Punique, carthaginoise, romaine et arabo- islamique, toutes ces civilisations illustrent, à travers l'artisanat, les traditions, les costumes, l'art culinaire, l'architecture et autres vestiges et témoignages culturels la richesse et la diversité de notre patrimoine civilisationnel. La Médina de Tunis, par exemple, renferme des souks d'artisanat, aux alentours de la Grande mosquée de la Zitouna, aux cotés de médersas, et d'anciennes demeures d'habitation. Chaque souk s'est spécialisé dans un genre particulier d'artisanat: Souk Echawachine est réservé à la confection et à la vente de la chéchia, introduite par les Andalous, Souk El Attarine s'est spécialisé dans la distillation des senteurs et des parfums, Souk El Bleghgia, al balgha: chaussures en cuir, Souk Ennehas, lieu où l'on forge le cuivre, Souk El Birka, pour la fabrication des bijoux et le commerce de l'or et d'autres ''kholkhale'',''rihana'',''khomsa'', ces bijoux sertis d'ambre et de corail qui font le bonheur des femmes et qui remontent à l'ère punique, la pâtisserie traditionnelle d'origine turque, en plus de la Assida deZgougou, le pin d'Alep, la jawia (confiserie de Sidi Belhassen) et les Twajen (petits fours) de pistache et d'amande, sont très prisés. Par ailleurs, la région du Cap Bon est connue pour la poterie la céramique; à Dar Chabaane El Fehri, près de Nabeul, les artisans de la gravure sur pierre sont d'une dextérité légendaire. Sejnène s'est spécialisée dans la poterie, Béja dans la fromagerie et les mekharek, quant à l'île de Djerba, elle est aussi connue pour la poterie. L'on ne peut évoquer les métiers de l'artisanat sans parler des célèbres tapis de Kairouan d'origine turque, ces tapis auraient été introduits en Tunisie par les Hafsides et dont la renommée a traversé les frontières. Les régions de Tataouine et de Kébili possèdent des traditions bédouines influencées par le nomadisme et le passage des caravanes, d'où les tentes, le port de vêtements fabriqués en laine ou en cuir, sans oublier les tapisseries murales. Dans le Djerid tunisien fleurissent les palmeraies, de nombreux métiers de l'artisanat utilisent les rameaux et les troncs de palmiers comme matière première pour la fabrication de meubles, d'outils, de portes et de plafonds. Pour sa part, la ville de Gafsa est renommée pour la confection du ''klim'' et du ''mergoum'' qui recouvrent les parterres ou les murs. Les villes du Sud de la Tunisie ont aussi conservé leurs habitudes culinaires avec des recettes d'origine berbère tels que le ''barkoukesh'', couscous à gros grain, la ''m'tabga'' sorte de pizza pliée en deux, ou la''mardouma'', pain cuit dans le sable. Compte tenu de l'importance de ces métiers en perpétuel risque de disparition, le secteur de l'artisanat a bénéficié en Tunisie d'une attention particulière illustrée par l'encadrement des artisans, le développement des structures d'appui, l'approvisionnement des circuits de distribution. Ainsi le 16 mars de chaque année, on commémore la journée nationale de l'habit traditionnel, en outre, un salon de la création est organisé annuellement, au printemps, avec la participation d'une centaine d'artisans de toutes les régions du pays. Cela reste néanmoins des dates officielles qui, une fois consommées, on oublie l'importance de la sauvegarde de ces métiers pour qu'un patrimoine culturel et civilisationnel perdure. Ainsi l'exposition à la galerie Yahia depuis le 23 mai de Hazibri Hajer qui revisite artisanalement les bijoux, de Samer Haded, un Libanais qui démontre que l'art du “fait main” traverse les pays, des miroirs de Rahma Bouderbala comme un reflet de l'artisanat, sans oublier la participation des ateliers de céramique de Linceram et de mosaïque de Holy Stone qui investissent ainsi l'espace artistique et dénotent l'importance de la valorisation de ces métiers dont les produits sont devenus depuis un moment déjà des gadgets touristiques. Entre les tableaux de paysage et de nature morte de Antonio Martignetti, cette exposition d'objets artisanaux, qui a été clôturée le 30 juin, a trouvé sa place à la proximité de la grande consommation pour mieux ancrer l'identité culturelle et civilisationnelle auprès de la population et contre un oubli quotidien de l'artisanat.