Moez Soussi : « Une baisse de l'inflation ne signifie pas une baisse des prix »    Tunisie : Seuls les TRE sauvent le marché de l'or local    Kaïs Saïed, UGTT, Abir Moussi…Les 5 infos de la journée    Le Conseil International des Femmes Entrepreneures rend hommage aux femmes créatrices de valeur à l'occasion de la fête de la femme    Entrée en vigueur des surtaxes de Trump : le monde cherche un compromis    Chaima Issa convoquée par l'unité antiterroriste    Passeports diplomatiques : l'Algérie impose des visas aux Français    Etablissements primaires, collèges et lycées publics: ouverture des inscriptions à distance    Ooredoo lance Ooredoo Privilèges    Tunisie Telecom rend hommage au champion du monde Ahmed Jaouadi    Le ministre de la Jeunesse et des Sports examine avec Ahmed Jaouadi les préparatifs pour les prochaines échéances    Kef: les 12 élèves victimes d'une erreur d'orientation réaffectés vers les filières initialement choisies    Les plages Tunisiennes enregistrent 8 000 mètres cubes de déchets laissés chaque jour    Ballon d'Or 2025: 30 candidats en lice    BNA Assurances obtient le visa du CMF    Service militaire 2025 : précisions sur les procédures d'exemption et de régularisation    Investissement : 3,3 milliards de dinars déclarés au premier semestre 2025    Manifestation anti-UGTT devant le siège du syndicat à Tunis    Monnaie en circulation - Nouveau record : la barre des 25,7 milliards de dinars franchie    Anis Ben Saïd détaille les règles fiscales applicables aux Tunisiens à l'étranger    « Arboune » d'Imed Jemâa à la 59e édition du Festival International de Hammamet    JCC 2025-courts-métrages : l'appel aux candidatures est lancé !    Ahmed Jaouadi décoré du premier grade de l'Ordre national du mérite dans le domaine du sport    Météo en Tunisie : temps clair, températures en légère hausse    Najet Brahmi : les Tunisiens ne font plus confiance aux chèques !    Faux Infos et Manipulations : Le Ministère de l'Intérieur Riposte Fortement !    115 bourses d'études pour les étudiants tunisiens au Maroc et en Algérie    Tensions franco-algériennes : Macron annule l'accord sur les visas diplomatiques    Russie – Alerte rouge au volcan Klioutchevskoï : l'activité éruptive s'intensifie    Sous les Voûtes Sacrées de Faouzi Mahfoudh    Disparition d'un plongeur à El Haouaria : Khitem Naceur témoigne    30ème anniversaire du Prix national Zoubeida Bchir : le CREDIF honore les femmes créatrices    Ahmed Jaouadi décoré de l'Ordre du Mérite sportif après son doublé mondial    Le ministère de l'Intérieur engage des poursuites contre des pages accusées de discréditer l'insitution sécuritaire    Donald Trump impose des droits de douane supplémentaires de 25% sur les importations de l'Inde    Macron dégaine contre Alger : visas, diplomatie, expulsions    Sept disparus à la suite d'un glissement de terrain dans le sud de la Chine    La Galerie Alain Nadaud abrite l'exposition "Tunisie Vietnam"    Alerte en Tunisie : Gafsa en tête des coupures d'eau    Absence de Noureddine Taboubi : qui assure la direction de l'UGTT ?    Décès : Nedra LABASSI    Création d'un consulat général de Tunisie à Benghazi    Vague d'indignation après le retour ignoré d'Ahmed Jaouadi    Ahmed Jaouadi rentre à Tunis sans accueil officiel    La mosquée Zitouna inscrite au registre Alecso du patrimoine architectural arabe    Orchestre du Bal de l'Opéra de Vienne au Festival d'El Jem 2025 : hommage magique pour les 200 ans de Strauss    Le Théâtre National Tunisien ouvre un appel à candidatures pour la 12e promotion de l'Ecole de l'Acteur    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'école républicaine à l'époque de la chasse aux sorcières
Publié dans Business News le 18 - 09 - 2017

« Mécréante ! ...Attendons qu'elle sorte ! ». Ces mots débités par une parente d'élève devant l'école primaire, « Oqba Ibn Naafi », de la Cité El Bahri 3 à Sfax, ont fait vivement réagir les internautes tunisiens ce week-end. Il s'agit d'un épisode de violence à l'encontre d'une enseignante de Français, Fayza Souissi, accusée d'apostasie.
Non, nous ne sommes pas dans l'Europe du Moyen-âge, à l'époque de la chasse aux sorcières, où les milieux populaires étaient utilisés par le pouvoir pour affaiblir les femmes jugées trop indépendantes, mais en Tunisie du 21e siècle. Retour sur l'affaire de Sfax.


« Dégage, sale gueule ! », « Femme de ménage ! Avec des enseignants comme ça, mieux vaut que nos enfants n'étudient pas ! ». C'est de la sorte que Fayza Souissi, enseignante de Français dans une école de Sfax, a été accueillie en sortant de son école, par les parents de ses propres élèves.
Dans la vidéo, choquante, publiée massivement sur les réseaux sociaux, les Tunisiens ont assisté au bien triste spectacle d'une enseignante qui se fait agresser verbalement sous les yeux de ses élèves, par des parents déchainés. On l'accuse d'apostasie, d'athéisme et de tenter de corrompre la foi des enfants !
Les parents d'élève, agglutinés devant le portail de l'école, lui reprochent d'avoir fermé les fenêtres de sa classe lors de la prière du vendredi afin de réduire la « pollution sonore ». Rien de plus rien de moins pour que ces défenseurs de la piétée accusent l'institutrice d'athéisme !
« Faux » répond la concernée, tout en expliquant que l'horaire de sa leçon ne correspond pas à celui de la prière. Sur l'enregistrement on voit également l'enseignante sortir de l'école, escortée par la police au milieu d'une foule en délire qui débitait des obscénités à son encontre. La scène est surréaliste, violente.

