Le monde est exposé à la plus sévère crise économique qu'il a connue depuis des décennies. Bien que la crise ait été déclenchée par des événements qui se sont produits sur le marché américain, elle constitue un sérieux revers pour l'économie mondiale. Le continent africain, y compris la Tunisie, ne sera pas épargné par les effets de la crise. Aujourd'hui, la difficulté est que ce nouveau creux intervient alors que l'on n'était pas encore complètement sorti de l'ornière précédente. Une chose est sûre : il faudra encore retrousser les manches, car à long terme, cette crise aura un effet sur l'économie tunisienne, comme l'explique Mahmoud Baroudi, analyste financier et chercheur en économie. « L'histoire est utile non pour y lire le passé, mais pour y lire l'avenir », affirme Filippo Pananti. En 1783, les Etats américains ont arraché leur indépendance à la Grande Bretagne. Le prix de cette émancipation était très cher et le remboursement de la dette d'indépendance était impossible pour certains Etats et d'autres s'y refusaient tout bonnement. Après la ratification de la Constitution des Etats Unis en 1789, Georges Washington accéda au pouvoir, créa le département du Trésor des Etats-Unis et nomma Alexandre Hamilton à sa tête. Ce dernier savait qu'un impôt mal conçu affaiblirait une économie fragilisée et il lui fallait l'approbation du Congrès pour que le gouvernement fédéral prenne en charge la dette des différents Etats. Cet ancien chef d'état Major durant la guerre d'indépendance avança l'utilisation de la puissance fédérale pour moderniser la nation. Après de longues tractations (surtout après l'opposition des dirigeants sudistes Jefferson et Madison) il convainquit le Congrès d'interpréter largement la Constitution pour passer des lois audacieuses permettant de résoudre le problème de la dette de certains Etats. Elles comprirent la création d'une dette nationale, la garantie fédérale des dettes des Etats, la création d'une banque nationale et un système de taxes à travers des tarifs sur les importations et une taxe sur le whisky qui paierait le tout. Deux siècles après, la dette des Etats-Unis a atteint un plafond 14 297 milliards de dollars presque 100% du PIB. La loi américaine exige du Congrès qu'il autorise le gouvernement à s'endetter jusqu'à un certain seuil pour financer sa politique en cours. Lorsque le déficit cumulé du pays atteint ce « plafond », la somme est réévaluée au Congrès. Ainsi, depuis 1980, le plafond de la dette a été augmenté pas moins de trente-neuf fois. Il faut savoir que les Etats-Unis payent mensuellement 30 milliards de dollars d'intérêts sur la dette et ils doivent refinancer ces mois 500 milliards de dollars de dettes. Aujourd'hui, le Congrès Américain s'est donné un mois de plus pour retrouver un consensus qui sortirait le pays et le monde d'une grave crise. Si un compromis n'est pas trouvé on risque de voir un pays comme les Etats-Unis est incapable de payer ses fonctionnaires, les pensions de retraites seraient arrêtées et les aides sociales suspendues. Ainsi les USA seraient dans l'incapacité de lever les fonds nécessaires aux paiements des intérêts et au renouvellement de leur dette. Mais quel est l'impact de cette crise sur l'économie tunisienne? « La diffusion internationale de cette crise est vue en grande partie comme le résultat de la globalisation financière. Ce phénomène dit « de contagion internationale ». Dans l'immédiat, la Tunisie ne va pas ressentir l'impact de cette crise puisqu'on n'est pas vraiment un pays ouvert sur les marchés financiers internationaux », estime M. Baroudi. Mais à moyen terme et suite à une récession probable de l'économie mondiale, l'économie tunisienne va subir à un degré plus ou moins élevé la chute des investissements directs étrangers (IDE), la baisse du tourisme et des exportations, la baisse des transferts des migrants, la tension sur les taux d'intérêt et de change, enfin la fuite des capitaux. Si on ajoute à cela l'impact de la Révolution le climat d'insécurité, les sit-in et les blocages répétitifs et parfois sans fondement, l'économie tunisienne peut se trouver dans une situation très difficile qui peut controverser tout le processus de transition démocratique.