Contexte économique oblige, le Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) a consacré la première session ordinaire du Comité Central à la crise financière et économique internationale, ses répercussions sur la sphère réelle de l'économie nationale et la stratégie tunisienne pour y faire face et atténuer, le cas échéant, les impacts négatifs. Une stratégie que Taoufik Baccar, Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) a qualifié de « réaliste, rationnelle et prospective ». Quant à Mohamed Rachid Kechich, ministre des Finances, il a souligné que « l'approche tunisienne en matière de gestion de crise traduit la nécessité de poursuivre avec détermination et confiance le processus de développement ». Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de la Coopération internationale, souligne pour sa part l'impératif de « consolider la capacité de la Tunisie à attirer les Investissements ». Les trois membres du gouvernement étaient, en effet, les invités du RCD pour présenter la stratégie tunisienne de gestion de la crise. Force est de reconnaître que la Tunisie avait, dès le déclenchement des premiers prémisses de la crise financière internationale aux Etats-Unis, mis en place une cellule de veille et de suivi de la conjoncture internationale. La mesure a permis, en quelque sorte, d'anticiper les éventuelles répercussions de la crise, très vite propagée à toutes les économies et transformée en une crise économique, la plus grave et la plus difficile que le monde ait connu. Et, à situation exceptionnelle, il a fallu une réaction rapide et urgente. « Il a fallu une prise de position ferme pour circonscrire les effets de la crise économique mondiale sur l'économie nationale, préserver les acquis nationaux et les conforter », devait indiquer le Gouverneur de la BCT. Cependant, l'heure est à la prudence et à la vigilance. Car, de toute évidence, la sphère économique réelle est touchée par la crise et les PME, notamment exportatrices, la vivent au quotidien sur le terrain. Les mesures conjoncturelles annoncées pour soutenir les PME à relancer leur activité et à préserver les emplois auront un impact certain sur l'économie, l'exportation et la préservation des marchés à l'étranger et des emplois. Néanmoins, M. Baccar, rappelle que la crise actuelle se distingue par un manque de visibilité, quant aux perspectives de la croissance mondiale et la difficulté de prévoir la durée de la crise et l'ampleur de ses effets. D'où d'ailleurs, la prochaine évaluation à mi-chemin de l'impact des mesures conjoncturelles sur la sphère réelle de l'économie. Une évaluation suite à laquelle, selon la tournure que prendra la crise, ces mesures seront soit allongées (initialement prévues pour 6 mois), dans leur application, soit consolidées par d'autres décisions. Autre caractéristique de la crise, la tendance, déjà constatée de retour au "protectionnisme", sous différentes formes et à la décélération de la croissance mondiale, notamment celle de l'Union européenne, premier partenaire économique et financier de la Tunisie. La stratégie pour faire face à la situation est qualifiée de « réaliste, rationnelle et prospective » par M. Baccar, en ce sens que « la Tunisie est déterminée à adopter une politique monétaire équilibrée et de renforcer la contribution du système bancaire dans le développement, loin de toute spéculation. D'ailleurs l'adoption d'une démarche progressive dans la libéralisation financière a mis à l'abri la Tunisie des répercussions de la crise financière. Celle-ci a mis en évidence l'impératif de mettre des garde-fous et des mécanismes efficients pour la coordination des politiques financières et des structures de contrôle. Côté finances publique et gestion du budget de l'Etat, entre autres, Mohamed Rachid Kechich a indiqué que la Tunisie est appelée, dans cette conjoncture internationale, à relever les défis issus des effets pervers de l'actuelle crise économique. Dans ce sens, il a rappelé que l'urgence du contexte a incité l'ensemble des intervenants à mettre en application de façon urgente, les mesures conjoncturelles. En effet, annoncées lors du Conseil ministériel du 23 décembre, les décisions sont toutes entrées en vigueur, à partir du mois de janvier 2009. C'est que l'Etat est conscient de l'ampleur de la crise et de l'impératif de soutenir les PME et de booster le développement par le bais de l'accroissement de la demande intérieure : « Concrètement, il s'agit de relancer l'investissement public, de renforcer le pouvoir d'achat des citoyens, de concrétiser la corrélation entre le social et l'économie, approche sur laquelle se base la politique tunisienne de développement», explique le ministre des Finances. Il est vrai que la crise sévit un peu partout dans le monde. Il est vrai aussi que pratiquement toutes les économies en souffrent et que la Tunisie a recouru à une application rapide et urgente des mesures conjoncturelles pour contre carrer l'impact de la crise sur la sphère réelle de l'économie nationale. Mais, en parallèle, la Tunisie n'a pas décidé de se croiser les bras en attendant que le cyclone passe. Bien au contraire, la crise offre par ailleurs des opportunités que le pays est déterminé à saisir. En effet, de l'avis de plusieurs experts, la crise actuelle génèrera un changement de la carte géographique industrielle. De groupes industriels ont eu l'idée de délocaliser leur activité dans des pays émergents, où l'impact de la crise est moindre qu'ailleurs, et où les possibilités d'une meilleure compétitivité, d'un meilleur développement et d'une meilleure croissance sont possibles, à l'instar de la Tunisie. A ce titre, Mohamed Nouri Jouini a annoncé que le pays a engagé, au début du mois de février, une campagne de promotion des Investissements Directs Etrangers (IDE), dans différents pays. Objectif : faire connaître les incitations et avantages accordés aux investisseurs étrangers et de renforcer les capacités de la Tunisie d'attirer les IDE et de hausser leur apport dans la consolidation du développement et de création d'emplois. Une démarche, explique le ministre, qui tend à contenir les impacts de la crise financière mondiale dans les limites d'un point de croissance en contournant le recul des exportations par la consolidation de la demande intérieure et notamment les investissements. Insaf. B.