Dans une interview accordée à la chaîne Nessma lundi 18 septembre, Mme Souissi, relate les faits : « Quand je suis entrée par la porte de l'école personne ne m'a parlé. Ils ne connaissaient pas mon visage, seulement mon nom. Je me suis dirigée vers le bureau du proviseur et une fois à l'intérieur, j'ai commencé à entendre des hommes, qui étaient devant la porte, protester contre ma présence au sein de l'établissement, car selon eux, le directeur régional m'avait fait muter ! Je n'ai pas connaissance de cette mutation et je ne l'ai jamais demandée ! ». Et d'ajouter : « Mes collègues m'ont alors emmenée dans un des bureaux pour me protéger car les hurlements se faisaient toujours plus forts ! ». Elle poursuit : « J'enseigne de 9 à 12h et vous n'êtes pas sans savoir que la prière du vendredi commence après midi. Il est vrai que je suis contre le Hijab, j'ai mal quand je vois des jeunes filles de primaire le porter ! Ceci dit, je n'ai jamais demandé qu'on l'enlève, jamais ! ».
Toujours lors de l'émission « Sbeh Elkhir Tounes », le chroniqueur, Sofiene Ben Hamida, a révélé que le problème au sein de l'école « Oqba Ibn Naafi » dure depuis au moins une année. « Il y a des frictions entre un courant religieux extrémiste qui veut imposer sa vision et un courant progressiste, moderne, qui défend une école républicaine. Il me parait que cette opération est fabriquée depuis le début, préméditée ! » a-t-il dit. Il renchérit que selon les informations dont il dispose : « Fayza Souissi est une citoyenne très active dans la société civile et étant membre de l'Association Tunisienne des Femmes Démocrates, elle représente un élément résistant au projet extrémiste et donc une cible. La peur aujourd'hui est que les écoles républicaine soient transformées en écoles religieuses par la subversion », a conclu notre confrère.

Etant donné la gravité de l'affaire, le ministère de l'Education a lui aussi réagi ce lundi via un communiqué où il a condamné l'acte de violence, jugé « inadmissible » tout en ordonnant l'ouverture d'une enquête. Il a été en outre rappelé qu'il est la seule autorité apte à juger le rendu pédagogique des enseignants.
Le communiqué ministériel a été suivi dans la journée par celui du syndicat général de l'enseignement secondaire. Dans le communiqué signé, Lassaâd Yacoubi, le syndicat exprime son total soutien à l'enseignante, rappelle ses longues années de carrière dans la formation des futures générations, demande l'application stricte de la loi contre les agresseurs et pointe enfin du doigt le délégué régional de l'enseignement de Sfax (1) en le qualifiant d'irresponsable. Ce dernier ayant été l'un des premières informés par les faits, vendredi, il avait évoqué la mutation de Mme Souissi, comme solution au problème.

Ce qui s'est passé la semaine passée n'est pas un fait isolé. Depuis les évènements de 2011, l'enseignement public tunisien, n'a cessé d'être attaqué. L'affaire du drapeau perché sur le toit de la faculté des lettres des arts et des humanités à la Manouba, a été le coup d'envoi d'une longue série d'incidents. Pire encore ses gens imbibés d'une interprétation superficielle et étriquée des textes religieux, ont développé dans le pays un véritable réseau parallèle d'écoles religieuses qui opèrent avec des normes qui ne correspondent pas à celles imposées par la République. Tout comme en France, à titre d'exemple, ces écoles sont financées par des associations religieuses liées aux pétromonarchies comme l'on prouvé des confrères français lors de leurs enquêtes. Il s'agit maintenant d'imposer leur modèle de société à tout un chacun et ils ciblent l'école républicaine.
En février 2012, peu de temps après l'accession de la Troika au pouvoir, menée par les islamistes d'Ennahdha, le prédicateur égyptien controversé Wajdi Ghonim s'était rendu en Tunisie pour prêcher sa bonne parole. « Nous n'avons pas besoin d'eux, mais de leur enfants ! » lui avait confié publiquement Abdelfattah Mourou, actuel vice-président du parlement. Ce même Wajdi Ghonim qui a dans un discours publié sur Youtube en Août 2017, appelé au Jihad en Tunisie et a traité le président de la République, Béji Caïd Essebsi, de mécréant, pour avoir proposé l'égalité de l'héritage entre les hommes et les femmes.
Quelque jours après, en septembre, M. Caïd Essebsi accordait une interview exclusive au journal « La Presse » et dans laquelle, il confiait parlant de son alliance avec le parti Islamiste : « Nous nous sommes dit : au moins, nous contribuerons à ramener Ennahdha au club des partis civils. Mais, il paraît que nous avons fait une fausse évaluation ».

Depuis la libération du pays en 1956, la classe dirigeante en Tunisie a beaucoup investi dans l'éducation des jeunes générations. « Nous n'avons d'autres ressources que le capital humain » disait Habib Bourguiba. Aujourd'hui, 70 ans après, l'école républicaine est en danger car elle constitue un rempart efficace contre l'ignorance et la pensé extrémiste. Une idéologie extrémiste qui fait fi de la diversité et des valeurs républicaines, en tentant, pernicieusement, d'imposer sa vision.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.