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Le nouveau blacklistage de la Tunisie, une opportunité !
Publié dans Business News le 19 - 02 - 2018

Le nouveau blacklistage est tombée comme une massue sur la tête des Tunisiens. Alors qu'on vient à peine de sortir d'une première liste noire européenne des paradis fiscaux, la Tunisie a été ajoutée à une liste noire des pays tiers susceptibles d'être fortement exposés au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme. Incompréhension, indignation et colère ont été les réactions des Tunisiens qui n'ont pas compris ce nouveau blacklistage et l'étendue de son impact sur l''''économie tunisienne, en général, et sur l''''entreprise, en particulier. Focus.

«Blacklisting et son impact sur l''''entreprise tunisienne» a été le sujet d'une table ronde organisée, ce vendredi 16 février 2018 par I'IACE, en présence de Faycel Derbel, le ministre-conseiller auprès de la présidence du gouvernement, de Samir Majoul, le président de l'UTICA, de Ahmed El Karm, président de l'Association professionnelle des banques. Une rencontre qui a permis d'échanger les points de vue et d'émettre certaines recommandations ainsi que des pistes de solutions.

Etat des lieux
Avec 357 votes pour, 283 votes contre et 56 abstentions, le parlement européen a estimé que la Tunisie a des failles stratégiques dans son système de lutte contre le blanchissement de capitaux et le financement du terrorisme. La Tunisie ne répond pas donc à sa Directive 2015/849 du 20 mai 2015 qui vise à se prémunir des dangers de ces deux fléaux, faisant peser une menace significative sur le système financier de l''''UE. Les députés se sont basés dans leur vote sur le rapport du Groupe d''''action financière (GAFI), un organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment d''''''''argent et le financement du terrorisme. Si la Tunisie répond conforme à 27 recommandations sur 40, pour les 11 critères d'effectivité elle n'était pas au rendez-vous, n'ayant obtenu que des modérés et des faibles lors de son évaluation : un seul jugement a été émis contre des faits de corruption. Le GAFI a ainsi placé la Tunisie sous surveillance de l''''International Co-operation Review Group (ICRG).

Impacts
Avec cette nouvelle classification, la Tunisie risque la dégradation de sa note Banking Industry Country Risk Assessment (BICRA) ainsi que celle de sa note souveraine. En outre, elle risque aussi de capter moins d'investissements étrangers. Le tout intervient alors que le pays se préparait à sortir sur le marché international. Les observateurs s'attendent, donc, à ce que la Banque centrale de Tunisie et le ministère des Finances retardent cette sortie pour éviter la hausse attendues des coûts. De ce fait, on fera recours au financement sur le marché local, ce qui engendrera moins de liquidités au niveau du secteur bancaire, les banques préférant s'inscrire aux bons de trésor assimilables (BTA) qu'à financer les PME/PMI, d'où un renchérissement du coût du crédit et des difficultés à y accéder.
Si la sortie sur le marché international est retardée, cela va impacter les réserves de changes, entrainant des risques de dégradation du dinar : la sortie aurait amélioré l'anticipation des opérateurs avec l'entrée des devises.
S'agissant des entreprises tunisiennes, avec cette nouvelle classification, elles seront amenées à fournir des justificatifs supplémentaires pour les différentes opérations à l'international. En plus, les banques seront appelées à être plus vigilantes, à gérer des relations plus sensibles avec les correspondants, ce qui induira des coûts supplémentaires subis par les entreprises.


Que pensent les experts et professionnels
Ahmed El Karm a été assez optimiste, en affirmant qu'on ne pouvait pas tomber plus bas ce qui nous oblige à nous secouer et nous remettre en question pour en sortir : «Il ne faut pas se lamenter et il faut avoir de fortes convictions pour ne pas rater le coche».

