Le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), Youssef Bouzakher, a considéré que la substitution de l'institution par un conseil provisoire était une simple manœuvre politique. Il a considéré la décision du président comme étant un signe de l'arrêt de l'application de la Constitution de 2014. Dans une interview accordée le 10 février 2022 à Al Jazeera, Youssef Bouzakher a affirmé que le conseil provisoire sera à la botte du pouvoir en place. Il s'est interrogé sur la procédure envisagée pour la nomination des membres du nouveau conseil. Il a rappelé que le CSM comportait des représentants des magistrats judiciaires et administratifs, ainsi que des membres de la Cour des comptes. Youssef Bouzakher a, également, estimé que la décision de dissolution du CSM résulte de l'avis publié par le conseil au sujet du projet de loi de la réconciliation. « Nous ne sommes pas tenus d'approuver tous les projets de loi. Nous avions déjà refusé d'autres projets de loi tels que le texte relatif à la Cour constitutionnelle… Nous avons, également, déposé plainte en raison de l'absence de fondements juridiques relatifs à cette décision », a-t-il ajouté. Réagissant à la déclaration du ministère des Affaires étrangères, Othman Jerandi, affirmant que la dissolution du CSM s'inscrivait dans le cadre d'un processus de transition, Youssef Bouzakher s'est interrogé sur le caractère démocratique d'une telle décision. Pour ce qui est du président de l'ordre national des avocats, Brahim Bouderbala, Bouzakher a considéré que ce dernier cherchait à être nommé au sein du CSM. « Il avait exprimé son refus à la dissolution du CSM. Ceci est inscrit dans nos p.v », a-t-il ajouté. Youssef Bouzakher a, aussi, affirmé qu'une réforme ne pouvait avoir lieu qu'à travers un processus participatif et incluant le pouvoir législatif. « Nous avions appelé à la révision de la loi réglementant le pouvoir judiciaire ! Nous n'avions pas eu de réponse en raison de l'absence de volonté politique à ce sujet… Nous avions envoyé, en 2020, un projet de loi à l'Assemblée des représentants du peuple…. Le CSM a insisté sur l'indépendance de la justice… Nous avions transféré le dossier de Béchir Akremi au ministère public et nous n'avions pas refusé la levée de l'immunité », a-t-il déclaré. M. Bouzakher a rappelé que les campagnes d'incitation à l'encontre des magistrats et de division des citoyens orchestrées par plusieurs pages Facebook et encouragées par les discours du chef de l'Etat mettaient en péril l'intégrité physique des juges. « J'ai été informé par la brigade de lutte contre le terrorisme relevant du ministère de l'Intérieur que je représentais une cible potentielle. Je tiens le pouvoir exécutif pour responsable de toutes atteintes à mon intégrité physique ou à celles visant d'autres magistrats », lit-on dans la même déclaration.