L'intervention de Sadok Chourou, un des leaders du parti Ennahdha et représentant du peuple à la Constituante, continue à faire des remous. Ses propos s'apparentent à une fatwa, appelant à la violence contre les sit-ineurs, les contestataires et les grévistes. En s'appuyant sur un verset du Coran, M. Chourou demande à sévir contre les sit-inneurs et les bloqueurs. L'islamiste appelle ainsi à tuer, crucifier, ou couper la jambe ou la main aux sit-inneurs ou aux grévistes qui empêchent la stabilité du pays et la reprise économique. Bien qu'on ait du mal à croire que M. Chourou pense sérieusement à exécuter ou à couper une main et une jambe aux délinquants et voleurs tunisiens, son intervention a eu le mérite de secouer aussi bien le gouvernement que le peuple tunisien. Cette intervention a été très mal accueillie par une bonne partie de la population. Entre dissidents et partisans, les réactions se multiplient. La majorité de la composante de la société civile a dénoncé les déclarations de M. Chourou. Selon cette population, toute incitation à la violence est à condamner fermement. Si on cède sur cet épisode, ce sera la porte ouverte au désordre le plus total. Ce qui s'est passé à Sejnane, à la Manouba, à Sousse et ailleurs deviendra bientôt la règle. Face à des attitudes d'une telle gravité, d'aucuns estiment qu'il ne faut pas se taire. Ils jugent que le silence équivaut à une complicité, à une capitulation, voire un suicide des libertés individuelles, l'une des raisons pour laquelle notre Révolution a été déclenchée ! Cependant, que peut-on répondre à ceux qui jugent que Sadok Chourou a le droit de dire n'importe quoi et de faire ce qu'il veut ? Certains membres du gouvernement Jebali pensent que Chourou peut dire ce qu'il veut. L'immunité de l'Assemblée nationale constituante le protège. On ne peut pas le poursuivre en justice parce qu'il a dévoilé ses intentions. Cet homme a passé plus de vingt ans dans une prison individuelle. Il faut le laisser parler. C'est quant même grave qu'un islamiste, de surcroit représentant du peuple, ne peut pas contrôler ses paroles ! Il ne faut pas oublier cependant qu'on vit dans une jeune démocratie où les libertés sont fondamentales mais non encore réglementées, en attendant la rédaction de la Constitution. La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres, doit-on le rappeler ?. De grandes valeurs prônées par l'islam encouragent le débat, la discussion et à la négociation. Peut-on oublier que la violence appelle la violence ? La coalition au pouvoir est appelé à prendre ses responsabilités quant aux propos tenus par ses partisans. Ennahdha se trouve de plus en plus dans une position inconfortable. Il est nécessaire de mettre les choses au clair et d'en finir avec les discours flous et ambigus. La transparence devient impérieuse.