Les avocats ont entamé, ce vendredi 16 octobre 2020, la grève décrétée il y a quelques jours par l'Ordre national des avocats de Tunisie (Onat). Leur mouvement de protestation a démarré par un rassemblement devant le Tribunal de première instance de Tunis suivi par une marche vers le palais de la Kasbah. Des dizaines d'avocats de sont ainsi rassemblés en portant leur robes noires et leurs masques, avec, à leur tête, leur bâtonnier Brahim Bouderbala. Ils ont scandé des slogans comme : "Pour une justice indépendante non soumise et non partialle", "Non aux pressions sécuritaires", "la profession d'avocat est libre", etc.
Via ces actions, les avocats ont voulu exprimer leur colère, a expliqué M. Bouderbala dans son speech, en soutenant qu'il respecte l'institution sécuritaire mais qu'il veut défendre des principes. Pour lui, ce qui s'est passé en août dernier était un incident isolé, mais ce qui s'est passé au Tribunal de première instance de Ben Arous était de l'intimidation pure. Et de marteler que « chaque partie doit prendre ses responsabilités. Nous croyons en un Etat et une justice indépendants », en affirmant, dans ce cadre, que l'ordre ne remet pas en cause la décision du juge d'instruction mais veut tout simplement défendre les procédures. « Nous voulons rendre la dignité à notre consœur (l'avocate agressée Nesrine Gorneh dans un poste de police, ndlr) et à la profession d'avocat », a-t-il souligné.
Plusieurs autres avocats ont également pris la parole pour dire qu'ils veulent couper avec plusieurs pratiques notamment « d'échapper aux sanctions » et « d'instaurer un Etat policier ». Ils ont tous soutenu qu'ils ne sont pas contre les sécuritaires mais contre des syndicats de plus en plus corporatistes au dépend de la justice, des droits et des citoyens. L'un d'eux a assuré que le Conseil supérieur de la magistrature aller se réunir aujourd'hui, juste pour publier un communiqué condamnant les avocats, alors que leur mouvement vise en premier lieu l'indépendance de la justice et des magistrats.
Rappelons que l'avocate Nesrine Gorneh a été victime, en août dernier, d'une agression dans un poste de police par des policiers alors qu'elle était en train d'assister son client lors d'un interrogatoire. Ces accusations ont été démenties deux jours plus tard par le secrétaire général du syndicat des forces de sécurité à Ben Arous, Mourad Ben Rabah. Le bâtonnier de l'Ordre des avocats a, lui, assuré que l'avocate avait été agressée, séquestrée et son téléphone portable confisqué.