Rached Ghannouch, chef du mouvement islamiste Ennahdha et président du Parlement, a été présent ce lundi 20 juin 2022, avec Al Jazeera Mubasher, pour revenir sur la situation politique actuelle et les derniers développements sur la scène nationale, notamment, en rapport avec l'élaboration de la nouvelle constitution et le référendum en cours d'organisation. « Saïed n'est pas un dieu qu'on ne peut interroger. C'est un être humain qui peut avoir raison, comme il peut se tromper. Je me demande comment est ce que les sages peuvent mettre leur avenir entre les mains d'une seule personne. Nous appelons le président à ne pas s'aventurer dans une voie sans issue. Ennahdha a fait des sacrifices pour garantir les libertés et est prêt à en faire davantage si c'est dans l'intérêt de la Tunisie » a déclaré Rached Ghannouchi.
Dans ce contexte, Rached Ghannouchi a estimé que le président Saïed essaye de conférer une certaine légitimité au coup d'Etat qu'il a opéré à travers la mise en place d'une nouvelle constitution, élaborée dans la précipitation, mais aussi sur mesure. « Quant à Sadok Belaïd, il n'a pas respecté son rang académique en s'inscrivant dans le processus de Kaïs Saïed. Il a remis au président une proposition de constitution en lui accordant dix jours pour présenter la version finale. Les constitutions ne se préparent pas dans la précipitation. Essayer de légiférer l'autocratie et la dictature est une mascarade à laquelle a participé Belaïd ».
Rached Ghannouchi a ajouté qu'avant le 25 juillet, il y avait des manquements et des erreurs. « Cependant, on a profité de ces lacunes pour ancrer la contre-révolution, mais cette démarche a été rejetée par le peuple. Ce peuple a bénéficié de la démocratie et de la liberté. Il y avait certes un retard sur le plan économique et social, mais c'est le prix à payer dans tout processus transitionnel. Dix années n'est une longue période dans la vie des peuples et la Tunisie a réalisé un grand exploit durant ces dix dernières années. En dix mois, il y a non seulement eu un retour sur les acquis démocratiques, mais il n'y a eu aucune réalisation sur le plan économique et social. Bien au contraire, les choses ont empiré et le pouvoir d'achat du Tunisien s'est considérablement dégradé », a affirmé Ghannouchi.
Revenant sur le référendum, le chef d'Ennahdha a appelé au boycott considérant que ce référendum est nul dans la mesure où il est basé sur un processus illégal et illégitime. « Tout le stratagème était planifié à l'avance et il n'y auvait aucune surprise. Le président Kaïs a anéanti toutes les instances et veut réunir tous les pouvoirs quitte à détruire l'Etat pour assoir son projet personnel. C'est bien cela la grande corruption ».
Et de poursuivre qu'Ennahdha n'a pas de problème personnel avec le président et souhaite la reprise du dialogue. « Ennahdha avait accordé des millions de voix à Kaïs. Nous voulons le dialogue, mais un dialogue en dehors des mesures exceptionnelles. Le dialogue doit être dans le cadre de la constitution ».