Ancien Premier ministre, Mohamed Ghannouchi, se manifeste, après plusieurs mois de silence, pour accorder un entretien à Al Wataniya 1, Anis El Mogaâdi, un des responsables de l'ancienne garde présidentielle, dirigée par le général Ali Seriati, est invité par Radio Mosaïque Fm pour apporter ses témoignages. Sans oublier la série documentaire diffusée, actuellement par la chaîne satellitaire, pro-saoudienne, Al Arabiya relatant les différentes péripéties ayant conduit et entouré ledit départ de Ben Ali. Le tout pour essayer de lever le voile sur ce qui s'est passé, réellement, durant les dernières heures allant du fameux discours, dans la nuit du 13 janvier 2011, de Ben Ali à son départ pour l'Arabie Saoudite, suivi par l'arrestation d'Ali Seriati. Premier anniversaire de la Révolution oblige, on semble pris, tout d'un coup, d'une folle frénésie en vue de connaître, pour les uns, et de faire des révélations, pour les autres, quant à la réalité des faits ayant conduit à ce mystérieux 14 janvier 2011. Il y eut certes, quelques tentatives pour parler de ces faits. On citera le fameux coup de bluff de Ridha Grira qui, apparemment, en voulant sauver sa tête, en a tellement rajouté qu'il a fini par payer ses impertinences. Le fils d'Ali Seriati a menacé et réclamé que le procès de son père se déroule en public et en présence du général Rachi Ammar, mais il n'en fut rien. Ce qui a amené certains à parler d'un deal consistant en un abandon graduel des charges portées à l'encontre de Seriati contre son silence. Le non lieu et le classement de certaines affaires laissent-ils entrevoir un dénouement dans ce sens ? Le seul témoignage de taille qui, malgré les mises en doute par certains, reste la révélation importante et déterminante faite par le colonel Samir Tarhouni puisqu'elle porte sur les circonstances de l'arrestation des membres du clan des Trabelsi. Mais voyons un peu le degré de fiabilité de ces différents témoignages. En attendant la seconde partie de l'interview de Ben Ali, on constate qu'il n'apporte pratiquement rien de ce qu'on ne sait pas encore, dans le sens où il maintient « l'accusation qu'on l'ait contraint à quitter la Tunisie, mais sans donner la moindre indication sur ceux qui se trouvent derrière ce départ forcé. Les paroles d'Anis El Mogaâdi corroborent les anciens propos de Samir Tarhouni et de Sik Salem tout en démentant ceux de Mohamed Ghannouchi qui aurait, ainsi, mis les pieds dans le plat en disant, des contre vérités, selon les responsables de la garde présidentielle qui affirment parler, enregistrements et preuves à l'appui. Or tout le monde parle de preuves et d'enregistrements, y compris Ben Ali, mais on n'a rien vu ni entendu de ces preuves concrètes. Quant au documentaire d'Al Arabiya, et nonobstant la qualité artistique de l'œuvre, nous sommes en mesure d'affirmer que cette série n'invente rien et ne fait que reproduire les procès verbaux établis à l'issue des interrogatoires menés par la justice militaire contre les différents protagonistes de ces heures cruciales pour l'histoire de la Tunisie. Même Anis El Mogaâdi, qui confirme les dires de Samir Tarhouni et de Sik Salem, affirme qu'il est « satisfait du contenu de ce documentaire dans la mesure où il a reflété « fidèlement ce qui s'est passé. Cette manière d'inonder l'opinion publique par un torrent de témoignages et de révélations pourrait être bien voulu en vue de disperser et de brouiller les pistes afin qu'on ne sache pas différencier entre le « bon grain de l'ivraie », à savoir, qui dit « vrai » et qui dit « faux » ? Autre question : qui se trouve derrière les fuites de ces documents contenant les PV du tribunal militaire de Tunis, sur lesquels semblent s'être basée Al Arabiya pour réaliser son « scoop », et qui ont été rendus publics, aussi, par le célèbre site de « Mediapart » ? S'agit-il d'une opération de diversion pour que les gens se contentent de cela, alors que les réalités des événements seraient autres ? En effet, un récapitulatif de toutes ces révélations et autres témoignages font ressortir que Ben Ali a été mis, par la force, dans un avion en partance pour l'Arabie Saoudite, par le général Ali Seriati qui a été, par la suite, arrêté en essayant, d'abord, de lui coller tous les « maux » des tueries et des fameux snipers, avant de tenter de le disculper à petites et savantes doses. Pour le reste, on ne nous dit rien. Qui a donné l'ordre à Seriati pour faire partir Ben Ali et sa famille proche ? Qui a pris la décision pour que tout se termine en l'espace de quelques heures et avec le minimum de dégâts et de pertes en vies humaines ? En effet la partie qui a décidé cela ou contribué à son accomplissement est à féliciter et à encenser par 11 millions de Tunisiens puisqu'elle leur a permis de retrouver la liberté et la dignité après plus d'un demi-siècle de répression et de dictature et plus de 20 ans de corruption. Le peuple a le droit de savoir. Il est fort probable qu'en sachant ce qui s'est vraiment passé en ce 14 janvier 2011, on en saura plus sur ce qui nous arrive un an après. Mais l'expérience a démontré qu'on ne peut cacher, indéfiniment, la vraie histoire. Et les Tunisiens ont le droit de savoir qui a fait quoi en cette journée du 14 janvier, à marquer d'une pierre blanche dans l'histoire du pays. Noureddine HLAOUI