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Kaïs Saïed, rédacteur en chef de Business News et Mosaïque FM
Publié dans Business News le 14 - 02 - 2022

Cela fait vingt jours que le président de République n'a pas de chef de cabinet et plus de quinze mois qu'il n'a pas de directeur de communication. N'en déplaise aux critiques et jaloux de tous bords, ceci est un exploit. Aucun président au monde ne peut se passer, autant de temps, de ces deux directeurs qui représentent le cœur même de tout département de l'Etat. Chez nous, le président n'en voit pas trop l'utilité, visiblement… Il les remplace allègrement. Il est capable de tout faire 24h/24, 7j/7 et 365j/an. Kaïs Saïed est un surhomme. Le Superman de son époque. Devant lui, les Khaled Ibn El Walid, Napoléon, Montesquieu et Ibn Khaldoun peuvent aller se rhabiller. A se demander d'ailleurs pourquoi Hollywood et Netflix ne se sont pas encore intéressés à lui. Ils doivent être bien jaloux les Américains. A moins que les Yankees de Washington ne leur aient demandé de ne pas relayer les exploits du président tunisien, question de ne pas donner des idées à certains, comme Donald Trump.
Samedi 12 février, un peu après minuit, Kaïs Saïed reçoit sa cheffe du gouvernement, venue directement de l'aéroport arrivant de Brest, et la ministre de la Justice. Il leur soumet le décret du nouveau Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Un conseil provisoire, précise-t-on.
Samedi 5 février, un peu après minuit, Kaïs Saïed est allé au ministère de l'Intérieur d'où il a annoncé la dissolution de l'ancien CSM. Ça a créé quelques vagues ici et là, mais rien de méchant. Juste que le G7, les Européens et le haut comité des Droits de l'Homme des Nations-Unies sont inquiets. Mais ils sont toujours inquiets, les Occidentaux, comme l'a dit le président. Qu'ils s'inquiètent plutôt du sort de l'Ukraine qui risque de leur échapper et de revenir dans le giron de l'empire soviétique ! Russe, plutôt.
Quel est le secret de travailler et de prendre des décisions stratégiques, samedi après minuit ? On ne sait pas trop. Il y a certainement un secret à cela, mais il dépasse les simples chroniqueurs mortels que nous sommes. Quand les faits politiques sont d'un niveau si élevé, il faudrait l'analyse d'un Jean Daniel ou d'une Françoise Giroud pour comprendre. Paix à leurs âmes. Maintenant qu'ils sont partis dans l'au-delà, il n'y a plus personne de suffisamment intelligent sur terre pour nous expliquer les actes du président tunisien Kaïs Saïed.

Après s'être arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet dernier, le président de la République a fait main basse sur le CSM samedi 12 février. Il a pondu un décret annonçant la création d'un CSM provisoire duquel il a éjecté tous les membres qui ne sont pas juges. Le bâtonnier, qui avait huit avocats dans l'ancien CSM, peut aller se rhabiller. Ses courtisaneries toute la semaine n'ont servi à rien. C'est le sort, d'ailleurs, de tous les courtisans. Le président les jette à la poubelle comme des Kleenex, une fois qu'il s'en est servi. Regardez où en est Nadia Akacha (interdite de voyage), ancienne cheffe de cabinet et Rachida Ennaïfer (méprisée partout), ancienne directrice de la communication.
Dans le nouveau CSM, le président s'est réservé une place de choix. Son nom est cité quatorze fois ! Il a désormais la latitude de désigner, de limoger, de muter, de promouvoir et de dégrader n'importe quel magistrat. Il a même décidé que son décret serait supérieur aux lois et à la Constitution du pays et que les personnes qu'il va nommer ont plus de légitimité que celles qui ont été élues à leur poste. La classe ! Pinochet, Castro, Ben Ali, Jong-Un, Husseïn (Saddam), Al Assad (père et fils) ou Bourguiba se sont avérés de piètres présidents devant Saïed.
Il faudrait peut-être revenir à l'époque médiévale pour trouver un chef ayant autant de prérogatives. Je vous le dis, notre président est hors-pair ! Je vous le redis, un Superman de son temps.

