M. Hamma Hammami, secrétaire général du parti ouvrier communiste de Tunisie (POCT) a accordé une interview fleuve au journal « Al Maghreb ». Il y expose en long et en large, ses impressions voire ses convictions, sur le paysage politique, socio-économique, sécuritaire du pays. En fait, tout y passe et M. Hammami y va de ses critiques acerbes vis-à-vis de la coalition au pouvoir en gros et en détail, des partis, du gouvernement, de la Constituante, de certains ministres, de la situation sociale des Tunisiens et économique du pays ainsi que de « menus » épisodes de la vie publique. Il trouve la vidéo sur M. Ali Laarayedh abjecte, l'affaire de Moncef Laajimi manquant de transparence. La performance du gouvernement de M. Caïd Essebsi est un échec retentissant, car n'ayant pas su déterminer les priorités alors que l'actuel ne semble pas disposer d'un programme clair et fiable et navigue à vue avec un navire tunisien qui tangue dangereusement. Quant au président de la République, au Chef du gouvernement et au président de l'Assemblée constituante, M. Hammami déplore les attributions congrues du premier, conseille au second de surveiller son langage et espère pour le dernier qu'il joue un vrai rôle lors de sa présidence de la commission d'élaboration de la constitution. Evoquant les grèves, les sit-in et leur impact sur la vie socioéconomique du pays, le SG du POCT a indiqué que ces manifestations sont spontanées et légitimes. Il s'agit, dit-il, pour les partis au pouvoir d'abandonner « la théorie du complot » dont ils se disent être victimes et de se pencher avec tout le sérieux requis sur les problèmes que vit le pays. M. Hammami rejette évidemment l'orientation anarchique que prennent ces mouvements, mais soutient leur tenue pacifique comme étant les seuls moyens aux mains du peuple pour exprimer ses attentes et revendications. M. Hammami suggère des solutions : gel des prix des matières de première nécessité, régulation des prix des denrées soumises à spéculation, instauration d'une prime de chômage, unification des salaires minimums garantis à 400D mensuels, outre la titularisation des travailleurs occasionnels, l'amélioration de la situation des étudiants, diminution des prix de l'électricité et du gaz. Il appartient au gouvernement en place, a-t-il dit, de demander une suspension du paiement de la dette ou son rééchelonnement, l'instauration d'un impôt sur les fortunes, la maîtrise des dépenses publiques, la lutte contre la fraude et la fuite fiscales. Tout en refusant d'admettre que les solutions soient sécuritaires, M. Hammami souligne que l'inconsistance du programme présenté par le gouvernement doit être considéré comme la principale cause de ces manifestations et appelle à l'arrêt des accusations portées contre les partis d'extrême gauche arguant que ces partis que l'on qualifie de « zéro virgule »sont sans grande influence sur l'opinion publique et sont par contre incapables d'une telle mobilisation de personnes. Par contre, le SG du POCT se montre particulièrement virulent envers « Ennahdha » qui, elle, a tous les moyens de mobiliser ses milices que l'on remarque en nombre considérable sur les lieux des manifestations. La présence d'importants contingents de contre manifestants « nahdhaouistes » suscite l'inquiétude générale et les agressions perpétrées contre les journalistes, les professeurs, les étudiants sont à condamner avec vigueur. Alors que par ailleurs, accuse-t-il, on choisit de fermer les yeux sur nombre d'événements graves comme la prolifération des groupes salafistes en différents lieux du pays. M. Hammami met Ennahdha face à ses responsabilités et la somme de prendre une position sans ambiguïté sur ce genre de comportements. La politique étrangère du pays est également décriée par M. Hammami qui considère comme autant de bévues l'invitation de M. Haniyeh, l'annonce d'intégration tuniso-libyenne, l'inféodation au Qatar, l'ingérence dans les affaires algériennes. Ces incuries dénotent, selon lui, une navrante inconscience diplomatique et pourrait nuire à l'image du pays et à ses intérêts. Prié de donner son avis sur le devenir de la coalition au pouvoir, le SG du POCT lui prédit un avenir incertain puisqu'elle a été faite sur le seul objectif d'un partage du pouvoir. M. Hammami a terminé ses propos en indiquant que la situation du pays est délicate mais que le POCT est toujours là pour défendre les intérêts des Tunisiens mais qu'il dénonce les tentatives visant à faire endosser les erreurs commises à d'autres et d'utiliser les événements de toutes sortes pour faire régresser le pays.