« Le projet de loi de finances complémentaire 2012 ne livre pas un message clair à même de rassurer les Tunisiens », a précisé M. Mohamed Haddar, président de l'Association des économistes tunisiens, ASECTU, dans une déclaration à « Maghrebemergent.info ». Pour atteindre 25,4 milliards de dinars, soit une hausse de 10,8%, M. Haddar prévoit une augmentation de 2,5 milliards de dinars du budget de l'Etat par rapport au budget initial. Pour ce faire, les recettes fiscales devront s'élever à 15,1 milliards de dinars contre 13,8 milliards prévus dans le budget initial, soit une hausse de 1,3 milliard de dinars. Les recettes non fiscales devront, pour leur part, atteindre 4,6 milliards de dinars, soit une augmentation de 2,2 milliards de dinars. En ce qui concerne les revenus de cession des biens de Ben Ali, ils sont « surestimés ». Selon M. Abdallah BelHaj, directeur général au ministère des Finances dans le gouvernement de Béji Caïd Essebsi et actuel directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, il s'agit d'objectifs « irréalistes » : « Le projet prévoit 1,2 milliard de dinars contre 400 millions de dinars mentionnés dans le budget initial. Dans la situation actuelle peut-on mettre sur le marché des actifs de cette valeur ?! » De même, les recettes de privatisation devront passer de 100 millions de dinars, dans le budget initial, à 1 milliard de dinars. Le budget mise sur 600 millions de dinars de dons extérieurs contre 172 millions de dinars prévus dans le budget initial, et sur 350 millions de dinars de recettes fiscales supplémentaires obtenues grâce à une sorte d'amnistie fiscale. Selon les experts, le budget révisé reflète une vision très optimiste de l'année économique 2012, en prévoyant un taux de croissance de 3,5%, contre -1,8% en 2011. Pour l'économiste Abderrahmane Lagha, un taux de croissance de 3,5% « demeure tributaire d'un climat politique et social stable, chose qui n'est pas encore observée ». Une idée que partage l'Union générale tunisienne du travail, UGTT. Dans une analyse publiée sur son site web officiel, l'UGTT a jugé le projet de loi de finances complémentaire pour l'année 2012 comme étant très loin des objectifs de la Révolution et en deçà des attentes des acteurs économiques et sociaux : « Le taux de croissance économique fixé par la loi de finances complémentaire ne peut être atteint que grâce à la mise en place d'un climat des affaires sain et d'un climat social apaisé. Or, nous constatons une absence totale de messages rassurants adressés aux acteurs économiques locaux et étrangers ». Ce projet pèche par l'absence de toute mesure relative à l'augmentation des salaires. Les experts économiques de la principale organisation syndicale en Tunisie notent que l'absence de majorations salariales est susceptible de favoriser une régression de la demande intérieure qui devrait constituer le principal moteur de croissance économique surtout que le pays ne peut pas compter sur une hausse des exportations en cette conjoncture marquée par la décélération de la croissance économique partout dans le monde.