Les faits, rien que les faits. Concrètement, le président a le pouvoir législatif, exécutif et judiciaire entre les mains. Il a la latitude d'assainir l'administration, la justice, l'économie et la société tunisiennes. Le fera-t-il ? Mais bien sûr qu'il le fera ! Vous avez un doute ?
Au-delà des pouvoirs ordinaires et extraordinaires que pourrait avoir un président de la République, Kaïs Saïed a fait main basse sur l'Instance nationale de lutte contre la corruption. Qu'est-ce qui lui reste à prendre qu'il n'a pas pris ? L'Instance supérieure indépendante des élections et la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle. Le président l'a dit à maintes reprises, il ne peut pas y avoir de pouvoirs indépendants de l'Etat. Il n'y a que des fonctions. Partant, l'Isie et la Haica devraient être dissoutes à leur tour pour être remplacées par des instances provisoires réglementées par des décrets où l'on cite le président quatorze fois, au moins.
Et après ? Qu'y a-t-il à prendre ? Après, il y a le privé. Ah ces privés ! C'est des cupides-nés. Le président a promis d'en finir avec tous ces spéculateurs qui affament le peuple tunisien. La semaine dernière, on a fait des descentes policières sur des dizaines d'entrepôts. Il a juste suffi de l'absence d'un document administratif quelconque pour qu'on leur saisisse toutes leurs marchandises et qu'on les considère comme des spéculateurs et non comme des grossistes ou de gérants d'entrepôts. S'ils s'opposent à ces décisions présidentielles de Kaïs Saïed, ils peuvent toujours aller voir la justice. Laquelle est dirigée par Kaïs Saïed.
Après les entrepôts, le président entend aller voir tous ces voleurs d'avant et d'après 2011. Il y aurait 13500 milliards à prendre. 13500 milliards de quoi ? Le président ne sait pas trop, il a toujours confondu les chiffres, c'est lui-même qui le dit.
Et si jamais ces 13500 milliards ne suffisent pas à alimenter le budget de l'Etat, le président pourrait éventuellement faire main basse sur les banques, les sociétés d'assurance, les intermédiaires en bourse, les grandes surfaces ou les sociétés technologiques. Bref, on doit confisquer tout ce qui engrange des milliards de bénéfices sur le dos du pauvre citoyen appauvri par ces rapaces de capitalistes et occidentalisés qui ont trahi leur pays.
Dans la foulée, il faudrait aussi confisquer les deux-trois médias qui résistent encore au président et le critiquent tout le temps, notamment Business News et Mosaïque FM.

Au vu de la situation et des tournures que prennent les événements, il est urgent d'anticiper. Il y a ceux qui ont déjà émigré. Et il y a ceux qui n'ont que la Tunisie pour vivre. A Business News, nous faisons partie de ces derniers. Jusque-là, nous avons été fortement critiques du président et de sa politique hégémonique. On se disait qu'au pire des cas, nous allons être face à un juge indépendant et honnête qui saura ce que c'est que la liberté d'expression. Nous avons déjà des antécédents avec Moncef Marzouki et on l'a gagné haut la main.
Cette perspective n'est plus permise depuis le 12 février. La justice n'est plus indépendante et les magistrats ne sont plus libres. Nous ne pouvons plus faire confiance à la justice, comme c'était le cas avant le 12 février. Quel est donc ce magistrat qui va risquer pour nous une mutation, voire un limogeage, si jamais il lui viendrait à l'idée de dire qu'un article critique de Kaïs Saïed est un exercice ordinaire de liberté d'expression ?
La situation, voyez-vous, est intenable pour notre rédaction, d'où l'idée d'inviter Kaïs Saïed à nous diriger. J'invite mon ami Noureddine Boutar, directeur de Mosaïque FM, à faire pareil, sous peine de voir sa radio confisquée.
Laissons le président décider de ce qui se diffuse et de ce qui ne se diffuse pas. C'est à lui de nous dicter les sujets que l'on doit traiter ou pas.
Les chroniqueurs insolents comme Elyes Gharbi, Marouen Achouri, Haythem El Mekki, Sofiène Ben Hamida ou Zyed Krichen, exit. Les commentaires des lecteurs, exit également.
Bienvenue à Riadh Jrad, Kaïs Karoui, Ridha Lénine et Amine Mahfoudh. Les émissions seront toutes sous le signe du succès, des trains qui arrivent à l'heure (s'il y en a), de la verdure, du beau temps, du ciel bleu et du chant des oiseaux

Imaginez un seul instant comment seraient Business News et Mosaïque FM avec ce casting. Cette gestion monochrome vous insupporte ? Sachez qu'une justice sous la botte d'un seul homme est pire. Sachez qu'un pays sous la botte d'un seul homme est pire.
Ça a l'air d'une blague, mais on y va tout droit. Après l'assemblée, le gouvernement et la justice, les médias vont devoir se soumettre aussi. La majorité s'est soumise déjà, à commencer par la télé publique Wataniya.
Notre seul rempart, permettant notre liberté d'expression, était une justice indépendante et celle-ci a disparu le 5 février. Notre seule hantise est un juge partial, intéressé ou obligé. Ils le sont tous depuis le 12 février. Qui pour protéger les médias libres et indépendants ? Plus personne. La constitution n'est plus, la justice n'est plus.
Kaïs Saïed, tout à son narcissisme surdimensionné, vit dans une autre époque. Une époque médiévale. Alors que les salaires des fonctionnaires doivent être payés à partir de cette semaine, le compte du trésor n'inscrit que 551 millions de dinars alors qu'il lui faut 1,8 milliard. Plutôt que de s'occuper de cette urgence, le président est occupé à régler leurs comptes aux magistrats désobéissants.
Il ne distingue pas entre millions et milliards et il s'en vante. Il ne connait rien des réseaux sociaux que fréquentent 100% des jeunes et la majorité de sa population, et il s'en vante.
Le président se vante de son ignorance et son illettrisme ! Avec un président pareil, le pays ne peut plus avancer, les chefs d'entreprise (les seuls capables de créer de la richesse et de la croissance) ne peuvent plus travailler, les magistrats ne peuvent plus accomplir leur mission. Tout comme les médias.


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