir mal contrôlé les gestions des uns et des autres. Il faut absolument revenir à la réalité. Il nous semble qu'il faudrait trancher dans le vif, tracer la voie de reprise en main à suivre et donner aux clubs concernés un délai de remise à niveau. Cela fera mal, mais ceux qui vivront le feront de manière décente. Si un club n'a pas les moyens d'être professionnel, il n'y a aucune honte pour rester amateur, former, encadrer les jeunes et remplir sa mission éducative. Si une région est incapable de posséder deux ou trois équipes professionnelles il vaudrait mieux unir les efforts et mettre en place une seule équipe dont la gestion sera plus aisée et réellement efficace, pour la ville tant du point de vue image que résultats. Si les installations (encore un problème de taille) ne s'y prêtent pas, il est inconcevable de se lancer dans l'inconnu pour s'astreindre à des déplacements sans fin et coûteux. On oublie souvent que les recettes font partie des moyens sur lesquels s'appuient les clubs. Aujourd'hui, on se contente effrontément d'envier ceux qui possèdent des ressources financières au lieu d'évoluer, d'inciter ceux qui ne sont là que pour se confectionner une image de marque sur le dos d'une équipe, à créer des richesses et d'arrêter de se lamenter ou de céder leur place. Le sport professionnel a ses exigences Tout homme sensé en est convaincu. Mais malheureusement, notre façon d'agir met en danger non pas seulement le football mais bien tout notre sport national. En effet, avec des équipes de professionnels qui vivent à crédit, et qui pompent tous les revenus de l'association, les autres sections sont menacées d'extinction. Dans ces conditions qui peut oser parler de formation, de jeunes et d'avenir ?