Faycel Derbel a estimé, pour sa part, que chercher le coupable n'avançait à rien, l'essentiel étant de savoir comment sortir de cette classification. Il a précisé que le GAFI a adopté une nouvelle méthodologie, «et c'est tant mieux comme l'explique M. El Karm», car il faut s'assurer de l'effectivité. «Nous avons la meilleure législation du monde mais très mal appliquée dans la pratique». Il a pointé les professions non financière (PNF), qui sont pour lui à l'origine du classement de la Tunisie, selon le rapport même de la commission tunisienne des analyses financières (CTAF). Il a évoqué, dans ce cadre, les flux importants de liquidité ayant permis à 200.000 Libyennes d'acquérir des logements en Tunisie en 2015. Il a souligné que la majorité des déclarations de soupçons (DS) ont été déposées par les banques et dans une moindre mesure les institutions financières. « Par exemple, les 8.000 avocats n'ont déposé entre 2011 et 2017 que 5 DS. Pire, 36% d'entre eux ne savent même pas ce que c'est la CTAF et la DS. 80% du reste ne savent pas à qui s'adresser. Sur plus de 1.000 experts comptables, une seule DS a été déposée en 2016. Aucune pour les 6.000 bijoutiers, alors qu'on apprend, par le même rapport, que 19.400 kilos d'or importés de Turquie en contrebande y ont été saisis chez eux et que le mélange avec les autres métaux est devenu la règle. De même pour la promotion immobilière qui n'a déposé aucune DS alors qu'il y a un engouement sur le secteur et que les prix ont augmenté de 41% entre 2011 et 2013, soit de 13,5% par an en moyenne ».
Ainsi, le conseiller du chef du gouvernement pense que pour sortir de la liste noire du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme, il faut impérativement la coopération des PNF. Il faut que ces professions soient formées et sensibilisées à ces fléaux et aux sanctions prévues en cas de non-déclaration. A cet effet, il est nécessaire de fixer des normes professionnelles, s'assurant de la mise en place d'un système de contrôle interne fiable avec des règles de gestion claires et obligation de vigilance. Il faut aussi opérer un contrôle sur ces professions, avec une attention particulière à la fraude fiscale.

C'est dans ce cadre qu'Ahmed El Karm a recommandé l'organisation d'urgence d'une campagne nationale pour la sensibilisation des PNF, tout en notant que l'Association professionnelle des banques (APB) peut participer à la formation dans ce domaine.

Samir Majoul, quant à lui, estime que les sociétés tunisiennes souffrent du manque de financement alors que les fonds existent. Il a affirmé que l'économie transparente paye pour celle parallèle qui bénéficie de tout sans contrepartie : «Nous avons accepté une économie parallèle que nous avons payé cher et qui ne participe pas dans le développement du pays. Nous, nous voulons un paradis d'investissement, de croissance et de création de richesse. Quelles sont les dispositions prises contre la corruption par les 8 gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution? La guerre contre la corruption ne doit pas être un effet de mode et ponctuelle, mais doit se poursuivre», a-t-il martelé.
D'ailleurs, il propose de changer le dinar, pour obliger l'argent qui est hors circuit d'entrer dans le circuit officiel, puis d'obliger les Tunisiens à opérer en chèque et en virement ce qui va limiter les opérations illégales, l'évasion fiscale la corruption et la contrebande. Il a, également, appelé à ce que le dinar devienne convertible et que les Tunisiens soient libres de détenir des devises, et ceci dans le but d'investir. «Nous sommes en crise et nous avons besoin d'internationaliser nos entreprises pour créer de la richesse et de l'emploi et pour contrer le dumping de certains pays».
Pour M. Majoul, c'est une occasion pour prouver notre patriotisme et servir la patrie. Il a dénoncé, dans ce cadre, un déficit de gouvernance et appelé à la mise en place d'une vision et d'un plan de relance économique. Il a expliqué, qu'aujourd'hui, on ne peut plus se permettre la situation à Gafsa (CPG), en soulignant que l'UTICA veut que les entreprises publiques soient leaders dans leurs domaines et non pas un poids pour l'Etat et les contribuables. « Pourquoi l'Etat donne-t-il des garanties pour les entreprises publiques et pas aux jeunes diplômés pour créer des entreprises ? », s'est-il interrogé par ailleurs.

En réponse, M. Derbel a précisé que l'arrêt de production du pétrole à El Kamour ainsi que l'arrêt de production du phosphate a coûté à notre pays 2 points de PIB, soit 1,85 milliards de dinars de manque à gagner.
Appuyant les propos du président de l'UTICA, M. El Karm a indiqué que la monnaie fiduciaire (pièces + billets de banque) est passée de 5 milliards de dinars en 2011 à 11 milliards de dinars en 2015, alors que la tendance mondiale est vers la baisse et plutôt l'usage de la monnaie scripturale. Pour lui, il faut faire des actions pour encourager le decashing, notamment à travers le changement des billets de banque avec obligation de créditer la contrepartie dans une banque, et alimenter de ce fait le marché bancaire.

