L'élu de Gabès au Conseil national des régions et des districts, Mohamed El Kou, a tenu, dimanche 12 octobre 2025, le ministère de l'Industrie, des Mines et de l'Energie et le Groupe chimique tunisien (GCT) pour responsables de la situation environnementale dramatique que connaît la région. Dans une déclaration accordée à l'agence de presse TAP, il a affirmé que « les cas d'asphyxie survenus dans les zones de Chatt Essalem et Ghannouch résultent directement des émissions gazeuses issues des unités industrielles du GCT », ajoutant que les autorités avaient été alertées « à plusieurs reprises » sur la gravité du problème. Mohamed El Kou a rappelé que ces avertissements avaient été formulés « sous la coupole du Conseil national » ainsi que lors de la visite de la ministre de l'Industrie à Gabès, le 24 avril 2024, sans qu'aucune mesure concrète n'ait suivi. Selon lui, les projets de réduction de la pollution atmosphérique, bloqués depuis 2017, n'ont toujours pas été relancés. Il a souligné que « toutes les promesses antérieures sont restées lettre morte », ce qui a aggravé la colère et le désespoir des habitants, privés de leur droit constitutionnel à un environnement sain.
L'élu a également mis en avant les conséquences sanitaires et économiques de cette pollution chronique : détérioration de la santé des riverains, dégradation du littoral, atteinte à l'agriculture, au tourisme et à l'attractivité économique d'une région pourtant riche en ressources et en potentiel humain. Pour lui, seule une refonte structurelle du complexe industriel et le démantèlement progressif des unités les plus polluantes permettraient d'enrayer le cycle des crises répétitives.
En toile de fond, la tension ne cesse de croître à Gabès. Les habitants dénoncent depuis des années les effets dévastateurs de la pollution industrielle sur leur santé et leur cadre de vie. Le dernier épisode d'intoxication, survenu vendredi 10 octobre 2025, a ravivé les blessures d'une région longtemps marginalisée. Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des scènes d'urgence dans des écoles et des hôpitaux, où plusieurs enfants ont été pris en charge pour des difficultés respiratoires. Les organisations de la société civile évoquent désormais « un écocide silencieux » et accusent l'Etat de n'avoir « jamais tenu ses promesses » concernant la fermeture ou la mise aux normes des usines les plus dangereuses. Face à la crise, le président de la République, Kaïs Saïed, a reçu, samedi 11 octobre 2025, la ministre de l'Industrie, Fatma Thabet, et le ministre de l'Environnement, Habib Abid. Selon un communiqué de la présidence de la République, une équipe conjointe des deux ministères a été dépêchée à l'usine du GCT pour identifier les dysfonctionnements et engager des mesures urgentes. Le chef de l'Etat a insisté sur la mise en place d'un plan stratégique global visant à « mettre fin aux catastrophes environnementales récurrentes ». « Nos concitoyens de Gabès, comme dans toutes les régions du pays, obtiendront pleinement leurs droits… une Tunisie verte, débarrassée de toute pollution », a-t-il déclaré. Cette catastrophe environnementale remet une fois de plus sur la table un dossier ancien et non résolu. Entre promesses non tenues, retards accumulés et absence de solutions structurelles, la population locale dit vivre « sous perfusion toxique ».