Samia Abbou et Abir Moussi, deux figures emblématiques de la scène politique nationale. Si, au premier abord, leurs combats peuvent sembler aux antipodes, plusieurs similitudes les relient. Focus sur le parcours de ces deux femmes de fer à la veille de la Journée mondiale de la Femme. La femme tunisienne a toujours été au centre de la scène nationale et internationale. Malgré cela, sur la scène politique, ce sont les hommes qui dominent. Seules quelques rares dames sont parvenues à percer dans ce monde de « brutes », parmi elles, on ne peut bien sur occulter les fortes positions de Abir Moussi, ni les interventions virulentes de Samia Abbou. Ces deux femmes ont réussi à se distinguer grâce à leur caractère bien trempé et leur tempérament de feu. Bien que très controversées, aucune d'elles ne laisse indifférent !
Abir Moussi : La femme qui a dit non aux islamistes !
Abir Moussi, souvent associée au RCD dissous, a été effectivement secrétaire générale adjointe du rassemblement constitutionnel démocratique, chargée de la femme. Née en 1975 à Jammel, au gouvernorat de Monastir et mère de deux filles, la quadragénaire détient une maîtrise en droit et un DEA en droit économique et en droit des affaires. Elle est avocate au barreau près la Cour de cassation. Elle a déjà été vice-présidente de la commune de l'Ariana, présidente du comité du contentieux et membre du forum national des avocats du RCD, ainsi que secrétaire générale de l'Association tunisienne des victimes du terrorisme, du temps de Ben Ali.
La jeune dame s'est fait remarquer en 2011, lors du procès intenté par le ministre de l'Intérieur à l'époque, Farhat Rajhi, pour dissoudre le parti du RCD. Tout le monde se remémore encore la scène où Abir Moussi fût tabassée et lynchée par des dizaines de personnes devant et à l'intérieur du Tribunal de Tunis, alors qu'elle défendait bec et ongles ses convictions. Un épisode qui lui a valu aussi bien le respect que la haine.
Quelques années plus tard, elle est désignée présidente du Parti Destourien Libre. A la tête du PDL, elle est restée égale à elle-même et n'a pas « retourné sa veste » menant un combat acharné contre les islamistes au pouvoir et appelant même à la dissolution du parti Ennahdha ainsi qu'à l'élaboration d'une nouvelle constitution. Abir Moussi considère qu'Ennahdha n'a jamais renoncé à son référentiel religieux et n'arrive toujours pas à devenir un véritable parti civil. Elle va jusqu'à appeler à l'ouverture d'une enquête sur les sources de financement de ce parti, outre ses rapports avec l'organisation des Frères musulmans. Une position très tranchée plaidant pour l'exclusion de l'un des plus grands partis de la scène nationale. Certains considèrent que cette dame a réussi à dire très haut ce qu'une majorité silencieuse pense tout bas, tandis que d'autres ne parviennent pas à lui pardonner son passé à la solde du système de Ben Ali et rejettent ses tendances oppressives. Dans tous les cas, Abir Moussi a réussi à se frayer un chemin et à se faire une place de choix sur l'échiquier politique national.
Samia Abbou : La députée redoutable et redoutée !
Née en 1965, Samia Abbou est devenue l'une des voix emblématiques de l'opposition au parlement. Elle a poursuivi ses études primaires et secondaires dans la ville de Tebourba, pour ensuite intégrer la faculté de droit et des sciences politiques de Tunis jusqu'à y décrocher son diplôme d'études approfondies en 2010. Mariée à l'homme politique Mohamed Abbou, et mère de trois enfants, cette avocate figure parmi les membres fondateurs du Conseil national pour les libertés en Tunisie et rejoint le Congrès pour la République en 2006. Samia Abbou fût membre de l'Assemblée nationale constituante (ANC), en remplacement de Moncef Marzouki, à partir du 27 décembre 2011. Elle quitte le Congrès pour la République en 2013 et rejoint le Courant démocrate (Attayar), sous les couleurs duquel elle est élue à l'Assemblée des représentants du peuple lors des élections de 2014.
Ainsi, et depuis l'avènement de la révolution, Samia Abbou s'est forgée une image d'opposante « grande gueule ». Ses interventions à l'Assemblée ou dans les médias sont souvent virulentes et créent la polémique. La majorité des ministres et autres hommes politiques n'ont pas réussi à échapper à ses remarques et ses tirades. La députée Attayar s'est bâti la réputation de dénonciatrice de la corruption. Une image qui lui permis de se retrouver aux premiers rangs des sondages d'opinion et à se positionner parmi les personnalités ayant le plus grand capital confiance des citoyens. Grâce à sa combattivité et sa détermination, Mme Abbou est devenue l'une des députées les plus redoutées à l'Assemblée où rares sont ceux et celles qui parviennent à lui tenir tête. Oratrice remarquable, certains observateurs estiment qu'elle est l'incarnation de l'intégrité et de l'impartialité. Ses détracteurs restent cependant nombreux. Samia Abbou ne fait pas, en effet, l'unanimité autour d'elle, puisque d'autres personnes la considèrent comme étant une « populiste », voire un « hystérique » et une adepte de la politique des deux poids, deux mesures. Son incohérence conjuguée à un discours figé contre ses ennemis fait qu'il lui arrive de perde même ses causes les plus justes.
En tout état de cause, Samia Abbou, qu'elle soit appréciée ou contestée, est une femme qui s'est faite une notoriété. Elle est parvenue à gagner la confiance d'un large pan de la société tunisienne qui voit en elle, la voix de la justice.
Deux voies opposées, une détermination unique
Incontestablement, les voies de ces deux femmes sont diamétralement opposées, mais elles restent toujours animées par cette même rage de vaincre et cette détermination à atteindre leurs objectifs. Ces deux avocates possèdent une volonté qui leur permet de s'imposer malgré toutes les critiques et les controverses qu'elles suscitent. Leurs capacités d'affrontement et leurs profondes convictions font qu'elles soient propulsées vers le devant de la scène politique.