« Sachons saisir ensemble les opportunités que présente la crise économique mondiale pour développer une stratégie économique commune basée sur l'innovation et la compétitivité » , tel est l'appel qu'ont lancé en chœur, les Premiers ministres tunisien et français, MM. Mohamed Ghannouchi et François Fillon, jeudi à la clôture du forum économique tuniso-français. S'adressant aux hommes d'affaires tunisiens et français, réunis à Tunis, pour débattre d'une nouvelle forme de coopération bilatérale innovante, M. Mohamed Ghannouchi les a appelés à conjuguer les efforts, en nouant alliances et partenariats axés sur l'innovation et la compétitivité, pour aller plus loin sur la voie d'une coopération aux multiples volets, faite d'échanges, d'investissements et de croissance sur des bases mutuellement profitables. La nécessité d'une coopération aux multiples volets Il a exhorté la communauté d'affaires à exploiter les potentialités existantes, leur rappelant que les projets d'investissement des pays du Golfe en Tunisie sont maintenus. La réalisation de certains vont même commencer incessamment. Il ne s'agit pas uniquement de projets immobiliers et touristiques, a précisé le Premier ministre, évoquant le projet industriel de construction d'une raffinerie à la Skhira. M. Ghannouchi a souligné, à cette occasion, la volonté politique d'imprimer un nouvel élan à la coopération bilatérale, en vue de mieux nous positionner pour affronter la crise à laquelle nous sommes confrontés, relevant que l'environnement économique est favorable au développement des affaires entre les deux pays. La France est dotée d'un réseau dynamique de grands groupes et de PME à la pointe de l'innovation, disposant d'importantes aptitudes à investir dans des projets de partenariat industriel et technologique, « gagnant-gagnant », a t-il précisé. S'agissant de la Tunisie, M. Ghannouchi a évoqué les réformes entreprises sous l'impulsion du Chef de l'Etat, dont notamment le développement des secteurs de l'éducation et de la formation (7,5pc du PIB), la promotion de la recherche scientifique et de l'innovation (1,25pc du PIB), la réalisation de grands projets dans l'infrastructure de base et l'ouverture de l'économie nationale axée sur l'accord d'association avec l'Union Européenne et le démantèlement tarifaire. La crise internationale n'altère pas la dynamique d'investissement, ni n'entame notre détermination à maintenir le cap de la croissance, a affirmé le Premier ministre, avançant que la dynamique de croissance pourra être maintenue, même si son rythme s'est ralenti. M. Ghannouchi a avancé que la croissance restera supérieure au croît démographique, rappelant, à ce propos, l'appel lancé par le Président Zine El Abidine Ben Ali au siège de l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA), aux hommes d'affaires tunisiens, pour faire preuve de vigilance et mobiliser toutes les énergies afin de dépasser cette crise. La crise internationale n'altère pas la dynamique d'investissement Les choix faits par la Tunisie, ont favorisé l'émergence d'une forte classe moyenne représentant 80pc de la population tunisienne, a t-il ajouté. Ils ont, également, permis à l'économie tunisienne d'être plus compétitive, plus diversifiée et plus ouverte sur l'extérieur, engrangeant 5pc de croissance au cours des dernières années. Le Premier ministre a réitéré que les fondamentaux économiques nationaux sont conformes aux critères de Maastricht, rappelant que la Tunisie a obtenu des classements honorables en matière de compétitivité, occupant la 36éme position sur 134 pays, selon le forum économique mondial de Davos. Le pays peut, aussi, se prévaloir de rating encourageants et notamment le maintien de la notation « BBB » pour la cinquième fois consécutive, malgré l'adoption de critères plus sévères en la matière, a-t-il poursuivi. Il a rappelé, dans ce contexte, les mesures adoptées par le gouvernement pour aider les entreprises à dépasser les effets de la crise économique mondiale, tout en œuvrant à améliorer le climat des affaires. Engagement de gros projets Il a, en conclusion, présenté les grands projets que la Tunisie compte réaliser, à savoir l'extension du