La Tunisie est en pleine crise sanitaire, la présidence de la République multiplie les SOS pour des aides internationales, la présidence du gouvernement mène une lutte sur tous les fronts pour contrer le virus et le Parlement agit comme s'il appartenait à une autre planète. C'est vraiment surréaliste ce qui se passe au palais du Bardo où les députés islamistes de la majorité font ce qu'ils veulent allant jusqu'à ne pas respecter leurs propres décisions.
Tout est fait pour tendre l'atmosphère et empêcher le déroulement normal des travaux. Cela n'a rien de nouveau, on témoigne de ce cirque depuis le début de cette législature que préside Rached Ghannouchi. Bien qu'il soit alité et hospitalisé, l'islamiste continue à mener le jeu et à dicter ses décisions à sa vice-présidente Samira Chaouachi, qui lui obéit au doigt et à l'œil et fait preuve d'un extraordinaire laxisme dans l'application du règlement intérieur. L'opposition a beau crier au scandale tous les jours, rien n'y fait, Mme Chaouachi poursuit sa mission comme si de rien n'était. Lundi dernier, la présidence du Parlement a pris la décision à la dernière minute de décontaminer le palais du Bardo et donc de déplacer les travaux au second bâtiment. Sauf que les députés n'ont pas été informés de cette décision, ni la Télévision. Résultat, peu de députés étaient présents et la Télévision n'a pas pu diffuser en direct les débats relatifs à la loi de la relance économique. Dans la foulée, on a zappé superbement l'audition de la ministre de la Justice Hasna Ben Slimane, sans alerter quiconque, alors qu'elle était bien attendue par les députés pour répondre à des sujets brûlants, notamment ceux relatifs aux deux magistrats controversés Taïeb Rached et Béchir Akremi. Nabil Hajji, député de l'opposition, a affirmé que la plénière comporte plusieurs transgressions au règlement intérieur de l'ARP. « L'ARP s'est transformée en la ferme de Rached Ghannouchi et de son pare-choc ! », a-t-il déploré. D'un ton sarcastique, le député a proposé de fournir une procuration à Rached Ghannouchi pour qu'il puisse voter au nom de l'ensemble des députés. Samia Abbou et Mongi Rahoui, tous deux députés de l'opposition, ont beau crier au scandale, chahuter, attirer l'attention de tout le monde sur cette violation flagrante du règlement intérieur, rien n'y fait, Samira Chaouachi a suivi son ordre du jour à la lettre. Au moment du passage au vote, la députée de l'opposition Abir Moussi relève une fraude en direct avec la participation à distance de l'élu islamiste radical et fugitif Rached Khiari qui a donné sa voix alors que le vote n'a même pas encore été ouvert. Elle a beau crier au scandale et présenter la preuve, rien n'y fait.
Last but not least, le même jour, la vice-présidente propose de faire voter des mesures exceptionnelles, sans livrer aux députés un quelconque document. Le vote eut lieu mardi. Mercredi, c'est le pompon. Les mesures exceptionnelles votées la veille exigent que les députés ne se penchent que sur les lois relatives au covid et à la situation sanitaire du pays. C'est, après tout, la priorité des Tunisiens. Mais ce n'est pas l'avis de Samira Chaouachi qui a imposé, avec succès, la discussion d'un projet de loi relatif aux eaux. Quelle est l'urgence ? Seule la présidence du Parlement le sait. C'est en relevant ce passage en force et en filmant en direct la transgression flagrante des décisions prises la veille, que Abir Moussi fut, une nouvelle fois, agressée. Cette fois-ci, c'est l'élue sfaxienne d'Ennahdha, Faïza Bouhlel, qui a été missionnée pour s'attaquer à Mme Moussi et ce en lui arrachant des mains son portable avec lequel elle filmait en direct le scandale. Les députés de l'opposition ont beau crier au scandale et le fait que les députés soient préoccupés par des sujets non urgents pour les Tunisiens, Samira Chaouachi a imposé la poursuite des travaux normalement. Pendant ce temps-là, les Tunisiens continuent de mourir (194 avant-hier) par le covid, et le pays continue à réceptionner des aides de partout.
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