Le vice-président de l'IACE Taïb Bayahi pense, pour sa part, que la confiance en nos gouvernants a été ébranlée. Pour lui, il n'y a pas de problème économique, mais de gouvernance. Il y a aussi un manque de visibilité notamment au niveau politique, évoquant dans ce cadre le consensus entre les deux grands partis politiques. «Le pays est très mal gouverné et on gouverne le jour le jour, ce qui a aggravé la situation !», a-t-il souligné.
Ahmed El Karm a tenu à préciser que l'ATCF est composé de bénévoles et s'est interrogé si le fait que les réunions de la commission se tiennent à la BCT était opportun. Il a appelé, ainsi, à structurer cette commission avec la mise en place notamment d'un conseil d'administration. Il a martelé que la manière de gérer ce backlisting est très importante.
Il a souligné, en outre, que «nous sommes confrontés à améliorer nos systèmes de compliance (conformité), sinon on risque que des banques internationales n'acceptent plus les transferts provenant de la Tunisie». D'ailleurs, il a recommandé l'accélération de la sortie sur le marché international, car la situation peut s'aggraver, «pour ne pas subir une nouvelle augmentation de taux»

Recommandations
Que faut-t-il faire pour sortir de la liste des pays surveillés du GAFI. Un plan d'action a été mis en place entre le gouvernement tunisien et le Groupe d''''action financière qui concerne une douzaine de points. Parmi les mesures à entreprendre, on peut citer : la réforme de la loi régissant le registre du commerce pour identifier le bénéficiaire effectif, l'introduction de la lutte contre le financement de la prolifération au niveau de la loi sur le blanchiment d'argent et la promulgation de la loi contre l'enrichissement illicite ainsi que des guides de conformités des professions libérales, formation des PNF, amélioration des capacités de leurs organes de supervision.
Il faudra aussi mettre en place une approche basée sur le risque auprès des intermédiaires en bourses et du Comité général des assurances (CGA), geler les avoirs de terroristes conformément aux exigences de l'ONU et intégrer des systèmes de détection des opérations suspectes dans toutes les banque.
Autres recommandations, le renforcement des ressources humaines et moyens techniques de la CTAF ainsi que la révision de la gouvernance de la CTAF outre le renforcement des capacités du personnel des banques en charge de la conformité, la formation des juges et l'accélération de la gestion des dossiers, l'application de la loi sur le financement des associations et l'audit des entreprises Off Shore sans employés.

Se conformer aux exigences du GAFI, est-il suffisant ?
Certes répondre aux normes du GAFI sera une grande avancée pour la Tunisie avant tout, mais ceci devra être accompagné par des mesures contre l'évasion fiscale et de lutte contre l'économie informelle. Le gouvernement devra aussi songer à mettre en place une stratégie efficace de decashing, où l'Etat devra donner l'exemple, étant demandeur de plus de 50% du paiement en cash.
En outre, le gouvernement devra maintenir les pressions pour sortir la Tunisie des deux listes, celle grise des paradis fiscaux et celle noire des pays exposés aux blanchiments de capitaux et au financement du terrorisme.
A cette occasion, la sonnette d'alarme a été tirée sur les probables conséquences, d'une ampleur plus grave que les 2 backlistages, avec l'entrée en vigueur le 25 mai 2018 du Règlement général de la protection des données, une nouvelle réglementation européenne. Cette nouvelle loi vise à renforcer les droits des personnes, de responsabiliser les acteurs traitant des données et de crédibiliser la régulation. Elle aura un impact direct, non pas sur l'image ou la conformité, mais directement sur les sociétés tunisiennes qui exploitent ce genre de données notamment le secteur des TIC, les banques, les call-centers, etc. d'où la nécessité de se préparer et d'anticiper ce nouveau deadline.

La Tunisie doit très vite mettre en place les réformes qui s'imposent pour qu'elle puisse avancer, créer de la croissance, de l'emploi et de la richesse, et retrouver son image et sa place, au lieu de se contenter de réagir aux catastrophes et de subir les conséquences.


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