La nuit du samedi 27 au dimanche 28 juillet aura finalement été chaude au Bardo. Le gros des manifestants démocrates est rentré vers 2 heures du matin. On s'est organisé pour laisser un bon nombre passer la nuit blanche sur place et que d'autres reviennent les remplacer le matin. L'ambiance était bon enfant par moment et on n'enregistrait aucune tension entre démocrates et forces de l'ordre. On s'offrait même l'eau et le petit déjeuner d'avant le jeûne, témoignera le député Noomane Fehri.
Un peu après 3 heures, un petit groupe de jeunes, apparenté aux ligues de protection de la révolution ou aux Islamistes, commence à créer du grabuge, puis à se jeter des pierres et des bouteilles d'eau. La police les disperse par un tir de gaz lacrymogène. Les députés applaudissent et remercient les agents de police. Puis, soudainement, vers 3h30, les forces de l'ordre ont repris leurs attaques contre les sit-ineurs et les manifestants encore présents devant l'ANC. L'attaque de la police n'a pas épargné les députés sur place et la volonté de mettre un terme au sit-in semblé évidente. C'est des rafales de tirs orientés un peu partout dans le camp démocrate. La première de ces bombes visera les tentes des députés et leur sit-in, dira M. Fehri. Il s'enfuira avec son collègue Chokri Yaïche. Les bombes les pourchasseront. Les bombes pourchasseront également les centaines de manifestants encore présents dans les rues et ruelles jusqu'à Bouchoucha. Les réverbères se sont éteints brusquement, témoignera un des manifestants. On dénonce la violence disproportionnée, voire totalement injustifiée. Noomane Fehri se dirigera au poste de police pour déposer plainte, on lui demande de revenir le lendemain, le chef de district serait blessé. Du côté de la police, on ne comprend plus rien. La police serait-elle infiltrée par les nouvelles recrues de Ghannouchi ? Y a-t-il deux polices ? Une police islamiste et une police républicaine ?
Le calme revient quelques minutes plus tard et les tentes sont de nouveau dressées. On ne lâche rien, on ne veut rien lâcher. Du côté des islamistes, non plus. Gonflés à bloc par la visite de dirigeants d'Ennahdha, dont Sahbi Atig qui aurait été vu sur place, ils n'envisagent pas de quitter les lieux et de les laisser entre les mains des démocrates uniquement. Beaucoup parlent des milices entraînées par Ghannouchi qui entrent désormais en action pour semer la zizanie et pousser la police à réagir. D'autres parlent d'infiltrés dans les différents corps. La population est plus que jamais divisée, la police commence à l'être comme l'attestent nombre de présents sur place. Des élus ont, de ce fait, décidé d'aller rencontrer le ministre de l'Intérieur afin de lui demander des explications quant à la répression policière excessive, comme l'a déclaré Samir Ettaïeb sur les ondes de Mosaïque Fm ce matin.