Tout le monde s'accorde à dire que l'un des seuls acquis tangibles de la révolution est la liberté d'expression. Toutefois, il parait que les journalistes tunisiens sont des amateurs, des idiots qui ne connaissent pas leur métier. Par conséquent, on a besoin de leçons venant des sommités de ce monde en matière de journalisme, d'analyse et même d'écriture. Nous, pauvres journalistes tunisiens, on peut être achetés pour presque rien. Nous sommes également des nostalgiques de l'ancien régime – c'était tellement mieux quand on ne pouvait pas s'exprimer !-, des adeptes du benalisme sans Ben Ali selon le grand Vincent Geisser. Nous devons nous rendre à l'évidence : on a besoin de leçons de journalisme pour faire notre métier. Nos amis qataris ont été les précurseurs dans ce domaine en nous faisant profiter gratuitement de leur science du journalisme à travers la chaîne Al Jazeera. D'ailleurs, l'un des grands maîtres en la matière est Fayçal Kacem, ça c'est du grand journaliste ! Un éditorialiste courageux qui n'hésite pas à insulter Béji Caïd Essebsi et à lui dire ses quatre vérités sur antenne (voir ici sa vidéo), un journaliste qui s'astreint aux faits, qui ne va pas dans les analyses douteuses et qui reste toujours respectueux ! Lui, ce n'est pas un média de la honte, comme nous autres médias tunisiens. Il faut se rendre à l'évidence, on a besoin de leçons de journalisme, d'éthique et de démocratie venant du Qatar ! D'ailleurs, Fayçal Kacem parlera certainement un jour du poète emprisonné au Qatar, car il a osé évoquer la révolution tunisienne et a souhaité un tel soulèvement dans son pays. Fayçal Kacem parlera certainement un jour du journaliste tunisien Mahmoud Bouneb retenu au Qatar contre sa volonté depuis plus de deux ans. Il faut juste attendre qu'il finisse d'analyser la situation politique en Tunisie. Nous devrions tous nous inspirer de l'honnêteté intellectuelle de Fayçal Kacem, de son courage et de son intégrité. D'autre part, nous journalistes tunisiens, nous devrions prendre exemple sur les analyses pertinentes et objectives de Vincent Geisser. Ce scientifique est quand même parvenu à écrire tout un livre sur Mustapha Ben Jaâfar, c'est dire son talent ! Il s'est attaqué courageusement à un autre journaliste qui s'appelle Samy Ghorbal et son magazine Jeune Afrique (voir ici notre article à ce sujet) Quel courage ! Quelle pertinence ! Quelle profondeur ! Vincent Geisser nous alerte sur la « triste réalité du journalisme en Tunisie ». On devrait tous s'incliner en signe de reconnaissance à ce chercheur émérite qui ne cesse de nous alimenter, gracieusement lui aussi, par ses analyses et ses lectures. Quelle chance avons-nous en Tunisie que M. Geisser, chercheur à l'institut français du Proche-Orient (c'est dire !), ait lâché tout le Proche-Orient pour s'occuper de la Tunisie ! On devrait le prendre pour exemple et nous inspirer de ses méthodes et de son discours. Samy Ghorbal n'aurait pas dû faire un reportage, il aurait dû faire un livre comme Vincent Geisser. Bah oui… Nous journalistes tunisiens, on devrait être plus à l'écoute et nous inspirer des médias mondiaux et français particulièrement comme Libération, Le Monde ou encore Le Figaro. Evidemment, ces journaux n'ont aucun positionnement politique et ne défendent pas une certaine vision des choses ! Ce sont des journaux qui traitent l'information en toute neutralité, en toute objectivité et sans raccourcis surtout. Ce sont les médias français qui, pour couvrir le résultat des élections législatives, parlaient de la victoire des « laïcs » de Nidaa Tounes contre les islamistes d'Ennahdha. On aurait dû faire pareil, ça nous aurait facilité la tâche. Il faut savoir qu'il y a 11 millions de journalistes en Tunisie. Tout le monde a son mot à dire sur la pratique journalistique et, évidemment, tout le monde connaît le boulot des journalistes mieux que les journalistes. On devrait par conséquent être plus à l'écoute de notre public, de celui qui vous insulte parce qu'il a lu un titre, de ceux qui tirent des analyses de plusieurs paragraphes à partir d'une une de journal, de ceux qui insultent les rédacteurs au lieu de critiquer le contenu de leurs articles. Pourquoi dire qu'un article est mauvais quand il est plus facile d'accuser son auteur de corruption ? Pourquoi se donner la peine de lire tout un article quand il est plus facile de rester planqué derrière son écran et son pseudo et dire des insanités sur d'autres personnes ? On devrait se mettre sérieusement à apprendre et à s'inspirer des éminences grises qui ont pris la peine de nous donner des leçons, bah oui…