La séance plénière de l'Assemblée constituante, qui s'est déroulée aujourd'hui 16 avril 2012, a encore donné une image négative des travaux de la Constituante. Prévue pour discuter des sujets de la Justice transitionnelle et des martyrs de la révolution, la séance matinale ne débouchera que sur les dissensions récurrentes entres les élus de l'opposition et ceux d'Ennahdha, principal parti au pouvoir. Un élu de la Pétition populaire (Al Aridha), Skander Bouallègue, est en effet intervenu, en début d'après-midi, pour critiquer vivement le travail de l'actuel gouvernement, qu'il qualifiera de gouvernement Ghannouchi. « L'actuel gouvernement n'a rien apporté pour le dossier des martyrs et des blessés de la révolution, ce gouvernement de Ghannouchi, Marzouki et Ben Jaâfar», a-t-il affirmé, au début de son intervention. « Le peuple qui a fait tomber la dictature, se battra contre cette politique autoritaire et hégémonique », poursuit-il, sous une cacophonie ambiante, née de l'indignation des élus d'Ennahdha, Sahbi Atig et Habib Khedher, en premier lieu. Mustapha Ben Jaâfar tentera, dans un premier temps, de faire taire ces protestations, avant que les élus d'Ennahdha ne se lèvent pour entonner l'hymne national, afin de faire taire le député d'Al Aridha. Mustapha Ben Jaâfar, loin de vouloir stopper cette scène ubuesque, se lèvera également pour entonner l'hymne tunisien. M. Bouallègue reprenant la parole lancera : «Ils ont fait les commerçants de Dieu, à présent, ils commercent avec l'hymne national», mais il sera empêché d'achever son intervention,, à cause des cris des élus d'Ennahdha, et Mustapha Ben Jaâfar donnera alors la parole à Sahbi Atig. Ce dernier aura à cœur d'expliquer cette protestation du groupe Ennahdha par le fait que M. Bouallègue a parlé de « gouvernement Ghannouchi », au lieu de parler de « gouvernement Jebali », demandant, de ce fait, des excuses immédiates. Mustapha Ben Jaâfar aurait eu l'occasion, alors, de clore l'incident, mais il n'en restera pas là. Lorsque plusieurs élus d'Al Aridha s'indigneront du fait que la parole n'ait pas été rendue à leur collègue, le président de l'Assemblée décidera d'exclure les élus contestataires, sous les applaudissements du groupe parlementaire d'Ennahdha. En signe de protestation, l'ensemble des élus d'Al Aridha quitteront alors l'hémicycle. Ainsi, un élu a été empêché de s'exprimer car il critiquait le gouvernement actuel, puis a été exclu, grâce à une instrumentalisation de l'hymne national, appuyée par le président de l'Assemblée, et le parti islamiste au pouvoir.