Le docteur en sciences économiques, enseignant-chercheur à l'Université de Carthage et expert consultant, Aram Belhadj est revenu, dans une interview parue, mardi 19 décembre 2023, sur Acharaâ al Magharibi, sur la loi de finances 2024. Aram Belhadj a estimé que cette loi est comme celles des trois années précédentes : « Elle n'est pas applicable et ne consacre en rien la souveraineté nationale, surtout compte tenu du montant de la dette extérieure de plus de 16 milliards de dinars pour financer le budget de l'Etat ». Pour l'économiste, on ne peut parler de souveraineté avec ce montant emprunté à l'étranger et cela révèle une contradiction flagrante entre les slogans et la réalité : « En l'absence d'un accord avec le Fonds monétaire international, il sera quasiment impossible d'obtenir ces prêts extérieurs », a-t-il assuré. Aram Belhadj a ainsi relevé qu'il était très difficile de mettre en œuvre cette loi, à l'instar des lois de finances de 2022 et 2023, dont on ne sait pas comment elles seront clôturées, selon ses dires. « Même le montant de 11 milliards de dinars qui devrait être emprunté sur le marché intérieur pourrait entrainer de nombreux risques, notamment un taux d'inflation élevé et une déstabilisation du secteur bancaire… On n'a pas vu de mesures majeures… C'est une loi ordinaire qui ne rompt pas avec le passé et, surtout, qui est difficile à appliquer ». Par ailleurs, Aram Belhadj a déclaré qu'il était difficile d'atteindre un taux de croissance de 2,1% et que même le FMI avait déjà considéré cela comme irréaliste estimant qu'un taux de 1,8% pourrait être atteint. D'après l'expert, il existe un grand gap entre ce qui est annoncé et ce qui est mis en œuvre : « Parler de souveraineté nationale, de restaurer la dignité de la Tunisie, d'instaurer une justice fiscale, de faire face à l'économie rentière ou d'intégrer l'économie parallèle… ne suffit pas si ça ne dépasse pas le statut de slogans pour se concrétiser dans la loi de finances ». Il pense de ce fait qu'il existe une grande différence entre le discours officiel et la réalité du terrain et les mesures mises en place. Aram Belhadj a également évoqué les craintes quant à une faillite de l'Etat. Il a rappelé les grandes déficiences au niveau des finances publiques, mais assuré que cela ne signifie pas forcément que l'Etat est en faillite : « La préoccupation première des gouvernements successifs a été de s'acquitter des salaires et de régler la dette extérieure. Ce n'est pas nouveau ». Il a tout de même expliqué que le spectre de la faillite demeure prégnant compte tenu du déficit des finances publiques et de l'endettement : « Si nous continuons ainsi, un jour nous serons dans l'incapacité de remplir nos obligations financières, aux niveaux interne et externe… La situation ne doit pas perdurer ainsi… », a-t-il relevé.