réseau autoroutier en direction de la Libye et en direction de l'Algérie de 220 KM, le développement du réseau ferroviaire, particulièrement urbain, la réalisation de 2 centrales électriques, de 2 stations d'épuration et d'une unité de désalinisation à Djerba… Le Premier ministre a, aussi, évoqué les autoroutes de la mer et l'octroi d'une licence globale de télécommunications, autant de projets susceptibles d'intéresser les investisseurs français. M. Fillon a mis en exergue, dans son allocution, le soutien indéfectible de son pays à la Tunisie, précisant qu'il « maintiendra son effort financier pour le développement économique et social du pays » et qu'il « continuera à plaider auprès de ses collègues européens pour préserver et augmenter les flux financiers communautaires vers la Tunisie. » Il a ajouté qu'au moment où les marchés de capitaux deviennent incertains, la Tunisie peut compter sur les ressources de l'Agence française de développement (AFD). Le Premier ministre français a affirmé que la Tunisie « grâce à une gestion prudente et des fondamentaux solides, présente des résultats impressionnants. » S'agissant de la crise internationale, il a souligné la nécessité pour les deux pays de « se battre » ensemble et de jouer à fond la carte de la coopération, affirmant que « les financements français concessionnels ou non, sont largement mobilisés pour les grands projets tunisiens. » Il a noté la mise à la disposition des entreprises tunisiennes exportatrices d'une ligne de crédit de 40 millions d'euros, soit environ 72 millions de dinars, pour l'achat de produits français et la mobilisation de 40 millions d'euros, soit environ 72 millions de dinars de subventions pour la formation professionnelle, dans le cadre de l'accord de gestion concertée des migrations. M. Fillon a, également, rappelé les accords signés jeudi dans les domaines de transport, de l'enseignement et de l'éducation outre les accords déjà en vigueur entre les pôles de compétitivité des deux pays. La Tunisie a été le premier pays émergent avec lequel les pôles de compétitivités français ont développé d'étroites relations, notamment dans les domaines des nouvelles technologies, du textile et de l'agro-industrie, a t-il précisé. De telles formes de coopération, estime M. Fillon, sont de nature à rendre les opérateurs de deux pays « plus forts sur les marchés asiatiques ou américains. » Quelque 1000 PME françaises en Tunisie Le Premier ministre français a, en outre, évoqué les facteurs de nature à rapprocher davantage les deux pays, notamment les 600 mille Tunisiens ou Franco-tunisiens vivant en France, les 80 mille visas délivrés annuellement aux Tunisiens et les 10 mille jeunes tunisiens étudiant en France, précisant que les tunisiens sont les étudiants étrangers les plus nombreux à l'école polytechnique française. Il s'est félicité de la présence de 1000 petites et moyennes entreprises françaises en Tunisie et de près de 2500 entrepreneurs tunisiens en Ile de France. Au plan multilatéral, le Premier ministre français a exprimé la disposition de son pays à accompagner la Tunisie dans l'approfondissement de ses relations avec l'Europe, notamment au moment où les négociations s'ouvrent sur la libéralisation des services et du commerce agricole ainsi que sur le partenariat renforcé. Evoquant l'Union pour la Méditerranée (UPM), M. Fillon a indiqué qu'elle constitue un instrument de l'intégration régionale, notant que la Tunisie s'associe au Plan solaire méditerranéen, aux projets d'autoroutes de la mer et à l'interconnexion des réseaux électriques. M. Hédi Djilani, président de l'Union tunisienne de l'Industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) co-organisatrice du forum avec l'organisation patronale française (MEDEF), a estimé que des potentialités d'investissement énormes peuvent être davantage sondées entre tunisiens et français, compte tenu des atouts reconnus des économies des deux pays. Il a ajouté que des secteurs tels que les TIC, les énergies, les finances, les services, les transports sont les mieux aptes à répondre aux exigences de l'innovation et de la productivité pour affronter les effets de la crise internationale.